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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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déserte à cette heure-là, avant de longer un très long mur de brique derrière lequel s’étendait un domaine dont le portail de pierre sculpté de dragons crachant des flammes était gardé par deux bougres à la face patibulaire.
    —  Où les mettons-nous   ?
    —  À l’endroit habituel   !
    Malgré la nuit qu’une lune voilée n’arrivait pas à éclaircir, le jeune Français avait été ébloui par la somptuosité du parc planté de bananiers et de tecks qui bordaient ses allées parfaitement dessinées. La taille et l’élégance de la maison de maître à deux étages construite au beau milieu de cette nature savamment ordonnée témoignaient de la richesse et de la puissance du propriétaire des lieux. Les quatre pans de son toit de tuiles bleues, sur les arêtes duquel il pouvait distinguer la silhouette du lion shizi censé en éloigner les démons, formaient de gigantesques vagues. Quelques instants plus tard, il avait été jeté, avec La Pierre de Lune, dans une cage de bambou à l’intérieur d’un bâtiment annexe qui servait de grenier à riz à la propriété.
    Cela faisait deux jours - et bientôt deux nuits - qu’ils y étaient enfermés avec, pour tout repas, les quelques grumeaux de riz trempé dans l’eau tiède auxquels leur petit geôlier ajoutait, au choix, une boulette de viande ou un morceau de poisson. Les lourds fers cadenassés qu’ils portaient aux pieds leur blessaient les chevilles dès qu’ils bougeaient les jambes et ajoutaient un peu plus au terrible inconfort de leur situation.
    —  On va bientôt le savoir… fit le jeune Chinois, en regardant s’approcher un des gardes qui s’était jusque-là contenté de les surveiller.
    L’homme défit leurs chaînes et ôta leurs fers, avant de leur signifier, en faisant le geste de se trancher la gorge avec le plat de la main :
    —  Suivez-moi   ! Et inutile d’essayer de vous enfuir… sinon…
    Le message était clair.
    Ils furent conduits vers la maison de maître sur le perron de laquelle se tenait le chef des pirates.
    —  Faites-les monter   ! J’ai besoin de voir ce nez long anglais d’un peu plus près   ! s’écria-t-il avant de se mettre à marcher de long en large en agitant les mains, en proie à une vive excitation.
    Antoine remarqua qu’il se laissait pousser l’ongle de l’auriculaire droit dont la longueur atteignait trois bons centimètres.
    —  Si j’en crois ce que m’a dit le geôlier, en plus du reste, vous parlez très bien la langue chinoise, monsieur le nez long anglais   !
    —  J’ai appris le chinois dans ma jeunesse, avant de venir le pratiquer en Chine, se contenta de répondre le Français.
    Soudain glacé et les dents claquantes, il était à la fois surpris et sur ses gardes. Aux yeux d’Épée Fulgurante, il était bel et bien un Anglais, c’est-à-dire un citoyen issu du pays le plus honni par la Chine   ! Mais son intuition lui commandant d’en dire le moins possible et alors qu’il était à deux doigts de rectifier les propos de celui qui les retenait prisonniers en lui expliquant qu’il avait affaire à un bon petit Français dépourvu de toute arrière-pensée particulière, une fois de plus, il préféra s’abstenir, considérant qu’un tel aveu, au demeurant tardif, eût risqué de produire l’effet inverse de celui recherché.
    —  Que faisais-tu avec lui sur le bateau   ? ajouta le maître de céans à l’adresse de La Pierre de Lune en les faisant rentrer dans un salon aux boiseries ouvragées et aux murs entièrement tendus de soie écarlate.
    —  Nous sommes amis. Je l’avais invité à dîner sur le bateau-restaurant. C’est tout… Rien de plus, rien de moins   ! expliqua celui-ci en s’efforçant d’adopter un ton naturel.
    Il constata avec soulagement que le chef des pirates, loin de mettre ses propos en doute, affichait même une profonde jubilation.
    —  Si vous saviez comme tout ça tombe bien   ! Demain, j’irai porter des offrandes au dieu de la Chance   ! Voilà des mois que je cherche à mettre la main sur un Britannique   !
    —  Et pour quel usage   ? demanda Antoine, gorge nouée.
    —  J’ai besoin d’un Britannique pour m’aider… à mener à bien une opération délicate…
    —  Pourriez-vous préciser laquelle   ?
    —  D’abord, quel est votre nom   ? demanda Épée Fulgurante, non sans une pointe d’agacement
    —  Partridge. Antony Partridge   !
    Les dés étaient jetés pour Antoine, qui

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