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La grande guerre chimique : 1914-1918

La grande guerre chimique : 1914-1918

Titel: La grande guerre chimique : 1914-1918 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Olivier Lepick
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précision
les principales pathologies et donc les causes des blessures (mortelles ou non)
causées à leurs hommes. Cette tâche se révéla difficile à réaliser dans les
conditions épouvantables qui caractérisèrent la guerre de tranchées. De plus,
la dénomination « gazé » n’apparut que tardivement dans les grilles
statistiques recensant les victimes du conflit : à la fin de l’été 1915
dans l’armée britannique, en janvier 1916 pour l’armée allemande, et de
manière étonnamment tardive et malgré les demandes répétées de Joffre, en
janvier 1918 dans les forces françaises [777] .
    Plus grave encore, une grande partie des statistiques
publiées par les belligérants dans l’immédiat après-guerre furent, pour des
raisons obscures, volontairement faussées. Les statistiques officielles
allemandes, et il ne s’agit là que d’un exemple parmi d’autres, indiquent que
les attaques alliées par nappe dérivante provoquèrent 4 926 blessés
et 448 morts [778] .
Au nombre de ces victimes sont également portées les pertes allemandes lors des
opérations allemandes par nuées, à savoir 1 700 blessés et 425 morts
victimes de leur propre gaz [779] . Une fois ces victimes
soustraites au total, il conviendrait donc de conclure que les attaques alliées
par nappe dérivante entre 1915 et 1918 ont causé la mort de 23 soldats
allemands. On mesure bien ici le peu de crédit que l’on peut accorder à
certaines statistiques, et la prudence qu’il faut conserver dans leur
exploitation.

    Les sources les plus fiables concernent sans aucun doute l’armée
britannique [780] et le CEA [781] ainsi que, dans une moindre mesure, la France [782] et l’Allemagne [783] .
Elles permettent de dresser le bilan ci-dessus, qui, il faut le rappeler, n’est
qu’une estimation.
    Dans la mesure où les pertes allemandes causées par les gaz
sur le front russe peuvent être évaluées à environ 2 500 hommes, le
bilan humain des hostilités chimiques sur le front occidental s’élève donc à 496 200 hommes
soit environ 3 % du nombre total des victimes de la Grande Guerre sur ce
front. Si l’on excepte le cas du cea, on constate que dans les armées
allemandes, françaises et britanniques, près de 70 % des victimes des gaz
furent atteintes lors des onze derniers mois de la guerre. C’est
particulièrement vrai de l’armée française, qui essuya 80 % des pertes
totales causées par les gaz au cours de la seule année 1918. Cela s’explique
par l’intensification, déjà évoquée, de la guerre chimique au cours des vingt
derniers mois mais surtout par l’apparition de l’ypérite, dont les propriétés
infernales permirent d’infliger de nombreuses blessures.
    Pour le reste des belligérants, à savoir la Russie, l’Autriche-Hongrie
et l’Italie, il semble bien téméraire de s’engager dans des évaluations
précises tant les sources restent parcellaires. À la lumière des sources que j’ai
consultées, je considère que toute évaluation des pertes russes est illusoire
ou fantaisiste. Certains auteurs se sont essayés à cet art que je ne prise
guère. Augustin Prentiss évalue, sans évoquer l’origine de son estimation, les
victimes russes à 475 000. Si l’ordre de grandeur paraît plausible, aucune
source ouverte ne confirme ou n’infirme cette conclusion ; aussi paraît-il
plus sage de s’abstenir de toute digression sur ce sujet dans l’attente de la
mise à jour de sources plus convaincantes. En ce qui concerne les victimes
italiennes et austro-hongroises des gaz, leur nombre fut relativement restreint :
entre 8 000 et 12 000 pour l’Italie, et moins de 4 500 pour l’Empire
austro-hongrois.
    Si l’on veut retenir un bilan global, et plutôt que d’avancer
des chiffres bruts dont la fiabilité est relative, il semble plus sage de
retenir une estimation sous la forme d’une fourchette. Selon que l’on retienne
200 000 ou 500 000 victimes au sein de l’armée russe, il est
probable que la guerre chimique ait fait entre 710 000 et 1 000 000 de
victimes, soit entre 2,3 et 3,2 % du nombre total des victimes militaires
de la Grande Guerre.
    La détermination précise du nombre de décès causés par les
gaz est plus délicate encore. Jusqu’à présent, ce chiffre a été largement
surévalué. Ainsi, Prentiss évalue les victimes mortellement atteintes par les
gaz à 91 198. Si les évaluations des pertes allemandes, françaises et
britanniques

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