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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
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Francine et Rachel, accoudées à la table de la cuisine, parlant bas avec des claquements de langue: ´ Mais en quoi Jacob et Anna se sont-ils trompés ? L'ont-ils trop poussée ? Anna l'a toujours trop poussée. Et après la mort d'Anna, Jacob s'est trop reposé sur la petite. Elle n'avait que douze ans quand elle a pris la maison en charge. C'était trop pour elle. Trop de pression pour quelqu'un de son ‚ge. ª Ginger aurait certes droit à
    beaucoup de compassion, de compréhension et d'amour de leur part, mais avec le risque d'entacher la mémoire de ses parents, une mémoire qu'elle était bien déterminée à honorer jusqu'à la fin de ses jours.
    Levant les yeux sur George qui, toujours assis sur le bord du lit, attendait sa réponse avec une évidente inquiétude qui la toucha beaucoup, elle dit: ´ D'accord pour la chambre d'ami avec vue sur la baie.
    - Formidable !
    -Vous ne savez pas ce que vous risquez, dit Ginger.
    Si l'endroit me plaît, je peux très bien appeler un peintre pour qu'il retapisse la chambre à mon go˚t.
    - Le jour o˘ je vois arriver un peintre, je vous flan-que à la rue ! ª
    George éclata de rire et l'embrassa doucement sur la joue. ´ Je vais m'occuper des formalités de sortie pour que vous puissiez partir dans deux heures. Je vais aussi appeler Rita pour qu'elle vienne vous prendre.
    Ginger, je suis persuadé que vous pourrez surmonter cette épreuve. Mais de gr‚ce, pas d'idées noires. ª
    quand il eut quitté la pièce et que le bruit de ses pas eut disparu dans le couloir, elle arrêta de se forcer à sourire, et son visage s'éteignit instantanément, Elle s'enfonça dans les oreillers, le regard perdu, morose, sur les dalles d'isolation acoustique du plafond, jaunies par le temps.
    Au bout d'un moment elle se leva, se rendit dans la salle de bains voisine et s'approcha du lavabo, non sans une certaine appréhension. Après un instant d'hésitation, elle fit couler l'eau et la regarda longuement tourbillonner avant de disparaître par l'évacuation. Lundi dernier, près du lavabo de la salle d'opération, après avoir réussi sa première greffe d'aorte elle avait été saisie de panique à la vue du tourbilion de l'eau s'enfonçant dans le trou, mais elle n'arrivait pas à comprendre pour quelles raisons.
    Mais bon sang, pourquoi ? Elle voulait désespérément savoir pourquoi.
    Papa, pensa-t-elle, si seulement tu étais vivant, tu m'écouterais, tu m'aiderais.
    Les pénibles surprises que réserve la vie avaient fait l'objet de l'un de ses dictons, un dicton qu'elle avait autrefois trouvé amusant. Lorsque quelqu'un s'inquiétait de l'avenir, Jacob secouait la tête, clignait de l'oeil et disait: ´ Pourquoi s'en faire pour demain ? qui sait ce qui peut nous arriver rien qu'aujourd'hui ? ª
    Comme c'était vrai. Mais aujourd'hui, cela n'avait plus rien de drôle. Absolument plus rien.
    Elle se sentait comme une invalide.
    Elle se sentait perdue.
    C'était le vendredi 6 décembre.
    Laguna Beach, Californie quand Dom, accompagné de Parker Faine, était retourné voir son médecin, le lundi 2 décembre au matin, le Dr Cobletz n'avait pas voulu faire procéder à de nouveaux examens. Dom ne présentait aucun signe de désordre physique. Il expliqua aux deux hommes qu'il y avait d'autres types de traitements à tenter avant de conclure à une lésion cérébrale qui pousse-rait l'écrivain à se barricader la nuit contre un ennemi invisible.
    Suite à la précédente visite de Dom, le 23 novembre, le médecin s'était intéressé de plus près au somnambulisme et avait lu un certain nombre d'articles sur le sujet. Ce trouble était de courte durée chez le sujet adulte; cependant, dans quelques cas assez rares, il pouvait devenir chronique et aller jusqu'à ressembler aux pires névroses. Une fois installé de manière permanente, le somnambulisme était bien plus difficile à
    guérir et pouvait devenir le facteur dominant de la vie de l'individu, générant en lui la crainte de la nuit et du sommeil et suscitant un sentiment d'impuissance débouchant parfois sur des désordres émotionnels plus graves encore.
    Dom se sentait dans la zone limite. Il revoyait la barricade qu'il avait construite, l'arsenal déposé sur le lit.
    Intrigué mais pas vraiment inquiet, Cobletz avait dit que la pratique de l'errance nocturne pouvait être brisée par l'administration d'un sédatif. Le patient gué-rissait habituellement dès qu'il pouvait passer plusieurs nuits tranquilles. Dans

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