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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
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b‚tons dans les roues ? ª
    Jack Twist détenait des jeux très complets de fausses pièces d'identité-permis de conduire, passe-ports, extraits de naissance, cartes de crédit, cartes de bibliothèques, etc. Il utilisait régulièrement huit faux noms, dont celui de Thornton B. Wainwright, et prenait toujours un pseudonyme quand il préparait un coup.
    C'est pourtant de la façon la plus anonyme qu'il oeuvra en ce dimanche après-midi, distribuant plus de cent mille dollars à divers individus de Manhattan. Le plus gros don, de quinze mille dollars, fut celui que reçurent un jeune marin et sa fiancée d'un jour, dont la Plymouth toute rafistolée avait finalement rendu l'‚me vers Central Park, non loin de la statue de Simon Bolivar. Áchetez-vous-en une nouvelle, dit Jack en lui mettant une poignée de billets dans son bob. Et n'allez surtout pas dire d'o˘ vous vient cet argent, le fisc vous tomberait sur le dos et vous tondrait encore plus que vous ne l'êtes. Ce n'est pas la peine de me remercier, amusez-vous bien tous les deux, c'est tout. ª
    En moins d'une heure, Jack se débarrassa de la somme prise dans le placard de sa chambre. Comme il avait tout son temps, il acheta une gerbe de roses corail et se rendit en voiture à Westchester, à une heure de là, pour fleurir la tombe dans laquelle Jenny reposait depuis plus de deux semaines.
    Il n'avait pas voulu qu'elle repos‚t dans l'un des sinistres cimetières encombrés de la ville. C'était peut-
    être sentimental, mais il avait voulu pour elle la campagne, de longues pentes gazonnées, l'ombre des arbres en été, la vue des cimes enneigées en hiver.
    Jack arriva un peu avant le crépuscule, et se rendit directement à la tombe de Jenny, bien qu'elle ne se distingu‚t pratiquement pas des autres, en particulier à
    cause de la neige. Tandis qu'à un jour gris‚tre succé-dait une pénombre sinistre sur laquelle seule tranchait la couleur des roses, Jack s'assit dans la neige, ignorant le froid et l'humidité, et parla à Jenny comme il l'avait fait pendant toutes les années o˘ elle était res-

    tée plongée dans le coma. Il lui parla de l'attaque du fourgon, de l'argent qu'il avait ensuite distribué. Aux rideaux de fumée du crépuscule succédèrent les dra-peries plus lourdes de la nuit; le gardien fit le tour des allées dans son véhicule électrique, avertissant de la fermeture prochaine des portes. Finalement, Jack se leva et jeta un dernier regard au nom de Jenny, coulé en bronze dans la pierre tombale et qu'éclairait vaguement le lampadaire de l'allée principale du parc.
    ´ Je change, Jenny, et je ne sais pas trop pourquoi. Je me sens mieux, mais bizarre, aussi. ª Il comprit tout à coup que son nouveau sentiment de culpabilité et la fin de la haine de la société qui l'avait accompagné
    n'étaient que les premières étapes d'un grand voyage qui devait le conduire en des lieux qu'il n'arrivait pas à imaginer: Íl va se passer quelque chose de très important, Jenny. Je ne sais pas quoi, mais quelque chose de capital va m'arriver. Oh, Jenny, j'aurais tellement aimé que tu sois avec moi... ª
    Le ciel bleu du Nevada se couvrait de nuages d'orage depuis qu'Ernie, Dom et Ned avaient entrepris de remplacer les vitres brisées par du contre-plaqué. quelques heures plus tard, quand Dom prit sa voiture de louage pour aller chercher Ginger Weiss à l'aéroport d'Elko, une lumière fantomatique projetait sur le monde un éclairage gris‚tre.
    Dom était trop impatient pour attendre dans la petite aérogare. Il préféra arpenter le tarmac, bien au chaud dans son blouson fourré.
    L'avion s'immobilisa à une trentaine de mètres des b‚timents et Ginger fut la quatrième à descendre. Les vêtements douillets et volumineux qu'elle portait n'enlevaient rien à sa gr‚ce naturelle. Le vent faisait virevolter ses cheveux blonds.
    Dom courut vers elle et Ginger s'arrêta pour poser ses sacs. Ils hésitèrent, se regardant longuement sans rien dire, dans un surprenant mélange d'émerveillement, de plaisir et d'appréhension. Puis ils se jetèrent dans les bras l'un de l'autre comme de vieux amis à
    l'instant de leurs retrouvailles. Leurs deux coeurs bat-taient avec la même force.
    Seigneur, mais qu'est-ce qui nous arrive ? se demanda Corvaisis.

    Dans la voiture arrêtée, alors que le moteur tournait et que la ventilation leur soufflait de l'air chaud au visage, Ginger dit: ´ qu'est-ce qui nous a pris ? ª
    Toujours tremblant,

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