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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
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cafés-concerts avant et après la Première Guerre. Mon père était musicien, comme l'a dit le Globe. Et il est exact que mes parents ont connu Picasso et ont très tôt cru en son génie. Ils m'ont d'ailleurs donné son prénom. Ils lui ont acheté deux dizaines de toiles à l'époque o˘
    elles étaient bon marché, et il leur en a fait cadeau de plusieurs. C'étaient des gens de go˚t. Ils ne possédaient pas une centaine d'oeuvres, comme l'a dit le journal, mais cinquante. Cette collection était néanmoins encombrante, pour des gens qui n'étaient pas riches. En la vendant peu à peu, avec les années ils ont pu améliorer leur retraite et me laisser aussi quelque chose.
    - Vous avez bien été illusionniste ?
    -Pendant plus de cinquante ans. ª Il eut un geste de la main si élégant que Ginger n'aurait pas été étonnée de le voir faire surgir quelque colombe. ´ J'étais très célèbre, peut-être même le meilleur. Pas ici, bien s˚r, mais en Europe, oui.
    -Au cours de votre numéro, vous hypnotisiez des membres de l'assistance ?

    -Oui, cela impressionne toujours.
    - Et maintenant, vous rendez service à la police en hypnotisant les témoins de crimes pour qu'ils se souviennent de détails fondamentaux ?
    -On n'est venu me trouver que quatre fois au cours de ces dernières années, admit-il. Disons que je suis leur dernière chance.
    - Vous les avez effectivement aidés ?
    - Oui. Le journal est très précis sur ce point. Par exemple, un passant assiste à un crime et voit le tueur s'enfuir en voiture, mais il ne peut se rappeler le numéro d'immatriculation. Pourtant, il suffit qu'il l'ait entrevu un dixième de seconde pour que ce numéro s'inscrive dans son inconscient. Nous n'oublions jamais vraiment ce que nous voyons. Jamais. Si un hypnotiseur endort le sujet et le fait reculer dans le temps pour qu'il revive l'assassinat et regarde bien la voiture, il dira le numéro de la plaque d'immatriculation.
    - Toujours ?
    - Pas toujours, mais il y a plus de succès que d'échecs.
    -Je ne comprends pas pourquoi on fait appel à
    vous. Les psychiatres de la police pourraient employer l'hypnose, non ?
    -Certainement, mais ce sont des psychiatres, pas des hypnotiseurs. L'hypnose n'est pas leur spécialité.
    Moi, je l'ai étudiée toute ma vie, j'ai développé mes propres techniques et j'ai souvent réussi là o˘ les méthodes classiques échouent.
    -Vous êtes donc un expert ?
    -Oui, mais en quoi tout cela vous intéresse-t-il, docteur ? ª
    Ginger serrait son sac à main contre elle. Elle prit une profonde inspiration et raconta tout à Pablo Jackson. quand elle eut achevé son récit, les articulations de ses doigts étaient blanches de crispation.
    Le visage de Jackson passa par la surprise, l'intérêt puis l'inquiétude.
    ´ Pauvre enfant ! s'écria-t-il. Mais c'est horrible !
    Attendez-moi là un instant. ª
    Il s'absenta quelques secondes et revint avec deux verres de cognac. Elle voulut refuser le sien. ´ Merci, monsieur Jackson, je ne bois pas souvent, et certainement pas à cette heure de la matinée.
    -Appelez-moi Pablo. Combien d'heures avez-vous dormi cette nuit ? Pas beaucoup, hein ? De sorte que, pour vous, ce n'est déjà plus le matin, mais l'après-midi. Et pourquoi refuser un verre l'après-midi ? ª
    Ils burent leur cognac en silence.
    ´ Pablo, je veux que vous m'hypnotisiez, je veux revenir à cette matinée du 12 novembre o˘ je me suis rendue à la charcuterie Bernstein. Je veux que vous me questionniez sans arrêt jusqu'à ce que je sois capable de dire pourquoi ces gants noirs m'ont tant fait peur.
    -Impossible, fit-il en secouant la tête, non, non.
    -Je vous donnerai ce que...
    - L'argent ne m'intéresse pas. Je suis magicien, pas psychiatre.
    -J'ai déjà vu un psychiatre, le Dr Gudhausen, j'ai abordé le sujet avec lui, mais il a refusé.
    - Il devait avoir ses raisons.
    - Il dit qu'il est encore trop tôt pour opérer une régression. Il reconnaît que cette technique thérapeutique pourrait m'aider à découvrir l'origine de mes crises, mais que je ne suis peut-être pas prête à affronter la vérité. Il dit qu'une confrontation prématurée avec la source de mes angoisses pourrait déboucher sur...
    une dépression totale.
    -Vous voyez ? Il sait cela mieux que moi. Je ne veux pas m'interposer.
    - Il ne sait pas mieux ! protesta Ginger, encore en colère au souvenir précis de sa dernière conversation avec le psychiatre, au cours de laquelle il s'était montré fort

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