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La Fin de Pardaillan

Titel: La Fin de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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un ton très naturel qu’il se sentait souffrant. Et ce fut tout.
    Pendant ces deux jours il ne bougea pas de l’hôtel Sorrientès, où il prit ses repas et coucha. C’est-à-dire qu’il se mit à table, but beaucoup, mais toucha à peine, du bout des dents, aux mets appétissants qu’on lui servit ; il se promena d’un pas furieux dans son appartement, et quand, à la pointe du jour, il se sentit exténué, il se jeta tout habillé sur son lit et dormit une couple d’heures. Pendant ces deux jours, il évita soigneusement de rencontrer Muguette qui vint régulièrement, à son heure accoutumée, apporter ses fleurs à la duchesse.
    Et il arriva ceci, qu’il était incapable d’avoir prévu, attendu que, dans l’état où il était, il était incapable de raisonner : Muguette désira le voir, lui parler, d’autant plus ardemment qu’elle comprenait bien qu’il la fuyait.
    Le troisième jour, qui était un mercredi, il sortit au moment où il pensait que la jeune fille allait sortir elle-même. Depuis trois jours pleins qu’il réfléchissait sur ce qu’il allait faire, il avait pu prendre une résolution ferme. En effet, ce fut d’un pas très décidé qu’il alla se blottir dans un renfoncement près de l’hospice des Quinze-Vingts. Et il attendit.
    Muguette sortit. Elle était toute triste. Durant ces trois jours, elle n’avait cessé de penser à Valvert. Et Valvert demeurait toujours invisible pour elle. L’idée ne lui vint pas que le jeune homme souffrait et ne voulait pas laisser voir sa peine. Non, elle se dit qu’il s’était consolé… bien vite. Par une de ces contradictions bien féminines, elle, qui avait d’abord souhaité qu’il se consolât et l’oubliât, elle eut de la peine en voyant avec quelle rapidité son souhait s’était réalisé. Elle fut toute surprise et toute joyeuse de le voir tout à coup se dresser devant elle. Sa joie tomba toute, d’un seul coup, en voyant les ravages effrayants que ces trois jours avaient faits dans cette physionomie expressive. Et elle se sentit prise d’une immense pitié. Et pourtant, au fond, tout au fond d’elle-même, elle ne put pas réprimer un mouvement de joie secrète ; la joie de se sentir aimée à ce point. Cependant, malgré elle, elle eut un cri douloureux :
    – Ah ! mon Dieu !
    – Vous me trouvez bien changé, dit-il fiévreusement. Dieu merci, j’ai bien souffert… Au point que je me demande encore comment il se fait que je suis encore vivant. Vous ne comprenez pas ? Vous allez comprendre. Je vous ai suivie, dimanche. Oui, je vous ai suivie jusqu’à Fontenay-aux-Roses… J’ai entendu… J’ai vu… J’ai vu la petite Loïse.
    Elle devint toute blanche. Elle le considéra avec des yeux agrandis par l’épouvante : l’épouvante de ce qu’il devait penser, de ce qu’il allait dire et faire. Elle se raidit de toutes ses forces et, d’une voix qu’elle réussit à rendre ferme par un effort de volonté vraiment admirable :
    – Eh bien, vous savez, maintenant… vous savez que je n’ai pas menti en vous disant que je n’étais pas libre.
    – Vous ne m’avez pas dit toute la vérité, fit-il avec douceur.
    Et comme, emportée malgré elle, elle esquissait un geste de protestation :
    – Passons, reprit-il vivement, je ne vous ai pas arrêtée pour vous adresser des reproches. Je veux vous dire simplement ceci : j’ai vu la petite Loïse… Elle est adorable, cette enfant. Et je comprends que vous l’adoriez. Il faut un père à cette mignonne petite créature. Elle doit en avoir un, comme tout le monde. Mais ce père est-il vivant ou mort ? Vous devez savoir cela, vous…
    – Je n’en sais rien, dit-elle en fixant sur lui l’éclat lumineux de ses grands yeux.
    Il chancela. Il passa la main sur son front d’un air égaré. Et, avec une volubilité plus fiévreuse, il reprit :
    – Ecoutez-moi, voici ce que je peux vous proposer, pour vous et pour la petite innocente : si le père est vivant, nommez-le moi. J’irai le trouver, et je vous jure qu’il faudra qu’il vous épouse.
    D’avoir pu inspirer un tel amour qui allait jusqu’à un tel sacrifice de soi-même, elle se sentit heureuse et fière au-delà de toute expression. Et elle eut toutes les peines du monde à se contenir, à refouler le cri d’ardente gratitude et d’admiration aussi qui montait à ses lèvres. Mais le regard très pur qu’elle fixait sur lui parlait un langage si clair que tout autre que

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