La malédiction des templiers

avoir recouru à ce genre d’argument et insinué que je suis une mère indigne…
    Elle le regarda, d’un air à la fois interrogateur et taquin.
    — Sérieusement, Sean, faut-il qu’on en arrive là ? Car tu sais pertinemment qu’au bout du compte je finirai par y aller avec toi. Tu le sais aussi bien que moi.
    Reilly se contenta de la regarder fixement, désarçonné, sa fusillade verbale ricochant encore à l’intérieur de son crâne. Puis, sans un mot, il se contenta de lever la main en signe de reddition, tourna les talons et se dirigea vers la porte.
    Elle souriait toujours quand il quitta la pièce.

26
    Jed Simmons reprit progressivement conscience, la bouche sèche et la tête lourde comme après une nuit blanche trop arrosée. La vision qui se précisa peu à peu dissipa toutefois rapidement toute illusion, aussi vague fût-elle, qui aurait pu lui faire croire que ces sensations étaient la conséquence d’activités tant soit peu plaisantes : il était installé dans le siège passager d’un 4 × 4 roulant en territoire inconnu, des plaines inondées de soleil qui semblaient s’étendre à l’infini. La sensation que lui envoya son poignet droit confirma ce sentiment d’inconfort : il était attaché à l’accoudoir de la portière, retenu par une menotte en plastique.
    La voix de l’homme au volant redonna corps à son cauchemar :
    — Allez, allez, on se réveille ! Il y a une bouteille d’eau et des barres chocolatées dans le sac, à vos pieds. Je vous conseille de taper dedans. J’imagine que vous devez avoir plutôt soif à l’heure qu’il est.
    Simmons était trop las – et trop furieux – pour résister. Après tout ce temps dans le désert, en Jordanie, il savait à quel point il était crucial de demeurer correctement hydraté, tant pour le corps que pour l’esprit, l’un comme l’autre étant pour l’heure dans un état lamentable.
    Il tendit vers le sac son bras libre et, en se penchant en avant, sentit quelque chose d’inconfortable qui le serrait à la taille, une sensation encore jamais éprouvée. Il s’agita sur son siège, regardant vers le bas, tâtant l’endroit suspect de son bras non entravé, se demandant de quoi il pouvait bien s’agir. Il y avait bien quelque chose, sous sa chemise.
    Il s’apprêtait à relever son vêtement quand l’homme lui lança :
    — Moins vous y toucherez, mieux cela vaudra.
    Simmons suspendit son geste et regarda son ravisseur.
    Ce dernier gardait les yeux sur la route, devant lui, concentré sur sa conduite, le visage de marbre.
    — Que… C’est vous qui avez fait ça ?
    L’homme fit oui de la tête.
    Simmons avait terriblement peur de poser la question qui venait de lui traverser l’esprit, et pourtant les mots sortirent de sa bouche, lentement, comme s’il était incapable de les contrôler :
    — Qu’est-ce que c’est ?
    Après avoir gardé un moment le silence, le conducteur du 4 × 4 jeta un rapide coup d’œil à son passager et lui dit :
    — A la réflexion, vous devriez peut-être regarder.
    Simmons le dévisagea, se demandant s’il avait vraiment envie de voir de quoi il s’agissait. Puis, n’y résistant plus, il releva sa chemise.
    Il avait quelque chose autour de la taille, juste au-dessus de son pantalon. Une espèce de ceinture, large d’environ cinq centimètres, confectionnée dans un matériau brillant et résistant, comme de la toile à voile. Cela semblait parfaitement inoffensif – jusqu’à ce qu’il relève un peu plus sa chemise et repère le petit cadenas reliant deux œillets en laiton, qui maintenait la ceinture fermement serrée. Il vit ensuite quelque chose de plus alarmant : un renflement, sur l’avant de la ceinture ; cousu à l’intérieur, se trouvait un objet dur, pas plus gros qu’un paquet de cartes. Impossible de voir comment y accéder, en l’absence de poche, de fermeture éclair ou Velcro. Il faisait corps avec la ceinture.
    Un frisson d’effroi le parcourut.
    — Qu’est-ce que c’est ? s’enquit-il, ses tempes battant soudain plus fort. Qu’avez-vous fait ?
    — C’est une minibombe. Oh, rien de bien compliqué. Un peu de Semtex et un détonateur. Contrôlée à distance, expliqua le ravisseur en lui montrant son portable avant de le remettre dans sa poche. Juste assez puissante pour faire dans votre ventre un trou de la taille de ma main, fit-il, doigts écartés pour bien faire comprendre à son passager ce que cela représentait.