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La grande guerre chimique : 1914-1918

La grande guerre chimique : 1914-1918

Titel: La grande guerre chimique : 1914-1918 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Olivier Lepick
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thèse
communément admise veut que l’Allemagne ait initié cette forme de guerre.
Pourtant, au-delà de ce qui semble une évidence, il convient une nouvelle fois
d’examiner attentivement les faits. L’accusation allemande excipait de l’existence
d’une notice française datée du 21 février 1915, dans laquelle
étaient données les instructions relatives à l’emploi de grenades et de
cartouches suffocantes. Dans ses travaux, Ulrich Trumpener évoquait et
confirmait l’existence de cette notice mais n’indiquait pas précisément les
références de ses sources, si bien que personne n’était capable de localiser
cette notice dans les archives françaises. Dans l’attente d’une telle
découverte, l’existence plus que probable de ces matériels restait néanmoins
entourée d’un halo de mystère.
    De fait, dès les premiers jours du conflit, les forces
françaises disposaient de projectiles élaborés avant 1914 par les P rs  Kling
et Florentin et appelés cartouches suffocantes [128] . Ces
cartouches de forme cylindrique d’un diamètre de 26 mm, d’un poids de 200 g
et emplies de bromacétate d’éthyle liquide [129] , furent
utilisées dès les premiers mois du conflit. Elles étaient destinées, à l’origine,
aux attaques de fortifications permanentes, d’organes de flanquement et étaient
projetées au moyen d’un fusil lance-cartouches éclairantes d’une portée de 230 m
par ailleurs fort peu précis. Cependant, l’emploi de ces engins, dont il n’existait
que quelques milliers d’exemplaires et qui ne pouvaient causer la mort, ne
contrevenait pas aux engagements contractés par la France lors de la signature
de la Convention de La Haye. L’existence de ces matériels n’était en
aucune manière confidentielle puisque ces munitions figuraient dans les
documents officiels, au même titre que des engins fumigènes dénommés tourteaux. Il semble que vers le mois de novembre 1914, dans une
partie de ces cartouches, et en raison de difficultés d’approvisionnement en
brome, le bromacétate d’éthyle fut remplacé par du chloracétone. Les archives
officielles françaises font également mention d’une grenade suffocante (modèle 1914) [130] qui contenait elle aussi du bromacétate d’éthyle (environ 250 g). Elle ne
fut pas utilisée en quantité significative avant le mois de février 1915,
mais à partir de cette date paraît avoir donné pleine satisfaction, comme
semblent le prouver de nombreux documents officiels [131] . À la mi-mai 1915,
sa production atteignait 1 000 exemplaires par jour. Grenade de forme
ovoïde, d’un diamètre central de 6 cm pour 12 cm de hauteur et d’un poids
de 450 g, il était possible de la projeter à la main à plus de 30 m ;
sa notice descriptive précisait que le but de ces grenades était « de
rendre intenables les abords de l’endroit où elles explosent » [132] .
    Au mois d’avril 1915, des grenades à main, contenant du
chlora-cétone, vinrent s’ajouter à la panoplie chimique des forces françaises.
Ces grenades étaient prétendument plus appropriées à un usage en plein air.
Cependant, on ne dispose d’aucun témoignage précis de combattants évoquant l’utilisation
de ces armes, si ce ne sont des allégations concordantes de soldats allemands
qui en rapportèrent l’emploi en mai 1915 dans le secteur de l’Argonne
ainsi qu’un certain nombre de notes françaises soulignant sa faible efficacité [133] sur le front. Ces armes ne causaient, selon ces mêmes soldats allemands, qu’une
gêne temporaire. Ce fait s’explique largement par la faible quantité de
lacrymogène contenue dans le projectile. À cet égard, la notice descriptive de
cette grenade, datée du 24 avril 1915, indiquait que la nouvelle arme
contenait « dix fois moins de liquide que la grenade suffocante modèle 1914 ;
son liquide est en outre un peu moins actif que celui de cette dernière. Il en
résulte qu’il en faut un nombre beaucoup plus considérable pour obtenir le même
effet, mais elle est très maniable » [134] . L’apparition de
ces grenades, baptisées Bertrand n° 1, est mentionnée dans les
archives officielles à la date du 3 avril 1915 [135] , puis dans un
télégramme du Génie adressé à Joffre daté du 17 avril 1915 [136] .
Fabriquée à partir de mars, cette arme fut mise à la disposition des Armées
vers la fin avril 1915 [137] . Une notice
descriptive de cette grenade fut en outre

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