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La lance de Saint Georges

La lance de Saint Georges

Titel: La lance de Saint Georges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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approché à moins de cent pas,
vit que c’était l’Oiseau Noir.
    C’était la première fois qu’il apercevait cette femme et il
se trouvait assez près pour constater qu’elle était vraiment belle. Elle se
tenait droite, grande et mince, enveloppée dans son manteau pour se protéger du
vent d’hiver, mais ses longs cheveux noirs étaient libres comme ceux d’une
jeune fille. Elle lui fit une révérence ironique, à laquelle sir Simon répondit
en s’inclinant maladroitement sur sa haute selle, puis il la vit prendre son
arbalète et épauler.
    « Quand nous serons dans la ville, je te le ferai
payer, Oiseau Noir », pensa sir Simon. Il immobilisa complètement son
cheval, cavalier isolé sur le champ de bataille, pour lui permettre de le viser
tout en sachant très bien qu’elle allait le rater. Alors, il lui ferait un
salut moqueur et les Français y verraient un mauvais présage.
    Mais si elle visait juste ?
    Sir Simon fut tenté de prendre son heaume au pommeau de la
selle, mais il se ravisa. Il avait mis au défi l’Oiseau Noir de commettre le
pire et il ne pouvait pas se permettre de manifester de l’inquiétude devant une
femme. Il attendit pendant qu’elle levait l’arbalète. Les défenseurs, qui
observaient la jeune femme, devaient prier pour qu’elle vise juste. Ou
peut-être engageaient-ils des paris ?
    « Allez, vas-y, petite pute », murmura sir Simon
dont le front était couvert de sueur malgré le froid.
    Elle écarta de son visage sa chevelure noire puis appuya
l’arbalète sur un créneau et se remit à viser. Sir Simon gardait la tête haute
et regardait en face de lui. « Ce n’est qu’une femme, se dit-il. Elle est
sans doute incapable d’atteindre un chariot à cinq pas. » Le cheval eut un
tressaillement. Sir Simon tendit le bras pour lui flatter le col.
    — Nous partons bientôt, lui dit-il.
    Sous le regard d’une multitude de défenseurs, l’Oiseau Noir
ferma les yeux et tira.
    Sir Simon aperçut le carreau, semblable à une petite tache
noire sur le ciel gris et sur les pierres grises des tours de l’église qui
s’élevaient au-dessus des murs de La Roche-Derrien.
    Il savait, avec une certitude absolue, que le carreau allait
le manquer. C’était une femme, bon dieu ! Voilà pourquoi il ne bougea pas,
tout en voyant le carreau arriver droit sur lui. Il ne pouvait pas y croire. Il
s’attendait que le trait dévie vers la gauche ou la droite, ou laboure le sol
durci par le froid, mais au lieu de cela, il arrivait infailliblement vers sa
poitrine. Au dernier moment, sir Simon leva son lourd écu et rentra la tête. Il
ressentit un énorme choc sur le bras gauche qui le repoussa violemment contre
le troussequin de sa selle. Le carreau frappa l’écu si fort qu’il fendit les
panneaux de saule et que sa pointe traversa la cotte de mailles et s’enfonça
dans son avant-bras. Les Français applaudirent et sir Simon, sachant très bien
que d’autres arbalétriers pourraient essayer d’achever ce que l’Oiseau Noir
avait commencé, pressa les flancs de son destrier. L’animal tourna et obéit à
l’impulsion des éperons.
    — Je suis vivant, dit sir Simon à haute voix, comme si
cela pouvait réduire au silence la jubilation des Français.
    « Sale petite pute », pensa-t-il. Il le lui ferait
payer. Payer jusqu’à ce qu’elle crie. Il retint son cheval, pour ne pas avoir
l’air de s’enfuir.
    Une heure plus tard, son écuyer lui ayant bandé
l’avant-bras, sir Simon était parvenu à se convaincre lui-même qu’il avait
remporté une victoire. Il s’était exposé et il avait survécu. Cela avait été
une démonstration de courage. Il était toujours vivant. Il se considérait comme
un héros et, en se dirigeant vers la tente qui abritait le comte de
Northampton, commandant de l’armée, il s’attendait à être accueilli comme il
convenait. La tente était constituée de deux voiles. Après des années de
service en mer, leur toile était jaunie, rapiécée et élimée. Un bien pauvre
abri, mais qui s’accordait avec les goûts de William Bohun, comte de
Northampton, lequel, bien qu’il fût le cousin du roi et l’un des hommes les
plus riches d’Angleterre, méprisait le luxe.
    Le comte, à vrai dire, avait l’air aussi rapiécé et élimé
que sa tente. C’était un petit homme trapu avec un visage que ses hommes se plaisaient
à comparer à un derrière de taureau. Mais ce visage reflétait l’âme du comte,
brusque, courageux

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