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La grande guerre chimique : 1914-1918

La grande guerre chimique : 1914-1918

Titel: La grande guerre chimique : 1914-1918 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Olivier Lepick
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3 h 30 dans la nuit du 23 au 24 juillet
à l’aide des nouveaux obus chimiques. Le pilonnage cessa et à 6 heures, le
commandant de la batterie, jugeant que l’air était désormais sain, autorisa ses
hommes à ôter leurs masques respiratoires. Quelques minutes plus tard, un grand
nombre d’hommes dont le commandant durent être évacués, victimes du gaz. » [578] Le sulfure d’éthyle
dichloré était d’autant plus pernicieux que, à l’instar du phosgène, il
produisait son action avec un certain retard, si bien qu’un fantassin ne
pouvait pas cerner avec précision l’étendue de ses blessures et, par ignorance,
négligeait donc les effets d’une exposition mortelle. Un détail
particulièrement frappant et souvent évoqué par les vétérans qu’il m’a été
donné d’interroger [579] concerne les difficultés et surtout les dangers à assouvir ses besoins naturels
dans un environnement contaminé par le gaz moutarde. Cet exercice était souvent
à l’origine de brûlures très douloureuses des parties génitales et de l’anus.
    De nouveaux bombardements au gaz moutarde eurent lieu dans
la région d’Ypres au cours des journées des 16 et 17 juillet. Puis dans la
nuit du 20 au 21 juillet près de Boesinghe [580] , ainsi que la
semaine suivante [581] ,
les Allemands pilonnèrent des secteurs plus calmes du front, notamment près d’Armentières.
Le 23, le GQG français fit savoir à l’IEEC qu’une attaque analogue venait de se
produire sur les troupes françaises près de Nieuport [582] . Du 31 juillet
au 20 août, les Allemands tirèrent toutes les nuits des obus croix jaune et croix verte sur le front de Verdun. La zone bombardée avait une
largeur d’environ 30 km sur une profondeur de 3 à 5 km. Il fallut
évacuer 6 965 fantassins français. Par la suite la fréquence des
pilonnages au gaz moutarde diminua. En raison de difficultés d’approvisionnement,
les Allemands l’utilisèrent de manière plus parcimonieuse jusqu’à la fin de l’année.
    Dès le surlendemain de l’attaque allemande, des obus non
explosés marqués d’une croix jaune furent découverts par des soldats britanniques.
Ces projectiles furent immédiatement désamorcés et expédiés au GHQ. La
substance qu’ils contenaient fut confiée au P r  Mouat Jones. Le
16 juillet, le sulfure d’éthyle dichloré fut identifié et ses propriétés
décrites aux autorités militaires. Le choc fut rude. On ne disposait en effet à
cette date d’aucun moyen efficace pour protéger les hommes contre l’innovation
allemande. Une sourde inquiétude, révélée par le contrôle postal, s’empara des
soldats alliés : « As-tu entendu parler des nouveaux gaz boches ?
On sent une odeur délicieuse pendant quelques instants, on n’y pense plus, le
lendemain le corps se couvre de boursouflures, douleurs atroces, puis mort. » [583] Curieusement,
les autorités militaires françaises ne furent averties de l’utilisation d’un
nouveau gaz par les Allemands que le 22 juillet par le capitaine Douglas,
conseiller physiologique au GHQ. Le lendemain, le D r  Flandin
fut dépêché sur le front anglais, avec l’ordre d’examiner sur place les effets
produits et de rapporter, si possible, des obus non éclatés. Il fut de retour
le 26 juillet avec un obus croix jaune de 77 mm non
ouvert et quelques centaines de grammes de liquide recueillies dans un flacon.
Le projectile fut immédiatement remis au laboratoire municipal de Paris du P r  Kling
et le reste de la substance fut réparti entre les laboratoires Simon, Grignard
et Mayer. Le 31 juillet, le P r  Kling avait identifié le
nouveau toxique allemand. Une première note aux Armées fut distribuée à partir
du 2 août. Si elle ne précisait pas la nature exacte du nouveau gaz
allemand, elle en décrivait précisément les propriétés insidieuses.
    Grâce aux compétences et à la célérité du capitaine Douglas,
une première directive fut distribuée aux fantassins britanniques deux jours
après le premier bombardement allemand et avant même que le vésicant fût
formellement identifié par les chimistes alliés. Cela fut d’autant plus
précieux que les Allemands n’avaient pas véritablement réalisé l’ampleur du
succès obtenu grâce à leur nouveau gaz. La rapidité et la qualité des
directives émises par le capitaine Douglas permirent non seulement de
maintenir un semblant d’ordre au sein des lignes britanniques mais également

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