La Fin de Fausta
régente, avec qui elle eut un court entretien. Aussitôt après son départ, sans perdre une minute, Marie de Médicis se rendit près du roi. Et, sans préambule, sans le moindre détour, elle attaqua :
– J’apprends, Louis, que vous avez reçu, hier soir, la somme énorme de quatre millions. Au moment où le Trésor est complètement vide et où nous ne vivons que d’expédients, vous comprenez bien que vous ne pouvez demeurer en possession d’une somme pareille. Je vais vous envoyer Barbin, qui fera le nécessaire pour faire rentrer dans les coffres de l’Etat ces millions qui arrivent fort à propos, je vous assure.
Elle le tenait sous le feu de son regard. Et fort de son droit de régente, elle parlait sur un ton d’autorité qui n’admettait pas de discussion. On remarquera d’ailleurs, qu’elle n’interrogeait pas : n’ayant pas le moindre doute sur la valeur des renseignements que Fausta venait de lui donner, elle affirmait avec force.
Malheureusement pour elle, le roi avait été mis en garde par Valvert. La démarche ne le prit pas au dépourvu. Ses précautions étaient prises, sans doute, car il ne se troubla pas et mentit avec une assurance toute royale :
– Qui vous a fait ce beau conte, madame ? dit-il.
– Des gens bien informés. Si bien que je peux vous dire ceci : ces millions vous ont été apportés par le comte de Valvert. Ils sont renfermés dans quarante tonnelets. Et je peux indiquer le caveau dans lequel vous avez fait transporter ces tonnelets.
– Vraiment, madame ? Voulez-vous, s’il vous plaît, que nous allions visiter ensemble ce caveau que vous connaissez si bien ?
Il paraissait si tranquille, si sûr de lui, que Marie de Médicis se sentit ébranlée dans sa confiance. Mais Fausta avait été si formelle, avait donné des détails si précis, qu’elle se persuada que son fils payait d’audace et serait confondu si elle le prenait au mot.
– C’est précisément ce que je demande, dit-elle.
– Allons, fit simplement le roi, dont le regard pétillait.
Le caveau que la régente désigna fut ouvert. On y trouva bien les tonnelets proprement rangés. Seulement ces tonneaux contenaient de la poudre et non de l’or.
Marie de Médicis partit, dépitée, se demandant pourquoi Fausta lui avait fait faire cette démarche qui aboutissait à une déconvenue pareille. Pas un instant la pensée ne lui vint qu’elle avait été victime d’une mystification machinée à son intention.
Fausta ne s’y trompa pas. Elle comprit que Pardaillan avait prévu jusqu’à cette dernière manœuvre de sa part et qu’il avait pris ses précautions pour la faire échouer.
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Chapitre 27 LA MESAVENTURE DE LANDRY COQUENARD
P ardaillan s’était promis à lui-même de découvrir et de détruire les dépôts d’armes clandestins que Fausta avait dans la ville. Et nous savons que lorsque Pardaillan promettait quelque chose, à d’autres ou à lui-même, il tenait sa promesse.
Il ne doutait pas que cette maison, isolée au fond de cet infect boyau sans issue, que l’on appelait le cul-de-sac Barentin, dans laquelle, la veille, il avait vu entrer les Espagnols de Fausta, ne fût un de ces dépôts. Et si l’on s’en rapportait aux apparences, ces dépôts étaient aménagés comme des manières de petites forteresses dans lesquelles des troupes assez nombreuses pouvaient tenir garnison.
Mais comme il savait que Fausta était incapable de commettre la faute grave de laisser, pour l’instant, une garnison dans ces dépôts – ce qui eût inévitablement attiré l’attention sur eux –, il en avait conclu que les Espagnols entrés de nuit dans celui du cul-de-sac Barentin, en délogeraient discrètement, dès le lendemain, à la première heure.
Aussi, dès le lendemain, à la pointe du jour, Pardaillan rôdait rue de la Tisseranderie aux abords du cul-de-sac Barentin. Il était bien décidé à suivre les Espagnols partout où ils iraient. Et il était bien convaincu que, par eux, il arriverait à découvrir les autres dépôts. Rappelons que ces dépôts, d’après ce qu’en avait dit Fausta elle-même, étaient au nombre de quatre : un dans la ville, un dans la cité, un dans l’université, et le quatrième dans les environs de Paris. Pour ce qui est de ce dernier, Pardaillan, guidé par cet instinct particulier, qui était si remarquable chez lui, ne croyait pas se tromper en supposant qu’il devait se trouver dans le village de Montmartre.
Comme
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