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La lumière des parfaits

La lumière des parfaits

Titel: La lumière des parfaits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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frère du roi (celui qui avait profité d’un pèlerinage à Boulogne pour s’enfuir avec son épouse et refusé de regagner Londres) lança une offensive. Il occupa le Rouergue, le Quercy, l’est du Périgord et l’Agenais. De nombreuses portes s’ouvrirent devant l’armée royale : Pierreguys, Rodez, Najac, Cahors, et des centaines d’autres villes, bourgades ou cités.
    La bastide royale de Domme résista avec succès à l’armée anglaise pendant quinze jours. Les seigneurs français qui avaient rallié les anglais s’étant débandés, ils durent lever le siège faute d’assaillants.

    Lorsqu’ils prirent Saint-Vincent-le-Paluel et incendièrent l’église sous prétexte que le manoir et les terres relevaient de l’épouse de Gilbert de Domme, je décidai de reprendre les armes. Le village n’était qu’à quelques lieues de ma maison forte de Braulen. L’Anglais venait s’y frotter d’un peu trop près pour mon goût. Beynac, Montfort, Turenne avaient sauté sur l’occasion pour leur fermer leurs portes et les ouvrir aux Français.
    Je renforçai la petite garnison de mon manoir, levai, selon ma faible pécuniosité, une bande de vingt archers-paysans, les meilleurs sur le terrain, tous volontaires. Gui de la Mothe-Fénelon, Eudes de Saint-Pol, Yves de Penhoët caployaient et aborgnaient leurs cibles à la perfection. Avec quelques valets d’armes pour assurer nos arrières, nous avions décidé de tendre embuscade sur embuscade, de sournoise façon, à la manière d’un certain Breton qui nous avait beaucoup appris sur l’art de la guerre. Un seul but : harceler l’ennemi sur son avant-garde et son arrière-garde, rompre aussitôt le combat, éviter les échelons de cavalerie, ne faire aucun quartier. Occire, saisir les armes, les arcs gallois, les flèches, les dépouiller de leurs meilleurs vêtements pour les donner aux plus miséreux. Récupérer brodequins, bottes, houssures des chevaux, arçons ; délaisser chapels de fer, hauberts et pièces d’armures, trop encombrants.
    Nous-mêmes n’étions vêtus que de simples brigandines de cuir, sans cotte de mailles ni autre coiffe que des bonnets de laine aux couleurs de saison, et chausses aux mêmes.
     
    J’avais juste franchi le seuil de la quarantaine d’années, me sentai en grande forme après ces années d’inactivité. Mon fils aîné, Hugues, alors âgé de vingt ans, se joignit à nous. Il était temps qu’il apprenne à chasser autrement qu’au faucon de haut vol ou à courre. Notre nouveau gibier ne manquait point de saveur. Je priai Gui de veiller sur lui et de tempérer sa fougueuse jeunesse.
    Nous les surprenions par tout temps, tapis dans les ronces et les broçailles ou perchés dans les arbres, à l’affût dans les forêts les plus noires et les plus épaisses, dans des gorges profondes et des combes étroites, surgissant du brouillard, de la pluie, du ven t ou de la neige. Comme des fantômes, nous fondions sur nos proies, dans le silence ou en hurlant, pour les tailler, les décerveler, les décoler, les saigner, achever les blessés sans merci…
     
    Hugues Brachet de Born se comporta comme un véritable chef de bande, sachant se replier à temps, ne desforer l’épée que lorsque c’était nécessaire, se tapissant avant le harcèlement, s’esbignant après l’embuscade, protégeant nos compains. Je rendis grâce à Dieu qu’il ne se soit pas rallié au parti godon.
    La guerre avait changé de forme et il en avait saisi la leçon. Parfois inquiet, je tempérai ma bouillante humeur pour lui donner une chance de montrer son agilité, son sens de la tactique, sa vivacité d’esprit pour savoir s’esquiver lorsque l’affaire tournait mal, pour faire face avec beau courage si l’un de nos compains se trouvait acculé, en mauvaise posture.
    Que les ventrières mettent au monde des hommes tels que lui, et l’Angleterre serait bientôt boutée hors le royaume de France.

    Un an plus tard, au mois de juin de l’an de grâce 1370, nous étions à l’affût. Dans les sous-bois du village fortifié de Commarque, où nous avions devancé une avant-garde ennemie que nous pensions faire route dans icelle direction. Tapis derrière des fougères, nous guettions le grondement des sabots, l’oreille collée sur l’humus, les chausses dans les orties.
     
    Une heure plus tard, une avant-garde de piétons nous surprit. Nous attendions un échelon de cavalerie. Par le chemin autour duquel nous avions pris

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