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La Fille Du Templier

La Fille Du Templier

Titel: La Fille Du Templier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Thibaux
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d’aventurier. Il s’éclaira cependant. Il
ressembla à celui d’un anachorète touché par la grâce tout le temps que dura le
Notre Père puis le cantique des Philippiens :
     
    Devenu semblable aux hommes,
    Reconnu homme à son aspect,
    Il s’est abaissé,
    Devenant obéissant jusqu’à la mort
    Et la mort de la Croix.
    C’est pourquoi Dieu l’a exalté :
    Il l'a doté d’un Nom
    Qui est au-dessus de tout nom,
    Afin qu’au nom de Jésus
    Tout genou fléchisse
    Au ciel, sur terre et aux enfers…
     
    Jean avait prié sans illusions. Il se sentait l’âme lourde
de fautes. Il songeait à l’enfer quand la rumeur gonfla.
    Les musulmans arrivaient. L’horizon se teinta de fer et de
cuivre. Les mamelons se couvrirent d’une impressionnante épaisseur de turbans. Des
étendards brodés de lettres arabes et de croissants dansaient autour de Nur
al-Din dont l’habit d’or resplendissait.
    — Par saint Luc ! s’écria Renaud de Marash.
    Il en apparaissait sans cesse. Ils s’étendaient comme des
tumeurs. Leurs armes brandies en désordre palpitaient sous les rayons obliques
du matin. Ce corps bruyant et mouvant fut traversé de soubresauts quand les
trompettes turques retentirent.
    Jean et tous les chevaliers du prince d’Antioche ouvraient
de grands yeux. Ce n’était pas un mirage mais, bien réelle, une véritable armée
de métal ramifiée en lances, cimeterres et haches, qui recouvrait le sol à l’infini.
    Les trente-cinq mille Turcs se figèrent. Les trompettes
lancèrent un son plus aigu tandis que des cavaliers portant des fanions jaune
et bleu s’égaillaient dans la masse.
    Les chrétiens restèrent un moment sans comprendre ; ils
regardèrent se mouvoir à nouveau les Turcs, puis s’épouvantèrent en saisissant
le sens de la manœuvre. L’ennemi les encerclait dans l’intention de les
harceler avec des flèches. On attendit l’ordre de repli, mais Raymond se
taisait. Quand il coiffa le heaume allemand qui faisait de lui un être sans âme
et une machine à tuer, ils surent qu’il fallait vaincre ou mourir.
    Ils chargèrent et couchèrent plus de deux mille infidèles au
premier choc. Une demi-heure plus tard, environnés de toutes parts, ils firent
grand massacre avec leurs épées. Jean se battait avec rage. Il avait terrassé
tant d’ennemis qu’il crut la partie gagnée, mais il en venait toujours plus. À un
moment, il resta effaré et tremblant en se rendant compte qu’ils n’en
viendraient pas à bout.
    — Ta garde ! Ta garde ! Jean-foutre !
    Les hurlements de Raymond lui firent redresser son épée sur
laquelle vint s’embrocher un homme. Le prince passa, tel un tourbillon. Il
maniait une hache double. Il disparut dans une écume de sang.
    — Le prince est mort ! cria quelqu’un.
    Jean recula. Il vit sur sa gauche des chevaliers à la dérive,
assaillis par des essaims d’infidèles. L’armée chrétienne s’émiettait. On
apportait déjà des têtes à Nur al-Din. Il y eut un rugissement triomphal quand
celle de Raymond d’Antioche fut tranchée.
    — Sainte Marie mère de Dieu, balbutia Jean.
    Il n’avait pas envie de crever en terre païenne. Il n’avait
pas envie d’avoir la tête empaillée. Avec l’énergie du désespoir, il se creusa
un passage à coups d’épée. Une dépression s’ouvrait dans le désert. Elle était
pleine de morts. Pas un Turc n’y rôdait. Il s’y laissa tomber, abandonnant son
écu dans sa course. Il ignorait que l’ange de la mort l’épiait. Une flèche
quitta le bouquet poussiéreux de la bataille pour le frapper au milieu du dos.
    La brûlure se répandit en lui. Tout son passé, en un clin d’œil
évaporé, défila. Sa mère, ses frères, des visages d’autrefois, le sourire
édenté de son père, la Sainte-Baume rayonnante vers laquelle, être décharné, il
se dirigeait, des paysages et des villes disparurent de sa mémoire. À chaque
battement de cœur, le vide grandissait, grandissait, grandissait.
    Sa dernière image fut celle de deux femmes opposées en
posture de combat. Elles lui sourirent cruellement avant de croiser le fer.

22
    Deux, elles en avaient capturé deux… « Capturé »
était un mot mal adapté. Elles avaient été obligées de les tuer tant ils se
défendaient comme des diables. Aubeline, Bérarde et Inna revenaient avec les
têtes de leurs victimes. Auparavant la sorcière avait tenu à se rendre dans la
grotte des Dragons. Malgré les réticences des deux guerrières, elle

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