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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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Clearstone.
    Quant à Laura, elle serrait si fort la fleur de lotus qu’elle finit par sentir que sa main était légèrement humide.
    Elle l’ouvrit. Les pétales écrasés avaient sécrété leur nectar. Elle mit son nez dedans. Il n’y avait aucune odeur, tout juste, et c’était là l’important, le souvenir de ce jeune Chinois sans nom qu’elle brûlait à présent de revoir…

 
    9
     
    Canton, 19 mars 1846
     
    Ils étaient hors du temps et isolés du monde, face à un horizon dévoré par les brumes et les nuages, à regarder s’écouler ces journées indécises et délicieuses où ils n’avaient rien d’autre à faire que s’aimer.
    Rien n’égalait le charme - étrange et subtil, car fait d’éléments contraires - de la Rivière des Perles, perdue d’un côté vers les rangées de bambous qui frissonnaient sur les collines alentour et de l’autre vers l’horizon brumeux des toits de la ville désormais toute proche.
    Mort et vie qui se côtoient et qui se jaugent dans un va-et-vient incessant ; irrigation salvatrice et pollution catastrophique   ; l’eau qui fait pousser les légumes, les plantes, transforme les déserts en oasis luxuriantes, mais l’eau qui peut aussi contaminer les hommes, ou les ensevelir sous des crues diluviennes, et provoquer leur mort…
    L’eau, source de vie et parfois poison mortel. L’eau, meilleure alliée, mais aussi pire ennemi de l’homme.
    Un fleuve, en Chine, c’est toujours tout cela à la fois.
    Sur celui qui traverse Canton, jaunâtre à force de charrier les miasmes de la ville que ses habitants continuent à y déverser sans vergogne, les bateaux-fleurs étaient si nombreux que celui de Tang peinait à s’y frayer un passage et que Jasmin Éthéré était obligée d’user d’une longue gaffe pour repousser les coques qui l’empêchaient d’avancer.
    Tang était en paix avec lui-même et pleinement heureux.
    Depuis qu’il avait pu accomplir la Grande Fusion du Yin et du Yang avec Jasmin Éthéré, la joie et la sérénité ne le quittaient plus.
    Comme il l’avait rêvé, le grand événement avait eu lieu après leur départ de Nankin, dans le bateau-fleur, au fil de l’eau de la rivière adjacente au Grand Canal Impérial qu’il avait préféré ne pas emprunter pour des raisons de discrétion.
    Ses espoirs n’avaient pas été déçus, et les risques qu’il avait pris en fuyant Pékin en compagnie de la jeune femme n’avaient pas été vains.
    Comme il le subodorait, avec Jasmin Éthéré, l’union des souffles était allée jusqu’à son terme ultime. La fusion totale de son corps avec celui de la jeune femme s’était enfin produite, avec ce sentiment d’anéantissement mutuel qui pacifie à la fois le cœur et l’esprit.
    Il n’y était pas arrivé sans mal.
    Comme c’était prévisible, il lui avait fallu s’armer d’une infinie patience et de beaucoup de persuasion pour que Jasmin Éthéré acceptât de se donner à lui.
    Après leur visite à Prospérité Singulière, la partie de cache-cache avait duré près d’un mois. Tous les soirs, sur le pont du bateau-fleur, au moment où le rideau de la nuit tombait sur le Grand Canal, signant la fin provisoire de l’éblouissant spectacle qui ne reprendrait qu’au petit jour, il avait fait à la jeune femme une cour empressée. Ayant eu l’occasion d’évaluer le caractère bien trempé de la contorsionniste, il avait abandonné les manières à la hussarde dont il avait, jusque-là, usé avec les femmes, pour adopter une posture beaucoup plus humble, basée sur la douceur.
    Et pourtant, rien n’y faisait. Ni les jours qui passaient ni le changement des paysages qui défilaient de part et d’autre de leur petite jonque, où les bambous et les grands arbres à lianes avaient remplacé les étendues plates propices à la culture des céréales : Jasmin Éthéré paraissait insensible au temps et à l’espace, et continuait à camper sur ses positions initiales en refusant obstinément ses avances.
    Jusqu’à ce fameux soir où - ô divine surprise   ! - elle lui avait enfin cédé.
    La nuit venait de tomber et la lune ne s’était pas encore levée. Tang avait amarré leur bateau-fleur non loin d’un village de bateliers. Le Grand Canal Impérial s’y élargissait sur une longueur d’environ cent mètres afin de permettre aux embarcations de faire halte sans gêner le passage des autres navires. Alentour, il n’y avait pas âme qui vive. Jasmin Éthéré

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