La malédiction des templiers

est d’origine douteuse. Ils prétendent que ces écrits sont forcément postérieurs aux quatre évangiles du Nouveau Testament et que leurs auteurs ont été “corrompus” par des influences gnostiques. Ils les qualifient d’“hérétiques”. Or tu sais ce que veut dire ce mot ? D’une opinion autre . Inutile d’épiloguer. Les vainqueurs ont choisi ce en quoi on devait croire.
    « Le problème c’est que, à l’heure actuelle, on ne sait pas de façon certaine lequel des deux camps est dans le vrai. Nous ignorons quels écrits sont “corrompus”. Tout cela est essentiellement théorique car rares sont les textes qui sont parvenus jusqu’à nous. Nous ne savons pas avec certitude à quelle époque les évangiles de Matthieu, de Marc, de Luc et de Jean ont été rédigés, ni dans quel ordre. Nous ignorons également qui en sont les auteurs, mais nous savons qu’il ne s’agissait d’aucun d’eux. Mais on nous a dit que c’étaient les seuls qui racontaient la véritable histoire de Jésus et de ses prêches, et que tout ce qui s’en écartait n’était que fariboles. Mais de cela il n’y a aucune preuve. En revanche, il y a un sacré paquet d’indications qui permettent d’en douter. Les meilleurs spécialistes mondiaux de la Bible dans le monde disposent de références attestées à d’autres évangiles qui n’ont jamais été retrouvés mais qui pourraient précéder ceux de la Bible – pas loin d’une cinquantaine, aux dernières nouvelles. Tu te rends compte ? Cinquante évangiles dont on n’a jamais eu l’occasion de prendre connaissance… Et encore, il s’agit juste de ceux dont l’existence est avérée. Et malgré cela, on prend toujours le livre qu’on nous a enseigné et fait lire dans notre enfance pour argent comptant, et c’est lui qui régente pratiquement chaque aspect de notre existence. C’est le livre qui, pour les gens, renferme la parole divine. Au sens propre. Sans qu’ils aient la moindre idée sur son origine.
    — Et tu crois vraiment que ce trésor pourrait changer tout ça ? interrogea Reilly.
    — Tu plaisantes ! s’exclama Tess. On ne parle pas de fragments gros comme des timbres-poste genre manuscrits de la mer Morte ou même de quelques codex retrouvés par hasard comme ceux de Nag Hammadi. Il s’agit d’une bibliothèque entière d’évangiles et de textes chrétiens anciens, Sean. Datés, attestés, complets et originaux, et non de traductions de traductions de traductions – un tableau authentique, non dénaturé, des différentes visions de la vie et des paroles de Jésus. Cela pourrait révolutionner notre compréhension de l’homme et du mythe. En fait, je suis sûre que ce serait le cas, parce que je ne doute pas un instant que les paroles de Jésus aient été fort différentes de celles qu’on nous vend depuis Nicée. Comment son message d’altruisme, de mépris des biens matériels, un message destiné à redonner confiance aux pauvres et aux opprimés, aurait-il pu se transformer en religion des riches et des puissants, sinon par sa corruption délibérée pour coller aux nouveaux plans des autorités de Rome ?
    — La religion de l’empereur, dit Reilly, se rappelant la lettre d’Osius.
    — Exactement ! Pense à ce qui s’est réellement passé au concile de Nicée. Un empereur – et non un pape ! – réunit les prêtres et les évêques les plus influents des quatre coins de son empire, les installe dans une pièce et leur ordonne de régler leurs différends pour mettre au point une doctrine unique destinée à devenir la version officielle du christianisme. Un empereur, pas un pape… Un roi guerrier, un souverain oint du Seigneur, un messie , pour reprendre le sens premier de ce mot, un homme qui vient de défaire ses ennemis, de prendre le contrôle d’un territoire immense mais divisé, et qui a besoin de quelque chose de terriblement fort afin de l’unifier. Nous avons l’occasion de découvrir les textes qui n’ont pas franchi la barre, les autres versions de ce que Jésus a dit et a fait, ceux et celles dont Constantin et les fondateurs de l’Eglise ont décrété que nous ne devions rien savoir. Il faut qu’on retrouve ce trésor, Sean, insista-t-elle, les yeux brillants d’ardeur. C’est un point crucial de notre Histoire, mais qui peut également avoir des conséquences dramatiques. Il faut qu’on le retrouve et que l’on veille à le traiter à sa juste valeur. Ces écrits sont susceptibles