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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ernest Capendu
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coup son œil hagard lança un éclair d’intelligence, son bras se dressa comme s’il eût voulu repousser une apparition effrayante, elle arracha sa main qu’avait saisie Diégo, poussa un cri aigu qui sembla lui déchirer la poitrine et la gorge, ses joues s’empourprèrent, et elle roula de toute sa hauteur sur le carreau humide. Sa tête heurta en tombant l’angle aigu d’une chaise voisine, et le sang jaillit avec abondance ; puis la jeune fille demeura étendue sans mouvement.
    – Elle m’a reconnu ! s’écria Diégo avec stupeur.
    – Eh non ! répondit tranquillement Pinard en débouchant la seconde bouteille.
    – Elle m’a reconnu, te dis-je ; son regard était lucide lorsqu’elle le fixait sur moi.
    – Tu te trompes, mon cher.
    – Mais cependant…
    – Bah ! elle est comme cela chaque fois qu’elle voit un autre visage que le mien ; ça lui produit de l’effet. La petite n’aime pas le changement.
    – Tu crois ?
    – Parbleu ! j’en suis sûr. Elle s’est fait déjà une demi-douzaine de trous à la tête en se pâmant ainsi lorsqu’un ami venait me visiter et lui adressait la parole pour se distraire.
    Diégo s’était rapproché de la jeune fille, et, se penchant vers elle, il se disposa à la relever pour la prendre dans ses bras.
    – Où faut-il la transporter ? demanda-t-il.
    – Qu’est-ce que tu dis ? répondit Pinard avec un sourire ironique.
    – Je te demande où est son lit, pour l’y porter.
    – Il est là. Et le sans-culotte désigna du geste de la paille à moitié pourrie étendue dans un coin de la seconde pièce, et que la porte restée ouverte permettait d’apercevoir.
    – Ce tas de fumier ? fit Diégo en reculant.
    – Tiens, est-ce que ce n’est pas assez bon pour elle ? Mais ne t’en occupe pas davantage. Laisse-la là ; elle est bien revenue toute seule les autres fois, elle reviendra bien celle-ci encore. Et puis, si elle en meurt, ce sera de la besogne toute faite, car elle commence à m’ennuyer, et un de ces quatre matins je la conduirai à l’entrepôt.
    – Je te défends de le faire ! s’écria l’Italien.
    – Comment dis-tu cela ? fit Pinard en levant son verre à la hauteur de l’œil par ce mouvement familier à tous les buveurs.
    – Je t’ordonne de garder cette jeune fille, reprit Diégo.
    Pinard se mit à rire en se renversant sur le dossier de sa chaise qu’il rejeta en arrière pour être à même de mieux contempler son interlocuteur.
    – Tu oublies nos conventions, dit-il en dégustant à petites gorgées le verre qu’il venait de porter à ses lèvres. Tu oublies ce qui s’est passé entre nous à la baie des Trépassés, le soir où, poursuivi toi-même par Keinec et Jahoua, tu as quitté la route de Brest pour venir me demander asile.
    – Et sans mon arrivée, tu mourais comme un chien dans ton trou, interrompit Diégo.
    – Possible.
    – C’est moi qui t’ai sauvé.
    – Je ne le nie pas ; mais il s’agit d’autre chose. Rappelle-toi, cher ami, qu’Yvonne était devenue folle, et que tu n’avais d’autre parti à prendre que de la noyer en la jetant à la mer, ou de la laisser errer à l’aventure. Or, la raison pouvait lui revenir. Dans ce cas, elle aurait infailliblement donné des renseignements précieux et précis sur ton aimable individualité, comme dit le procureur de la commune ; donc tu ne pouvais la laisser aller. Je t’offris de la garder près de moi. Tu acceptas.
    – Oui.
    – À condition que j’en ferais ce que je voudrais.
    – Mais tu ne devais jamais la tuer.
    – J’ai changé d’avis aujourd’hui.
    – Pourquoi ?
    – Parce que, je te le répète, cela commence à me fatiguer de la trouver toujours en rentrant. Et puis, je l’ai fait assez souffrir ; elle ne sent plus les coups, qu’est-ce que tu veux que j’en fasse ?
    – Je l’emmènerai, et je la placerai chez quelqu’un.
    – C’est cela, pour qu’on la soigne.
    – Eh bien ?
    – Imbécile ! fit Pinard en haussant les épaules ; et si en la soignant on la guérissait ? N’oublie pas que sa folie a été provoquée par une fièvre cérébrale, et que, par conséquent, elle peut revenir à la raison : j’ai pris des renseignements là-dessus.
    – Alors je la garderai près de moi.
    – Pour en faire ta maîtresse, comme tu en as toujours eu l’intention.
    – Quand cela serait ?
    – Impossible.
    – Non !
    – Ne suis-je pas libre ?
    – Non.
    – Corpo

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