La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler
cuisine qui se réchauffait rapidement et, n’ayant rien avalé depuis la veille, il se surprit à avoir faim. Il cuisit les trois œufs restant dans le garde-manger, grignota des restes de charcuterie et de
fromage. Modérément rassasié, il erra de la cuisine à sa chambre en passant par le salon, se heurtant sans cesse à des souvenirs tel un aveugle de fraîche date se cognant contre les meubles.
Plus tard il se coucha, et comme il ne trouvait pas le sommeil, il se releva et s’allongea dans le lit de sa mère, sur son empreinte même ; sitôt fait, il bascula dans un profond sommeil d’une grande noirceur.
***
À la direction des Finances royales et impériales :
Les demandeurs vous prient respectueusement par la présente de bien vouloir répondre favorablement à leur demande de pension d’orphelins. Le 21 décembre 1907, ils ont perdu leur mère, veuve d’un haut fonctionnaire des Douanes, et sont devenus orphelins mineurs et incapables de gagner leur vie. Leur tutelle est assumée par M. Josef Mayrhofer, à Leonding. Les demandeurs sont : Adolf Hitler, né en 1889 à Braunau, et Paula Hitler, née le 28 janvier 1898 à Fischlam, près de Lambach, Haute-Autriche. Ils réitèrent leur demande respectueusement.
Adolf Hitler.
Paula Hitler.
Vingt jours après le décès de Klara, Adolf reçut la réponse de la direction des Finances l’informant qu’il était autorisé, avec sa sœur, à faire valoir leurs droits à une pension d’orphelins (selon la loi, les orphelins âgés de moins de vingt ans bénéficiaient d’une pension s’élevant à la moitié de ce que la mère veuve percevait). Klara recevait cent Kronen , les deux enfants reçurent chacun vingt-cinq Kronen jusqu’à leur majorité.
En échange de ses vingt-cinq Kronen et de sa part d’héritage (six cent cinquante-deux Kronen ), Adolf obtint de Leo et Angela Raubal qu’ils prennent en charge die Kleine. Leo n’accepta qu’une fois la lettre de renoncement écrite, signée, expédiée.
Après le trousseau d’Angela, après les frais du séjour d’Adolf à Steyr, après ses deux séjours à Vienne, les trois déménagements, la longue maladie, les frais d’hospitalisation, après les frais d’enterrement, sans oublier l’irrésistible montée des prix qui dévalorisait la monnaie, il restait dans l’enveloppe du pactole Tricotin mille trois cent cinquante-sept Kronen .
Adolf en offrit cinq cents à sa tante bossue (elle seule connaissait l’existence de cet argent).
– Garde-les, Adolf. Maintenant que Klara n’est plus là, tu vas en avoir drôlement besoin.
***
Le 3 février 1908, Adolf résilia la location de l’appartement de la Blütengasse, et Hannitante retourna vivre à Spital. Le 4, Adolf quitta définitivement Linz et August fut le seul à l’accompagner à la Stadtbanhof.
– Maintenant que tes parents ont dit oui, ne traîne pas ; dans un premier temps tu logeras dans ma chambre, ensuite je te trouverai un endroit plus grand pour ton piano, lui dit Adolf en tirant à deux mains la lourde malle de son père contenant tout ce qu’il possédait de matériel sur cette terre.
August le rassura avec chaleur : il était encore émerveillé par la diabolique habileté de son ami. Hier au soir, celui-ci avait persuadé ses parents de le laisser partir à Vienne pour se présenter au concours d’admission au Conservatoire. Sans hâte, argument après argument, tel un maçon construisant un mur, Adolf leur avait d’abord donné mauvaise conscience, pour ensuite leur décrire avec réalisme
les satisfactions qu’ils tireraient d’être les parents d’un grand violoniste, chef d’orchestre de surcroît. Tout en parlant, Adolf avait arpenté l’atelier en agitant les bras et en zigzaguant adroitement entre les meubles sans jamais se cogner. Il leur avait porté l’estocade en dessinant à main levée le plan de la nouvelle Franz-Josefsplatz et l’endroit où se dresserait la statue (de pied) du génial musicien Gustl Kubizek.
– Je dois aider mon père à terminer une commande de canapés et je te rejoins dans deux semaines… À propos, qu’est-ce que je dois faire si je vois Stefanie ?
Adolf contempla ses chaussures bien cirées pour marmonner :
– J’y ai renoncé… aussi je te prie de ne plus m’en parler.
Sa malle déposée dans le fourgon des bagages volumineux, il rangea avec soin le reçu remis par l’employé des chemins de fer. Dans le train, il passa son bras
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