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La grande guerre chimique : 1914-1918

La grande guerre chimique : 1914-1918

Titel: La grande guerre chimique : 1914-1918 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Olivier Lepick
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monde à cette date pouvaient permettre
la fabrication, en quantité suffisante, de substances chimiques nocives. En
outre, il existait en Allemagne un véritable lobby de la chimie. Ce
groupe de pression était d’autant plus puissant qu’il était écouté des plus
hautes autorités militaires. Ceci explique en partie le fait que l’Allemagne se
soit lancée dès avant août 1914 dans la recherche et l’expérimentation
dans le domaine des armes chimiques. Cependant, les tests effectués ne s’avérèrent
pas concluants [151] aux dires du major Max Bauer, qui était chargé de les superviser. Il semble
que la décision du haut état-major allemand (Oberste Heeresleitung ou OHL) de
reprendre les recherches coïncida avec la défaite de la Marne et le
remplacement de von Moltke par Falkenhayn [152] . Avant cette
date, et toujours selon Max Bauer, la recherche allemande restait limitée et
nul n’envisageait véritablement l’utilisation massive de substances chimiques
dans le cadre d’opérations militaires [153] .
    Sur ordre personnel du nouveau chef d’état-major, le major Bauer [154] fut donc chargé, dans la seconde moitié du mois de septembre, de réunir au
centre d’essai de l’artillerie à Wahn, près de Cologne, une cellule
scientifique (sous la direction du P r  Walther Nernst de l’université
de Berlin) ayant pour mission « de développer un obus chimique qui
permettrait de déloger l’ennemi d’endroits inaccessibles » [155] . L’idée
consistait à ajouter à la charge explosive une substance irritante qui, en se
vaporisant au moment de l’explosion du projectile, noierait le fantassin ennemi
dans des nuées de vapeurs délétères. Ces dernières empêcheraient ainsi le
combattant de remplir son rôle [156] . Les recherches
allèrent bon train, et dès le 27 octobre 1914, 3 000 de ces
nouveaux obus de 105 mm (nom de code Niesgeschoss) [157] furent utilisés
sur le front occidental près de Neuve-Chapelle. On mesure bien ici l’incroyable
efficacité de la chimie allemande qui, en moins de trois mois, parvint à
élaborer et produire les premiers projectiles d’artillerie chimique de la
Grande Guerre. Ces projectiles contenaient 560 g d’une poudre de
chlorosulfate de dianisidine, qui est un puissant irritant des muqueuses et des
voies respiratoires supérieures [158] . Les tests, qui
avaient été menés à Wahn, se révélèrent néanmoins insuffisants [159]  :
sur le front occidental, les effets de ce nouvel obus furent dérisoires puisque
les troupes françaises, lors de sa première utilisation en octobre 1914,
ne remarquèrent même pas qu’elles étaient l’objet d’un bombardement chimique.
Malgré la prise effective de Neuve-Chapelle par les forces allemandes, l’effet
supposé sternutatoire de ces obus semblait nul et le projet fut donc abandonné [160] .
    À la fin de l’année 1914, l’état-major était plus disposé
que jamais à accorder une grande attention aux propositions des chimistes car,
depuis le début des opérations militaires, les forces allemandes avaient
utilisé la totalité des réserves d’explosifs stockées avant le printemps 1914
et le blocus naval allié empêchait l’importation des nitrates du Chili. Si l’on
ne manquait pas encore d’explosif, le spectre d’une crise des munitions, aux
conséquences inimaginables, pointait à l’horizon [161] . Il convenait
donc d’explorer toutes les voies qu’offrait la chimie pour économiser à moindre
coût les explosifs classiques. De plus, l’arme chimique n’était pas seulement
un substitut aux explosifs, mais plus encore un moyen potentiel pour enfoncer
le front et peut-être emporter la décision finale. Si les hommes dans les
tranchées n’étaient pas vulnérables aux armes à fragmentation, on pensait qu’ils
le seraient aux gaz. De fait, au début du mois de novembre 1914, le D r  Hans
Tappen, dont le frère, en poste au quartier général, était un des proches
conseillers de Falkenhayn, proposa à l’OHL de remplir des obus de bromure de
xylyle, un lacrymogène liquide similaire à celui utilisé par les Français dans
les engins suffocants. La proposition fut tout d’abord refusée en raison de la
difficulté à introduire et à manipuler un liquide aussi corrosif dans un obus.
L’utilisation de liquide dans un obus causait, en outre, de sérieuses
perturbations balistiques. Néanmoins, sur ordre du colonel Gerhard Tappen,
des tests complémentaires

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