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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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résister à l’exténuation consécutive à tant de jours de chevauchée :
    « Je veux voir sa tête quand il s’apercevra qu’Édouard III l’a fait donner dans le godan (284) plutôt que dans le Goddon ! »
    Oubliant Gauric, oubliant Anne et se remémorant ce qu’il avait appris sur Aiguillon, il fut pris d’une crainte au sujet de Blandine :
    – Les Anglais ne tarderont plus à assaillir le Poitou…
    – Que dites-vous, messire ?
    Il laissa Gauric sans réponse. Blandine… Les yeux de la pucelle, ardents, éplorés, apeurés… Quatorze jours s’étaient écoulés depuis leurs brèves retrouvailles… Ses longs cheveux… Cette mousse d’or sur sa nuque…
    Les oreilles pleines du cliquetis des harnois de guerre, il frissonna au souvenir des femmes, filles et fillettes de ce hameau où les envahisseurs avaient fait une pause.
    « Pourvu qu’elle aille chez Sirvin… et pourvu qu’il l’accueille ! »
    Il tressaillit car une trompe sonnait.
    – Ça y est, dit Gauric, nous arrêtons… On va pouvoir manger un tantinet avant que de repartir !… Holà, messire Ogier, cessez d’être maussade : il est midi, on va manger !
     
    *
     
    Le lendemain, également à midi, Ogier interrogea un coureur qui venait d’informer le roi et son frère des avancées de l’ennemi :
    – Où sont les Goddons… si tu le sais vraiment ?
    – Ils ont remonté l’Eure, messire, pillé et ruiné le Vaudreuil et Louviers… Ils se sont même emparés de Gaillon grâce à un coup de main d’un allié de Godefroy d’Harcourt : Robert de Ferrières… Ils vont… ou plutôt ils courent vers Longueville, Vernon, Freneuse… Autant dire que ces trois cités-là sont condamnées à disparaître !
    – Vont-ils bien vers Paris ?
    – Oui, messire, à ce qu’il semble.
    Quand l’homme eut disparu, le Moyne de Bâle dit à Ogier :
    – Nous sommes, de Paris, montés à Rouen… Nous refaisons toutes ces lieues sur l’autre rive de la Seine pour satisfaire un émouvement (285) mal fondé. Car si Édouard avait loyalement accepté le combat d’homme à homme, il eût franchi le fleuve avec nous, derrière sa bannière, précédé de son fils et de moult chevaliers ! Jamais votre roi, Ogier, n’aurait dû revenir à Paris, car c’est se fatiguer et nous fatiguer tous vainement…
    Le 10 août au soir, alors qu’ils s’apprêtaient à dormir à la belle étoile, Ogier, le Moyne de Bâle et Gauric apprirent par Jean d’Harcourt que les Anglais avaient renvoyé deux cardinaux venus leur demander de cesser la guerre et que les démons avaient conquis Mantes et Meulan ; c’était une baraterie (286) , faux bruit comme il commençait à s’en répandre. Ces cités avaient certes tenté la convoitise d’Édouard et de son fils mais elles leur avaient résisté. Les Anglais s’étaient revanchés de leur déconvenue en assaillant les Mureaux.
    La nuit était douce. Aux lueurs des incendies sur la rive méridionale du fleuve répondaient celles des feux du roi de France, où cuisaient des aliments rares, puisque la plupart des chariots de victuailles, certains tirés par des couples de bœufs, ne pouvaient suivre la chevauchée. Alençon, comme chaque soir avant de se mettre au lit, marchait parmi les hommes, sans ostentation mais sans familiarité.
    – Ah ! Fenouillet… Comment va ?
    – Monseigneur, j’ai appris les nouvelles.
    – Hé oui… Toujours mauvaises… S’il avait l’intention de ne combattre que mon frère, jamais, non jamais Édouard ne suivrait les traces d’Attila !
    Le comte s’était interrompu brusquement ; Ogier se permit une remarque :
    – Monseigneur, ils sont trente mille. Ils s’éparpillent… Nous aurions dû traverser le fleuve par petites compagnies et leur livrer de petits mais continuels assauts…
    – Vous voyez tout petit, Fenouillet ! dit une voix dont l’acerbité n’excluait pas la dérision.
    Ogier fit front et s’inclina sans trop de mauvaise grâce :
    – Sire, je disais à monseigneur votre frère ce qu’il me semblait bon pour la sauvegarde du royaume !
    Philippe VI, toujours vêtu de son ample robe rouge et l’épée au côté, eut, sous son long nez, un sourire d’indulgence extrême :
    – Je sais, moi, ce qui convient à la grandeur du royaume. Édouard détruit, embrase et fait ses délices d’un jeu où Néron l’a pourtant dépassé… Qu’il en profite bien car sa mort…
    – Allons, mon ains-né ! Allons ! dit

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