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La Marque du Temple

La Marque du Temple

Titel: La Marque du Temple Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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téméraires ou quelques chairs en décomposition.
    Nous avions cru que le château ne disposait que d’une citerne qui recueillait les eaux de pluie des gargouilles. Il n’était rien. Et pourtant, la source qui masquait l’entrée du souterrain ne pouvait être bue sans risquer de provoquer quelque dissenterie mortelle en raison de son écoulement dans la cavité souterraine. Sauf à être recueillie, godet par godet. Avant qu’elle ne se déversât dans les puits.
    Lorsque le baron m’avait initié à la mécanique secrète de la trappe, connue seulement de lui et de Michel de Ferregaye, j’avais compris ses réserves pour m’en laisser partager la connaissance avec mes compains de voyage. D’un voyage qui risquait bien de s’achever dans les entrailles de la Terre et de l’eau si nous n’y prenions garde {viii} .
     
     

     
     
    La veille, peu après complies, le baron nous avait priés de lui conter derechef et par le menu les aventures que nous avions vécues, les uns et les autres, depuis l’ordalie qui avait opposé Foulques de Montfort au champion du roi de Chypre, Geoffroy de Sidon, jusqu’à notre retour en la forteresse de Beynac {ix} .
    Lors de notre arrivée, six mois plus tôt, en plein hiver, il est vrai que le baron n’avait prêté qu’une oreille fort distraite au récit sommaire que nous lui avions fait à l’époque.
    Il avait été moult fois plus intéressé par les deux pots à feu, deux bombardes de fer, coulées par un maître forgeron de Venise et par les trois armures de plates dont l’une, celle qui lui revenait, avait été forgée par un maître haubergier de la ville de Solingen. Elles étaient semblables en tous points au harnois plain qui équipait le chevalier de Sidon pendant l’ordalie.
    Il avait soupesé les épées à une main en provenance de Tolède, jaugé leur équilibre au quillon, glissé un doigt sur le fil des lames plus tranchantes que les rasoirs de notre barbier et s’était esclaffé : “Voilà de la belle ouvrage ! Les Têtes de bûche n’auront qu’à bien se tenir !”
    Mais il avait passé plus de temps à admirer le superbe étalon, le pur-sang dont m’avait gratifié la princesse Échive. Il avait apprécié la finesse des membres, caressé l’encolure, vérifié l’absence de suros, mesuré la hauteur au garrot, s’était assuré qu’il n’était ni couronné, ni billardé, qu’il n’émettait pas le moindre souffle de cornage, ni ne s’acculait. L’étalon était très allant et n’avait point d’air. Mais… il n’appréciait pas qu’un autre étalon, tout baron qu’il fut, lui claquât la croupe.
    L’étalon avait henni vivement, tourné l’encolure pour mordre la main de l’impétrant et… exécuté une superbe croupade qui avait mis le baron en joie : “Bertrand, nous ferons saillir à ce coursier quelques bonnes juments normandes : nous donnerons vie à de fabuleux destriers !”
    Or donc, ce soir-là, Foulques de Montfort avait fait le récit de l’ordalie. Le chevalier était peu baveux. J’avais dû intervenir à plusieurs reprises pour compléter son récit, passant outre aux protestations pusillanimes du chevalier.
    Le baron de Beynac avait alors délié les aiguillettes de l’aumônière qu’il portait à sa ceinture et l’avait tendue au chevalier. À ma plus grande surprise, il lui avait baillé mil francs d’or pour le courage dont il avait fait preuve lors de l’ordalie. Une simple division par deux m’apprit ce que valait ma vie aux yeux de mon tuteur : Foulques de Montfort n’avait-il pas combattu pour sauver ses deux écuyers ? Le baron aurait-il lu dans mes pensées ? Il avait précisé aussitôt :
    "Ces mil francs sont le prix que j’attache à la vie de mon filleul, Bertrand Brachet. Vous en déduirez sans peine ce que vaut à mes yeux celle de l’écuyer de la Vigerie, messire de Montfort ?”
    Le chevalier n’avait point fait de commentaire. Il s’était rembruni, se contentant de tapoter de sa main dextre la garde de la dague qu’il portait à la ceinture. Ce geste d’agacement ne nous avait point échappé.
    Je crus savoir pourquoi. Le chevalier de Montfort ne m’avait-il pas avoué, après l’ordalie et sous le sceau du secret, qu’Arnaud de la Vigerie était son fils ? Un fils naturel. Sans me dire du ventre de quelle mère il était sorti. Mais j’ignorais s’il était aoutre ou adulteire. J’avais bien une petite idée derrière la tête. Trop

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