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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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qu’Ogier se frottait l’épaule :
    – C’est le Regimen, un des ouvrages majeurs.
    Abandonnant sa lecture et s’aidant de l’extrémité de ses ciseaux, il puisa dans le pot une compresse. Il nettoya l’ancienne blessure dont l’humeur s’évacuait toujours. Ogier éprouva une sensation de froid et ne sentit rien quand, des deux pouces, le mire comprima les lèvres de la cicatrice pour en exprimer tout le pus.
    – Notre reine, la Boiteuse, que Dieu nous reprendra bientôt, j’espère, a des tours aussi malicieux que celui qui t’a fait ça… Le mal ne t’a pas pris d’un coup ?
    – Non, messire.
    – Peu à peu ton pouls a battu fort ; ton front est devenu moite ; tu as souffert d’un commencement de fièvre maligne… La chaleur humide… On t’a soigné…
    « Adelis … Sans elle, peut-être, serais-je désormais dans le même état que le centurion ! »
    – Je viens de t’appliquer le tempérament contraire : du froid sec… la bétoine… Mais revenons à ce que je te disais : j’avais prévu ta venue.
    « Qu’il soigne mon épaule ! » enragea Ogier, frémissant d’impatience.
    – Je connais le Ciel aussi bien que la Terre… J’en franchis chaque nuit les portes et chemine quiètement d’étoile en étoile… J’assiste aux levers du soleil et connais même – sans l’avoir mise encore en pratique – l’invocation sacrée qui abrège les jours, et celle qui muselle et désarme jusqu’aux démons… Je lis dans ton visage et peux te répéter que tu n’es pas seulement un lion dans l’arène, mais aussi dans la vie, car d’après la configuration de ta tête et de ta personne, tu as dû naître en août…
    – C’est vrai, dit Ogier sans cacher son ébahissement. J’ai vu le jour le 22 août 1327.
    – Et ton nom n’est pas celui que tu portes.
    – Hélas !
    – Ne m’en dis pas plus… Donne-moi ta main.
    Ogier offrit la droite, puis la gauche, en précisant :
    – Ce mouvement me fait mal, messire.
    Après avoir examiné les paumes du garçon, Benoît Sirvin le fit asseoir sur un banc. Placé derrière, puis devant, il palpa la partie antérieure de l’épaule et la naissance du cou ; ensuite, son index, légèrement, suivit de bout en bout la saillie de la clavicule.
    – Rien de cassé, mais tu as le bras disjoint à son sommet. Voilà d’où vient cette enflure… Tu as bien fait de monter me voir : si tu avais couru d’autres lances en cet état, le gonflement se serait aggravé. La paralysie t’aurait forcé à quitter la lice. Lève-toi.
    Ogier obéit.
    – Va jusqu’à une de ces colonnes. N’importe laquelle.
    Ogier marcha vers la plus proche.
    – Place ta paume sur le fut à hauteur du bras replié… que ton coude touche ton flanc… Bon… Monte lentement ta main vers le haut sans quitter la pierre.
    Ogier obéit, doutant de pouvoir déplier entièrement son coude. Il souffrait, mais sans aggravation de son mal. Quand son bras fut dressé le long de la colonne, Benoît Sirvin s’approcha :
    – Baisse-le, à présent, car tu dois être guéri.
    Et c’était vrai : le garçon put remuer son membre, le replier, le déplier en tous sens, accomplir un moulinet : la douleur avait disparu (79) .
    – Tu vois, dit le vieillard, c’était tout simple.
    Ogier se demanda quelle avait été la vie de cet homme. Ne s’était-il consacré qu’à la médecine ? Était-ce un ancien guerrier ? Quel pouvait être son âge ? Il avait parfois l’air soucieux et las puis, dès qu’il ouvrait la bouche ou vous perçait de son regard, tout changeait : l’on sentait chez cet être éprouvé par les ans une santé d’esprit hors nature dont le corps profitait.
    – Je viens de cueillir, dit-il, à l’arbre de la Science, des fruits qui te concernent. Mais tout d’abord, tends-moi ton bras.
    Ogier obéit ; le mire couvrit son ancienne blessure d’un emplâtre préparé en hâte dans un mortier de bois, et qui dégageait une odeur de champignon.
    – C’est un onguent maturatif… Toutes ces toiles que j’enroule à ton bras, ôte-les dès après-demain, car tu vas être du tournoi…
    N’osant révéler qu’il n’y tenait pas, Ogier demanda :
    – Vous qui voyez tout… Que vais-je devenir aux joutes ?
    – N’aie crainte : ton bras et ton épaule tiendront. Quant au tournoi, tu vas y rencontrer la malveillance et l’adversité ; c’est le lot de tous les purs… Je crois que peu après, tu reviendras me

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