La Fin de Fausta
FLORENCE (fin)
P ardaillan descendit vivement. Il n’avait pas perdu un mot de cette édifiante conversation. Il en avait appris dix fois plus qu’il ne lui était nécessaire de savoir, pour qu’il ne s’attarde pas à suivre Fausta chez les religieuses, comme l’idée lui en était venue un instant. Il partit.
Vingt minutes plus tard, il retrouvait ses compagnons qui s’ennuyaient à mourir dans cette carrière où ils se tenaient aux aguets dans l’attente d’événements qui ne se produisaient pas. Escargasse et Landry Coquenard étaient là aussi ; ils avaient entendu une religieuse dire que M me la duchesse passerait la nuit au couvent ; ils avaient vu l’escorte partir et, selon les instructions reçues, ils étaient venus là. Quant à Valvert et à Gringaille, ils n’avaient vu personne.
Pardaillan les emmena tous et, vingt autres minutes plus tard, ils se trouvaient tous rassemblés dans la cuisine de cette ferme que Fausta venait de faire miner. Pardaillan alla jeter un coup d’œil à une fenêtre munie de solides barreaux : il n’oubliait pas l’Espagnol à qui Fausta avait donné le titre de marquis. Il le vit dans le pré, qui feignait de s’activer à de menus travaux. Cet homme le gênait pour ce qu’il voulait faire.
Il réfléchit une seconde. Il sourit : il avait trouvé. Il fit signe à ses compagnons de descendre. Lui-même descendit le dernier. Seulement, il avait pris la clef de la cave. Derrière lui, il ferma la porte à double tour, laissa la clef dans la serrure et descendit en se disant :
« Cet homme n’aura certainement pas l’idée de descendre dans cette cave, après la besogne qu’il y a faite… Je m’imagine même qu’il évitera autant que possible d’entrer dans la maison… et cela se conçoit quand la maison est un volcan qui peut faire éruption à tout instant… Si cependant la fantaisie lui prenait de descendre, il pensera, voyant la porte fermée et la clef disparue, que c’est sa maîtresse qui l’a voulu ainsi, et tout sera dit. »
Durant plusieurs heures, Pardaillan, Valvert, Landry Coquenard, Gringaille et Escargasse se livrèrent à nous ne savons quelle mystérieuse besogne.
Bien avant la tombée de la nuit, l’Espagnol qui, sans doute, avait à faire à Paris, avait tout fermé, ainsi que le lui avait recommandé sa maîtresse, et il était parti, emportant la clef de la porte du devant. Mais il avait laissé dans la serrure la clef de la porte de derrière.
Pardaillan, Valvert et leurs compagnons s’étaient trouvés maîtres de la place. Leur besogne achevée, ils n’étaient pas partis. Ils étaient tous revenus dans la cuisine. Pendant que Pardaillan et Valvert demeuraient à s’entretenir longuement, Landry Coquenard, Escargasse et Gringaille étaient partis. Tout simplement, ils étaient allés aux provisions. Et ils avaient soupé tous ensemble dans cette cuisine, comme s’ils avaient été chez eux.
Quand la nuit fut tout à fait venue, Pardaillan et Valvert descendirent ensemble dans les caves. Pardaillan ouvrit la porte du souterrain qui conduisait à l’intérieur du couvent, et, une lanterne à la main, suivi de Valvert, il s’engagea dans cet étroit couloir.
Près d’une heure plus tard, ils étaient de retour. Ils ramenaient avec eux la mère Perrine et la petite Loïse que Pardaillan portait dans ses bras. Pardaillan était déjà au mieux avec sa petite-fille. Il l’appelait Loïsette, Loïson. Elle l’appelait grand-père, tirait sa moustache grise de ses petits doigts d’enfant et l’embrassait à pleines lèvres. Seulement, elle demandait à chaque instant :
– Et maman Muguette ?
A quoi Pardaillan, avec une patience inaltérable, répondait invariablement :
– Tu la verras demain, ma mignonne.
Ils partirent. Pardaillan voulait emmener tout son monde au
Grand-Passe-Partout
où il était sûr que « l’enfant » trouverait un bon lit et serait gâtée et choyée en attendant d’être rendue enfin à son père et à sa mère, qui la pleuraient depuis si longtemps. Il va sans dire que Pardaillan portait dans ses bras la mignonne petite, qui dormait comme un ange sur sa large poitrine.
Ils s’étaient quelque peu attardés en effusions, en récits, en explications, et ils n’avaient pu marcher très vite, à cause de la mère Perrine qui n’aurait pu les suivre. En sorte qu’il était près de onze heures et demie lorsqu’ils arrivèrent à la porte Montmartre. La porte était
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