La Fin de Fausta
Pardaillan suivait : il avait compris que, puisqu’il fermait la porte, c’est que leur besogne était achevée, c’est qu’ils allaient remonter probablement. Et il voulait être là pour entendre et voir, si c’était possible. Il arriva juste à point pour entendre Fausta qui, avec un soupir de soulagement qui en disait long sur l’appréhension secrète qui l’avait tenaillée jusque-là, disait :
– Maintenant, Pardaillan peut venir fouiller la grotte s’il veut !… Ferme cette porte, d’Albaran, et montons voir comment tu as arrangé la mine.
Et elle se dirigea vers l’escalier.
Nous avons dit que Pardaillan avait entendu. Il attendit quelques secondes et ouvrit. La cave était encore éclairée : il aperçut le dos du dernier des personnages qui montaient l’escalier. Il ferma vivement la porte, et à son tour il s’engagea doucement dans l’escalier. Il s’arrêta presque aussitôt : Fausta parlait. Et il entendit :
– C’est parfait ainsi.
Et tout de suite après, elle interrogea :
– Combien de temps la mèche durera-t-elle ?
– Cinq minutes environ, répondit d’Albaran.
– C’est toi qui dois l’allumer… Tu auras le temps de fuir jusqu’à la grotte ?
– Rassurez-vous, madame. J’aurai même le temps de sortir de la grotte… Vous pensez bien que je ne vais pas m’attarder en route.
– Le moment serait mal choisi ! dit en riant l’officier.
Il y eut un silence. Fausta reprit, sur un ton de commandement :
– Remontons, messieurs. Je veux vous donner mes dernières instructions avant de partir… Pousse la porte de ce caveau, d’Albaran… on ne sait pas ce qui peut arriver.
Un nouveau silence. Un bruit de pas s’éloignant.
Pardaillan monta à son tour, mit le pied dans la cave. Malgré lui. Il loucha du côté des petits caveaux. Ils étaient fermés. Rien de suspect ne permettait de supposer que l’un des caveaux recelait dans ses flancs une quantité formidable de poudre et de balles : de quoi semer l’incendie, la dévastation et la mort dans tout un quartier… si, par bonheur, la maison minée ne s’était trouvée isolée, loin de toute autre habitation, entre cette place, où ne passaient peut-être pas dix personnes dans la journée et ce chemin, plus solitaire encore, qui dévalait de l’autre côté de la montagne. Il passa devant les caveaux et, si brave qu’il fût, il ressentit à la nuque une sensation qui ressemblait fort à un frisson.
Il s’engagea dans le deuxième escalier. Il s’arrêta encore quand il entendit la voix de Fausta. Et Fausta disait :
– Messieurs, vous allez reprendre vos occupations de braves paysans. Vous vous tiendrez dehors, toujours près de la place que vous surveillerez. Vous connaissez M. de Pardaillan. S’il se présente, vous savez ce que vous devez lui répondre : le basse-courier, votre maître, est absent et ne rentrera que demain. Vous, vous n’êtes que ses aides, vous ne savez rien… Surtout, pas de mystère. Ouvrez la porte, engagez le visiteur à entrer, avant qu’il vous le demande. Faites ainsi que je dis et vous verrez que tout ira bien… Ce soir, à la tombée de la nuit, vous fermerez tout, ainsi que faisait le maître de la maison… Demain matin, à la première heure, vous ouvrirez tout… Un peu avant dix heures du matin, vous fermerez à double tour la porte du devant… Vous laisserez la clef dans la serrure. Vous fermerez également celle de derrière dont vous emporterez la clef… A dix heures, vous partirez… votre mission sera terminée. Allez, messieurs…
– Oserais-je, madame, présenter une observation ?
– Parlez.
– M. de Pardaillan m’a vu, le jour de mon arrivée… C’est lui qui m’a guidé jusqu’aux environs de l’Hôtel de Ville. Je crains que, malgré ce déguisement…
– Il vous reconnaîtra, n’en doutez pas !… M. de Pardaillan est doué d’une mémoire prodigieuse… Eh bien, vous éviterez de vous montrer… C’est vous, marquis, vous que M. de Pardaillan ne connaît pas, qui lui répondrez… Ou bien… Après tout, il n’est plus nécessaire que vous soyez deux… Vous resterez seul, marquis… Vous, comte, partez à l’instant, retournez à Paris, c’est ce qu’il y a de plus simple. Allez.
Un nouveau silence. Puis la voix de Fausta reprit :
– Nous n’avons plus rien à faire ici. Retournons à l’abbaye. Eclaire-moi, d’Albaran.
– Un instant, madame, je vous en prie, implora la
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