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La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

Titel: La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Folco
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traite :
    – Je viens de Spital. Je suis parti avant-hier et j’ai tout fait à pied. Je suis venu parce que je veux vivre avec mon vrai père ( mit meinem wirklichen Vater ).
    Aloïs avait tout imaginé sur cette rencontre, sauf ce qui arriva.
    – De quoi ? Comment ? Hein… Tu te trompes, je ne suis pas ton père, alors va-t’en, allez, allez, va-t’en, va-t’en !
    Tout en évitant de croiser son regard, le docteur Tricotin lui montra la porte.
    – Et si j’apprends que tu colportes de pareilles bêtises, je ferai appel à la police pour qu’elle t’en dissuade, allez, raus , raus  !
    Tel un Gaulois recevant le ciel en plein occiput, Aloïs se sentit assommé. Mordillant sa lèvre inférieure, il transforma son désespoir naissant en grosse colère. Tirant de sa poche la miniature de Zwettl, il la jeta rageusement sur le bureau et sortit en claquant la porte derrière lui.
    Courant à la vitesse d’un dératé, il se retrouva devant les eaux usées du Donaukanal. Et maintenant ?
    Il marchait comme un somnambule dans le quartier populaire de Favoriten quand une odeur de cuir s’échappant d’une échoppe de cordonnier lui fit lever la tête. Il entra et dit sans préambule :
    – Je cherche un emploi.
    Pour preuve de son savoir-faire, il se déchaussa et posa ses chaussures sur le comptoir ainsi que son havresac.
    – J’ai mes outils et c’est moi qui les ai faits, ajouta-t-il en produisant une besaiguë, une alène, une gouge, un ébourroir et un lissoir.
    Pris à l’essai en échange de deux repas par jour et d’un coin dans l’atelier pour y déplier une paillasse, Aloïs patienta six mois avant que maître Trecher consentît à lui verser quelque argent. Argent aussitôt employé à l’achat d’un cahier, d’un crayon, d’un dictionnaire et d’un petit livret d’une soixantaine de pages intitulé Les Cent Locutions latines et fondamentales pour permettre à quiconque de briller en société .
    Parce que Aloïs était un ouvrier consciencieux, habile de ses dix doigts et d’une docilité exemplaire, Herr Trecher ne lui tint pas rigueur de son air perpétuellement maussade, ni de la mauvaise habitude qu’il avait de lire tard dans la nuit (le matin, l’atelier empestait la bougie), pas plus qu’il ne lui en voulait lorsque le gamin émaillait ses propos d’agaçants Quid novi (Quoi de neuf ?), ou de Vade retro, Satanas quand on lui proposait de quitter ses livres et de se distraire.
    Trois mois après son dix-huitième anniversaire, à l’insu de son employeur, Aloïs se présenta au concours de l’administration impériale et royale des Finances. Il fut reçu.
    –  Alea jacta est , me voilà désormais fonctionnaire impérial et royal, déclara-t-il avec une moue méprisante que maître Trecher ne lui avait jamais vue.
    Moins d’un quart d’heure plus tard, Aloïs Schicklgruber quittait pour toujours l’échoppe du cordonnier.

3
    Pater semper incertus est.
    (L’identité du père est toujours incertaine.)
    Septembre 1873.
    Spital am Wald.

    Nepomuk fortifiait ses arbustes en les arrosant de sang de bœuf délayé dans de l’eau tiède lorsque Walburga le héla.
    –  Vater   ! Une lettre pour toi.
    Il la rejoignit en essuyant ses mains sur son pantalon. Qui pouvait donc lui écrire ? Ne sachant pas lire, le vieux paysan tourna et retourna la lettre avant de se rendre au presbytère demander de l’aide au père Hansen.
    La dernière lettre reçue au village datait de sept ans ; le sous-officier Felber avertissait sa famille qu’il avait été blessé par les Prussiens à Königgrätz.
    – C’est votre neveu Aloïs, Herr Hiedler, il prend de vos nouvelles et il vous invite à son mariage à Braunau am Inn. Il dit que votre présence sera un honneur.
    Nepomuk fronça ses épais sourcils.
    – Quand il a lieu, ce mariage ?
    Le père Hansen s’étonna.
    – Demain ! Vous n’aurez jamais le temps de vous y rendre ! Il aurait dû vous prévenir plus tôt…
    Le vieil homme retourna à sa ferme en ruminant sur la précédente visite de son neveu, deux ans plus tôt. Pourquoi revenir si c’était pour s’enfuir en pleine nuit, comme un voleur de poules, sans même éteindre la lampe à pétrole ? Et maintenant cette invitation impossible à honorer ; Braunau am Inn était à trois jours de diligence de Spital.
    – Ma main au feu qu’il l’a fait exprès. Il a seulement voulu me dire qu’il se mariait… Aber warum ?
    ***
    – Klara !

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