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La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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voir.
    Il s’était mordu les lèvres jusqu’au sang et entré les ongles dans les paumes pour ne point intervenir et se faire tuer dans l’instant. La sagesse le poussa à n’en rien faire mais à graver en sa mémoire les traits des quatre violeurs.
    Il savait déjà qu’il n’oublierait jamais ceux de leur chef, sans doute un aristocrate, auquel manquait un œil.
    Jamais!
    Et «jamais» n’est quelquefois pas si loin…
    Plus on approchait de Paris et plus la marche de Valencey d’Adana, Mahé, O'Shea, Gréville et six de ses policiers d’élite se trouvait ralentie.
    Curieuse chose, en vérité, que cela. Comme si la nouvelle, arrivée dans la capitale, en refluait comme une vague pour inonder la province à la vitesse réputée des marées du Mont-Saint-Michel.
    À chaque fois, on fêtait Valencey d’Adana, découvrait les traits du héros avec une curiosité peu commune et tous de penser que cet homme grand, mince, à la taille bien prise, au visage osseux, au regard étrange mais au sourire d’enfant était absolument digne de sa fabuleuse légende.
    À chaque fois encore, comme on organisait hâtivement défilés patriotiques et banquets, le chef de la police secrète souhaitait qu’on passât outre mais toujours Valencey d’Adana désarmait sa résolution:
    – Mais enfin, Gréville, vous n’y pensez pas?… Quel homme serais-je donc si je ne donnais pas au peuple le temps qu’il me demande pour me faire le grand honneur de me si bien recevoir?
    Gréville ressentait une certaine frustration car ces intermèdes empêchaient les discussions de fond avec Valencey d’Adana. Cependant, même entrecoupées ainsi, ces conversations étonnaient le policier. Était-ce l’éloignement qui donne le froid jugement?… Son esprit analytique?… Sa vive intelligence?… Quoi qu’il en soit, bien qu’arrivé du Nouveau Monde, Valencey d’Adana comprenait merveilleusement les choses.
    Ainsi, Gréville n’était pas près d’oublier ce court dialogue où le marin lança sans passion:
    – Lorsqu’ils ont investi Nantes, les Vendéens auraient pu marcher sur Paris et prendre la capitale.
    – Nous le pensons aussi. Mais il s’est trouvé un tireur d’élite républicain, parmi les ruines, pour abattre Cathelineau, leur généralissime, et ils se retirèrent de Nantes en désordre.
    – La mort d’un général en chef n’est pas si dramatique, il est dans son rôle en se faisant tuer et un autre doit pouvoir le remplacer. La raison de la future défaite vendéenne, celle qui leur fera perdre la guerre, est ailleurs.
    Gréville fut très surpris.
    – Ah ça, vous m’étonnez fort: et quelle est-elle, cette raison?
    – N’avez-vous pas remarqué?… Aucun des frères du ci-devant roi, aucun des princes du sang et pas même un évêque ne s’est joint aux Vendéens. La bêtise d’un roi leur fit perdre le trône, la lâcheté des princes a scellé la défaite de l’insurrection qui le pouvait reprendre.
    Gréville, atterré par ces paroles, imagina qu’il se fût trouvé un frère du ci-devant roi lors de la prise de Nantes. La mort du généralissime serait passée inaperçue, toutes les armées de la République se battaient aux frontières, sauf celle qui venait d’être défaite. Pendant quelques jours, entre Nantes et Paris, entre l’armée vendéenne et le pouvoir qui siégeait dans la capitale, il n’exista que… deux régiments.
    Deux régiments, autant dire rien!
    Il en frémit.
    Deux heures plus tard, comme ils se trouvaient fêtés à Étampes et qu’un chœur interprétait La Marseillaise , Valencey d’Adana, qui connaissait pourtant très bien ce chant, dressa l’oreille en entendant une des strophes:
    Amour sacré de la Patrie
    conduis, soutiens nos bras vengeurs,
    Liberté, liberté chérie
    Combats avec tes défenseurs…
    Se trouvant tous deux en selle, Valencey d’Adana se pencha sur l’encolure de son cheval et souffla à Gréville:
    – Au fait, puisqu’il vous en faut un, j’ai trouvé le nom de ma 123 e demi-brigade.
    – Quel est-il?… demanda Gréville, très curieux de ce qu’il allait entendre.
    – Ce sera la brigade «Liberté, liberté chérie». Je ne sais rien de plus beau.
    Gréville réfléchit longuement, puis:
    – Ni moi non plus!
    Elle n’en pouvait plus!… Les adieux au baron de Penchemel et au petit Jean-Baptiste parti s’engager aux armées de l’Ouest, et maintenant cette impression que le temps s’étirait sans fin. À d’autres

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