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La grande guerre chimique : 1914-1918

La grande guerre chimique : 1914-1918

Titel: La grande guerre chimique : 1914-1918 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Olivier Lepick
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Hindenburg pour tirer leurs premiers obus
emplis de sulfure d’éthyle dichloré [608] .
    Signalons également, pour l’anecdote, que dans la nuit du 23
au 24 octobre 1917 [609] , le 16 e  régiment
de réserve de l’infanterie bavaroise fut pris sous le feu des obus à l’ypérite
de l’artillerie britannique près de Wervick. Un jeune caporal bavarois en fait
le récit suivant : « Sur une colline au sud de Wervick, nous nous
trouvâmes pris dès le soir du 23 octobre, durant de longues heures, sous
un feu roulant d’obus à gaz. Cela continua toute la nuit avec une plus ou moins
grande intensité. Vers minuit, une partie d’entre nous fut évacuée, parmi eux
quelques-uns disparurent pour toujours. Vers le matin, la douleur s’empara de
moi, augmentant de quart d’heure en quart d’heure, et, à sept heures du matin,
je revins en trébuchant et en chancelant vers l’arrière, les yeux en feu,
emportant avec moi ma dernière affectation de la guerre. Quelques heures plus
tard, mes yeux se changèrent en charbons ardents, et les ténèbres se firent
autour de moi. » [610] Ce jeune caporal
se nommait Adolf Hitler. Selon ses affirmations, il demeura aveugle plusieurs
jours. Cette expérience douloureuse fut, selon quelques historiens, l’une des
raisons qui motiva la décision du Führer du III e  Reich de ne
pas utiliser, en 1940, les armes chimiques que la Wehrmacht possédait pourtant
en quantités impressionnantes [611] .
    L’ypérite fut, sans doute aucun, la réussite la plus
éclatante des chimistes allemands. Ses propriétés infernales, son caractère
insidieux en firent le vecteur absolu de la guerre d’usure faisant monter d’un
cran encore dans l’horreur, si tant est que cela fut possible, la condition du
combattant. Cette substance semblait incarner le carnage et les conditions des
terribles combats de la Grande Guerre. Pendant près de onze mois, entre le mois
de juillet 1917, date de l’introduction de l’ypérite sur le champ de
bataille, et le mois de juin 1918, lorsque les Français furent en mesure
de répliquer à cette initiative, les Allemands disposèrent d’un avantage
tactique déterminant. Ils ne furent pas à même de l’exploiter de manière décisive.
De fait, en raison même de ses propriétés, l’ypérite fut plus le gaz de l’usure
et de l’épuisement que le gaz de l’offensive.
À armes nouvelles, tactiques nouvelles
    L’utilisation extensive de l’arme chimique constituait, d’un
point de vue tactique, une complète nouveauté. Jamais les écoles de guerre n’avaient,
avant le début du conflit, dispensé d’enseignements sur cette forme de combat.
Seule l’expérience acquise sur le front permit d’établir, d’abord de manière
rudimentaire puis, au fil des combats, de plus en plus subtilement, les
principes tactiques régissant la guerre des gaz. L’empirisme qui caractérisa l’établissement
des doctrines chimiques fut à l’origine de quelques erreurs d’appréciation mais
déboucha, lors des derniers mois de la guerre, sur des conclusions que les
spécialistes de la guerre chimique de la fin duXX e  siècle
considèrent toujours comme valides.
L’arme chimique et la guerre immobile
    Entre l’automne 1914 et le printemps 1918, les
hostilités prirent la forme d’une guerre de tranchées, immobile et meurtrière.
En utilisant le chlore à Ypres, les Allemands tentèrent de rompre cet engrenage
qui avait mené à une guerre statique. Les années qui suivirent la tentative de
Langemarck virent de vains essais pour reconquérir le mouvement de sorte que
les objectifs de la guerre chimique dégénérèrent pour devenir non pas une
tentative de rupture du front adverse, mais une volonté d’usure et de
harcèlement de l’ennemi. De fait, une fois admis le fait que l’arme chimique ne
pouvait permettre, à elle seule, de remporter la guerre, les belligérants s’accordèrent
à reconnaître deux vertus tactiques majeures aux gaz : d’une part
provoquer des pertes importantes à l’adversaire et, d’autre part, d’une manière
plus générale, altérer la capacité au combat de l’ennemi [612] . Une troisième
fut progressivement mais plus confusément admise : l’influence des gaz sur
le moral de l’adversaire. Dans les conditions de la guerre des tranchées, l’intérêt
militaire des gaz résidait plus dans leurs capacités d’attrition que dans leurs
qualités offensives. Comme le soulignait Foulkes, « la

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