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La fuite du temps

La fuite du temps

Titel: La fuite du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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frappa à la porte et entendit Laurent Pronovost l'inviter à
entrer.
     
    — Vous voulez me
voir, monsieur? — Fermez la porte, mademoiselle, et assoyez-vous, lui
ordonna-t-il en repoussant ses lunettes sur son nez.
     
    Carole lui obéit
et prit place sur la chaise placée devant le bureau en acajou de son patron.
     
    — Depuis combien
d'années êtes-vous avec nous? lui demanda-t-il d'entrée de jeu.
     
    — Quatre ans,
monsieur.
     
    — Vous êtes donc
la secrétaire du pool qui a le moins d'ancienneté, si je me trompe pas.
     
    — Oui, monsieur,
répondit Carole, qui ne savait absolument pas où l'homme voulait en venir.
     
    301
    — Vous êtes pas
sans savoir qu'on vit une période difficile, mademoiselle Morin.
     
    Carole se
contenta de hocher la tête.
     
    — Les grands
patrons de Toronto trouvent que les affaires vont pas bien et ils ont décidé de
couper dans le personnel, à Toronto, comme à Montréal.
     
    Le coeur de la jeune
fille eut un raté en entendant ces paroles.
     
    — Ils ont décidé
de couper dans tous les départements, dans les pools de secrétaires comme
ailleurs. Comme vous êtes la moins ancienne, je pourrai malheureusement pas
vous garder.
     
    — C'est pas vrai!
s'exclama Carole dans un souffle.
     
    — Bien oui,
mademoiselle. Si ça ne dépendait que de moi, je vous garderais. J'ai rien à
vous reprocher, mais je dois y aller avec la liste d'ancienneté. Si ça peut
vous consoler, vous êtes pas la seule à partir. Votre collègue, mademoiselle
Gervais, perd aussi son emploi.
     
    — J'en reviens
pas, avoua Carole, les larmes aux yeux.
     
    — C'est des
choses qui arrivent dans la vie, fit son patron avec une compassion assez
inattendue chez un homme aussi froid. Ne vous en faites pas trop. Le service du
personnel va vous remettre une bonne lettre de recommandation et vous allez
vous trouver un emploi très facilement.
     
    Sur ce, Laurent
Pronovost se leva pour signifier la fin de l'entrevue et il lui tendit la main.
     
    — Bonne chance, mademoiselle.
Même s'il est pas encore cinq heures, vous pouvez prendre vos affaires et
passer immédiatement au bureau du personnel. Voulez-
    vous demander à
mademoiselle Gervais de venir me voir? — Oui, monsieur. Merci, monsieur,
balbutia Carole avant de quitter le bureau.
     
    302
    À sa sortie de la
pièce, plusieurs têtes se levèrent pour la regarder. Elle fit un effort
considérable pour adopter une expression neutre en se dirigeant vers son poste
de travail. Au passage, elle dit à Valérie Gervais: — Valérie, va voir le boss.
Il veut te parler.
     
    Elle n'ajouta
rien. Elle s'assit derrière son bureau et se mit en devoir de retirer des
tiroirs ses effets personnels qu'elle laissa tomber pêle-mêle dans un sac. Elle
n'accorda pas un seul regard à l'une ou l'autre de ses compagnes de travail,
intriguées par son comportement. Valérie était la seule camarade avec qui elle
entretenait des relations personnelles, et elle venait d'entrer à son tour dans
le bureau du patron.
     
    Lorsqu'elle eut
fini de ramasser ses affaires, elle se dirigea vers le bureau de Germaine
Longpré, la salua au passage et quitta le département. Elle monta à l'étage
supérieur où était installé le service du personnel. La responsable de
l'endroit lui remit sa dernière paye et une lettre de recommandation avant de
lui souhaiter, elle aussi, bonne chance. Au moment de sortir de la pièce, elle
ne parvenait pas encore à réaliser ce qui lui arrivait tant tout était survenu
de façon soudaine. En quelques minutes, on venait de bouleverser sa vie... comme
si elle n'en avait pas déjà assez à supporter.
     
    Lorsqu'elle
franchit la porte de l'édifice où elle avait travaillé durant les quatre
dernières années, elle ne remarqua même pas la chaleur humide qui lui tomba
dessus comme une chape de plomb. Elle fit quelques pas dans le soleil
éblouissant de cette fin de vendredi après-midi d'août, incapable de se décider
à rentrer chez elle ou à attendre Valérie.
     
    Cependant, la
seule pensée que cette dernière allait probablement être aussi démoralisée
qu'elle par la perte de son emploi lui enleva toute envie de l'attendre. Comme
    303
     
    une automate, la
jeune femme couvrit la courte distance qui la séparait de l'arrêt d'autobus et
se mit à fixer d'un regard absent les véhicules qui passaient devant elle sur
le boulevard Dorchester. Elle ne chercha même pas à voir si un autobus
approchait.
     
    Le visage figé

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