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La Fille Du Templier

La Fille Du Templier

Titel: La Fille Du Templier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Thibaux
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d’un
regard compatissant, je crains que tu ne sois pas venue de ton plein gré. Il me
déplairait de te voir à la merci du comte de Barcelone. Tiens-toi en retrait de
la mêlée.
    — Jamais ! Si je suis ici, c’est au nom des femmes
de la cour d’amour qui ont pour vocation de faire respecter la justice et d’œuvrer
pour la paix. Si je suis ici, c’est parce que je vais au gré de mes désirs. Et
mon désir de ce jour est de sauver des vies. Il y a fort longtemps que je te
conjure d’accepter des conditions de paix avec ce butor de Bérenger et de venir
vivre à Signes. Notre cour a besoin de ton expérience, Stéphanie.
    — S’il ne tenait qu’à ma volonté… ah oui, soupira la
comtesse des Baux, je te soutiendrais mais regarde-les ! Regarde-les !
lança-t-elle en montrant ses hommes et ses fils. Dins un temps counfisavoum
ensen, mai aro counfiso plus [2] Ils ne jurent plus que par leurs épées ; ils aiment leurs chevaux de
guerre plus que leurs promises ou leurs épouses ; ils tueraient leurs
frères pour un muid de blé et je suis obligée de souscrire à cette soif. L’heure
approche. Je te le demande une dernière fois : tiens-toi avec la réserve.
    — Non !
    — Elle sera sous notre protection !
    Stéphanie tourna vivement la tête pour contempler celle qui
venait de s’imposer d’une voix claire et forte.
    Son œil remarqua la croix templière peinte sur l’écu et
cousue sur la tunique. Une géante couvrait son flanc gauche ; elle jugea
cette dernière apte à tuer un ours à mains nues.
    — À qui ai-je l’honneur ? demanda-t-elle.
    — À Aubeline d’Aups et à Bérarde de Savoie, sa femme
lige, répondit Bertrane. Elles font partie de ma garde personnelle. Le père d’Aubeline
a rejoint l’ordre du Temple et sauvé la vie du roi Louis VII.
    — J’ai en effet entendu parler des exploits du
chevalier Othon d’Aups, dit Stéphanie. Espérons que sa fille sera à sa hauteur.
Seigneur Bertrand, vous vous tiendrez sur mon flanc droit. Excusez-moi à
présent, je vais m’enquérir de la position de mon cher beau-frère.
    Bertrane remonta sur son cheval noir et s’empara de la
bannière de Signes avant de rejoindre le flanc droit de l’armée au côté de son
époux qui s’était mis à prier. Aubeline et Bérarde l’encadrèrent.
     
    Les chevaliers les saluèrent. L’emblème de Signes leur était
familier. Il représentait la célèbre cour d’amour dont la renommée s’étendait
jusqu’à Byzance. La cour, née au lendemain de la première croisade, était le
contrepoids des guerres qu’ils aimaient tant, la bête noire de l’Église
bien-pensante ; on y parlait d’amour, d’amour et encore et toujours d’amour
depuis plus de trente ans, avec l’espoir de changer la mentalité des féodaux. Le
même amour portait Bertrane en cet instant.
    Elle songeait que ce serait une joie dépassant toutes les
joies terrestres que de les voir jeter leurs armes et se réconcilier avec les
Catalans, mais cette pensée fut troublée par une sourde rumeur montant des
rangs de l’armée.
    — Je les sens ! Les chiens montrent les crocs !
dit Bérarde en se servant d’une seule main pour s’exprimer.
    Aubeline se dressa sur ses étriers et observa l’horizon. Sur
les bords de l’étang de Scamandre, un cavalier venait d’apparaître.

7
    Le cavalier rôda entre les roseaux, provoquant l’envol d’un
échassier aux ailes cendrées, puis s’avança hardiment vers les troupes des Baux
dont l’arc de cercle menaçant occupait tout le levant. Il tenait la lance à l’épaule
et son écu était frappé de l’effigie d’un saint. Il se rapprocha en prenant
garde de rester hors de portée des flèches.
    — Raymond Bérenger ! hurla Hugon. Mère, je t’en
conjure, laisse-moi te rapporter sa tête !
    — Tu n’en feras rien ! répliqua Stéphanie. Vois
toi-même, il peut tourner bride à tout instant et je parie que l’une de ses
compagnies d’archers est dissimulée dans les roseaux. C’est un piège, mon fils.
Mesure-toi… Par saint Rémy ! Vais-je devoir t’enterrer comme ton père ?
    Malgré la distance qui la séparait d’eux, Bertrane entendit
l’altercation. Le danger venait du jeune seigneur des Baux ; il n’y avait
qu’un pas de l’intrépidité à l’emportement et Hugon l’avait franchi depuis
longtemps. Cependant ce ne fut pas le bouillant rejeton de la comtesse des Baux
qui rompit la ligne.
    Tu te souviens de ma promesse ?

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