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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Il s’est résigné…
    – Alors quand  ? demanda Cahors, excédé. Tu te reportes une fois de plus au passé, Godefroy ! Viens-en à l’avenir ! Nous sommes à Pâques… Pour bien nous préparer, il faut…
    – Deux mois, pas davantage, dit Chandos.
    – Quand ?… Avez-vous une idée, Jeanne, vous qui avez si bien combattu sur mer ?… Non !… Et toi, Cahors ?… Non… Toi, Blainville ? Quand faudra-t-il commencer l’embarquement ?
    – Pourquoi pas à la Saint-Jean-Baptiste ? Elle a toujours été profitable à Édouard… Pour ma part, je conserve un bon souvenir de l’Écluse. Ce fut, mes bons amis, une belle journée.
    Le rire de Blainville était inévitable. Ogier s’y attendait.
    – L’immonde ! dit-il entre ses dents.
    Un silence lui parut le signe d’une approbation.
    – C’est le 24 juin, précisa Blainville.
    – Pourquoi non ? dit Chandos. Convenons que le commencement de l’embarquement des armes et des mangeailles aura lieu ce jour-là. Il devrait s’achever le premier de juillet par celui des chevaux et des hommes.
    – Je prendrai entre-temps quelques nefs avec moi, car avant de débarquer à la Hogue, il me faut conquérir Guernesey et occire Robert Bertrand de Bricquebec !
    Blainville s’esclaffa ; il fut le seul, de sorte que son hilarité cessa aussitôt. Il expliqua d’un ton lugubre :
    – Je sais que tu ne portes pas Robert Bertrand dans ton cœur, Godefroy… Sache que le Château-Cornet qui défend toute l’île est placé sous le commandement de Nicolas Hélie…
    – Je conquerrai Guernesey et châtierai Robert Bertrand.
    – Souhaitons qu’au début de juillet la mer nous soit propice.
    – Il faut qu’elle le soit, Richard ! s’écria Chandos. Nous irons gâter les ports du Cotentin avant de débarquer, de façon que les nefs qui s’y trouvent au mouillage ne puissent voguer à l’assaut des nôtres… En quels endroits, Harcourt, devrons-nous attaquer ?
    – Cherbourg, Fermanville, Barfleur, Réville… Sans trop approcher, nous avons de quoi lancer le feu sur les vaisseaux et les maisons (139) .
    – Bien… Nous mettrons ces cités en perdition.
    – Il m’en coûte de devoir procéder ainsi.
    – Garde-toi, Godefroy, de faire l’éploré. Je te sais prêt à tout pour conquérir ces terres… Je retiens de notre conseil restreint qu’Édouard doit prendre la mer les premiers jours de juillet. Après les armes et vitailles, il faut bien en compter deux ou trois pour embarquer les chevaux et les hommes…
    – Holà ! Blainville (c’était Jeanne), n’oubliez pas que si quelque ariole (140) demande à Édouard de demeurer au port, il lui obéira.
    – Il faut, messires, dit Chandos, décider d’un jour extrême où, qu’il vogue ou non vers la Normandie, nous lancerons de partout nos assauts, quitte à battre en retraite si nous apprenons le renoncement du roi… S’il est impatient d’envahir et d’avaler le Pierregord (141) , ce que je comprends, Derby peut également pousser quatre ou cinq mille guerriers jusqu’en Poitou… En Flandre, il est aisé de provoquer des troubles… En Bretagne…
    – Elle s’embrasera comme un feu de sarments !
    – Bien dit, Jeanne. (Et ce compliment fait, Chandos interrogea.) Nous avons parlé du premier de juillet. Quel serait cet ultime jour ?
    – Je propose le 7… La Saint-Raoul, dit Cahors.
    Quand son grand rire s’acheva, Godefroy d’Harcourt hurla presque :
    – Non !… Non !… Prenons un saint Patron.
    – Qui ? demanda Isabelle.
    – Benoît… Saint Benoît… On le fête le 11, je crois…
    – Holà, finissons-en avec vos saints ! coupa Blainville. Par la barbe de saint Denis, on se croirait céans dans un moutier, et non en compagnie d’hommes et femmes de guerre !… Choisissons tout simplement le second dimanche de juillet. Au moins, nous saurons tous où nous irons !
    Il y eut à mi-voix quelques objections ; Cahors y mit un terme en regrettant :
    – J’aurais pourtant aimé commencer le combat le jour de ma fête !
    – Une fête écarlate, Raoul, et nullement comme ce tissu de toutes les couleurs dont est fait ton pourpoint… Une fête écarlate à la manière anglaise (142)  : une fête de sang, de douleurs et de ruines… sur le sol où je suis né !
    – Ne fais pas le sensible, Harcourt ! Tu n’es à l’aise que l’épée dégainée. Qu’en pensez-vous, Jeanne ?
    – Peu m’importe, Richard, dès l’instant que le

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