La mariage du Viking
lèvres pour s’empêcher de rire.
Jamais Einar ne serait tombé d’accord, à moins de se voir offrir une autre solution pire. Cependant, il devait bien reconnaître qu’Endera était, selon les dires d’Olva, une fille intelligente et attentive aux autres.
— Qui portera aux Saxons la demande de rançon ? interrogea Hamar en rompant le silence qui s’était installé entre eux.
— Puisque Einar parle le saxon, il se rendra à Hedeby.Il est encore temps de se lancer dans un court voyage avant le début de l’hiver. Il faut retrouver celui qui nous a apporté le message du Saxon. Il saura comment lui transmettre notre demande.
— Et s’ils n’acceptent de payer la rançon que pour un seul des deux enfants ? hasarda Hamar.
— Ce sera les deux ou rien, rétorqua Einar. Le garçon ne quittera pas sa sœur.
— Comment peux-tu te montrer aussi affirmatif ? demanda Svend.
— Si j’étais à sa place, je penserais la même chose, répondit simplement Einar en évitant soigneusement les regards de ses deux interlocuteurs.
Il comprenait leur surprise de le voir ainsi s’intéresser à ces enfants, car lui-même aussi s’en étonnait.
Il était vrai qu’Adelar possédait toutes les qualités qu’un père pût souhaiter pour son fils. Son courage dans le village saxon avait forcé l’admiration d’Einar, tout comme ses efforts pour cacher le mal de mer qui le terrassait, son désir farouche de protéger Meradyce, et ses qualités de tireur à l’arc. Cet après-midi-là, tandis que l’entraînement continuait, Einar avait même éprouvé quelque jalousie pour le thane saxon, au point de regretter de ne pas avoir un fils à lui.
Jusqu’à ce jour, jamais le besoin d’avoir un héritier ne l’avait aiguillonné. Son mariage avec Nissa, en lui apportant une longue suite de contrariétés et de déceptions, l’avait dissuadé de reprendre femme. Einar avait eu ensuite de nombreuses compagnes, mais aucun de ses rejetons — excepté Endera — n’avait survécu plus d’un an. Les années passant, il s’était durci le cœur pour se persuader enfin qu’il n’avait nullement besoin d’un fils.
Aujourd’hui pourtant, Einar savait qu’il se trompait.Peut-être les dieux lui avaient-ils envoyé ce garçon afin de remplacer celui qu’il n’avait jamais eu.
Cependant, son cœur ne l’entendait pas ainsi.
Les dieux ne lui avaient-ils pas aussi envoyé une femme pour qu’elle fût la mère de ses enfants ?
A cet instant, le barde prit place au centre de la pièce. Les guerriers s’installèrent confortablement pour l’écouter déclamer des poèmes qui relataient les aventures des dieux et des grands héros vikings, tandis qu’incapable de se concentrer sur ces récits, Einar continuait à méditer sur les derniers événements.
Au bout d’un instant, il vit Ull le rejoindre et l’interpeller :
— Reinhild m’a dit que tu avais offert, cet après-midi, un cadeau à la Saxonne.
Le barde interrompu tourna vers lui un visage irrité, mais la salle demeura silencieuse.
Lentement, Einar répondit à Ull :
— C’est vrai. Et j’ai encore beaucoup de robes et de bijoux à offrir aux femmes qui me plaisent. Mais, dis-moi, Ull, pourquoi me rapportes-tu ces bavardages ? N’as-tu donc rien de mieux à faire pour t’occuper ?
— La veux-tu pour compagne ?
— Peut-être, répliqua Einar évasivement.
Ull hésita, ne sachant point jusqu’à quelle limite il pouvait pousser l’indiscrétion. Enfin, il jugea plus prudent de s’en tenir là. Sans rien ajouter, il porta sa corne aux lèvres cependant que le barde, non sans jeter un regard de reproche au fauteur de troubles, reprenait son récit sur le vol du marteau de Thor.
Einar avala une nouvelle gorgée d’ale. S’il avait offert un présent à la belle Saxonne, cela ne regardait que lui.Néanmoins, il aurait préféré que personne ne fût témoin de sa générosité.
Il restait responsable de cette femme, et celle-ci avait besoin de vêtements autres que cette robe trop moulante qui attirait l’œil de tous les hommes. Si Einar ne voulait pas passer son temps à la protéger — comme Svend le lui avait ordonné —, il lui fallait des atours plus appropriés.
Il aurait dû cependant se douter, cet après-midi, que toutes celles qui attendaient un enfant se précipiteraient chez Olva pour consulter la nouvelle sage-femme.
Malheureusement, depuis qu’il avait découvert cette Saxonne dans le
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