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La Marque du Temple

La Marque du Temple

Titel: La Marque du Temple Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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de caractère qui aurait pu en remontrer à plus d’un. Il mit un bras autour de mes épaules, me conduisit à l’écart et me chuchota :
    « J’ai senti, dès hier au soir, votre attirance pour cette petite lingère et ne saurait vous en blâmer. En vérité, je vous le dis : déflorez sa virginité avant qu’un cuistre ne la prenne de force. Car, si elle n’est de noble naissance, elle a le caractère bien trempé et l’esprit plus droit que toutes ces femelles en fin de race qui nous emburlucoquent pour mieux jeter le citrus lorsqu’elles l’ont pressé.
    « Elle jouit en outre de belles formes, elle a l’esprit délié, de la générosité, du cynisme aussi et du cœur. Autant de qualités contradictoires, dignes d’une reine. Je sens ces choses-là. Enfin, quand je ne suis point partie prenante, vous l’avez compris.
    « Elle vous aime qui plus est, et ne parvient pas à le cacher derrière ses airs d’indifférence. Elle suscite la jalousie de plus d’un à votre encontre.
    « Vous l’avez placée sous votre protection et l’avez fait savoir tantôt, haut et fort. Vous avez bien fait. Gardez-vous cependant vous aussi, car il pourrait bien vous en cuire à l’occasion. Apprenez-lui donc à lire et à écrire. Je pressens chez cette pucelle de grandes vertus et de fortes dispositions. Elle pourrait bien y prendre goût, là où d’aucunes de ces dames n’attrapent que fièvres tierces.
    « Priez donc dame Éléonore de Guirande de l’instruire. La maîtresse du logis est fort savante et grandement patiente. Elle vous serait en outre reconnaissante d’adoucir la réclusion dans laquelle le baron la confine depuis des lustres. Pensez ! Enseigner sa science à une écolière ! Mon discours vous surprendrait-il, messire Brachet ? À voir votre mine déconfite !
    — Non point déconfite, messire chevalier ; permettez-moi d’être toutefois surpris : vos penchants actuels ne me laissaient pas présumer que vous puissiez porter quelque intérêt à mes amours ancillaires ou à l’éducation d’une lingère !
    — Voyez-vous, messire écuyer, je vous ai en estime et, quoique vous puissiez en penser, avec le recul du temps, il est des choses que je sens au bout des doigts, me répondit-il en agitant leur extrémité.
    « Tout comme vous, je suis sensible aux charmes de ces dames. La mienne m’a profondément blessé ; je ne suis point aveugle pour autant et ne dis pas qu’un jour reviendra, peut-être, où…
    « Mais assez parlé de moi. De Marguerite, vous auriez de beaux et solides bâtards bien membrés. Acceptez mon hospitalité en ma modeste maison forte et ne courrez pas d’autres chimères : un jour viendrait où vous aussi seriez déçu.
    — Déçu par qui ? Déçu par quoi ?
    — Vous l’apprendrez bien assez vite.
    — La patience est la fille de la sagesse, se plaît à me rabâcher à tout va messire Pons de Beynac. J’ai déjà ouï ce son de cloche. Je n’en crois pas un mot.
    — Moi non plus. La patience est la fille de l’impuissance. Pas de la sagesse. Vous vous êtes mépris sur mes propos. La sagesse, en ces circonstances, serait de cueillir dès à présent cette rose qui ne demande qu’à réserver son pistil pour vous seul.
    — Je crains que ce ne soit possible, messire de Lebestourac.
    — Et pourquoi donc ?
    — Je suis promis à une autre. »
    Le chevalier éclata de son rire tonitruant, suscitant l’hilarité du capitaine d’armes et des écuyers qui devisaient entre eux et se tenaient discrètement à l’écart sans avoir pu ouïr le moindre mot de notre conversation. Mais le rire de Guillaume de Lebestourac était contagieux. Le chevalier reprit plus bas, les sourcils en accent circonflexe :
    « Promis ? Et par qui ? Et à qui ? Allons, dites-moi tout. Vous n’êtes promis qu’à vous-même, messire Bertrand. Croyez-moi, vous auriez grand tort à écouter la voie de ce que vous croyez être celle de la raison et non point celle de vos sens. Osez me dire tout de gob que les charmes de cette adorable lingère vous laissent indifférent ?
    — Non, il est vrai, mais j’aime d’amour courtois une noble damoiselle », répondis-je de plus en plus tendu. Car, sous couvert de confidences, le chevalier m’entraînait sur des chemins secrets que j’entendais bien taire et je prenais conscience qu’il menait fort adroitement le débat, alors que j’étais censé jouer le rôle du référant de tranquillité, de

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