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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ernest Capendu
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bruyantes rafales faisaient courber les têtes dénudées des grands arbres plantés sur le quai, et sifflaient aigrement dans leurs branchages noirs. Marcof écoutait toujours avec une attention profonde ; mais par suite d’un phénomène assez commun, le brouillard humide empêchait la perception du son, et ce n’était que lorsque le vent, chassant devant lui la brume, établissait un courant entre la ville et le faubourg, que le marin pouvait saisir ce bruit vague et indescriptible qui avait éveillé sa vigilance. Boishardy n’entendait rien et affirmait à son compagnon qu’il s’était trompé.
    – Ce sont les feuilles mortes tourbillonnant sur nos têtes qui causent par leur froissement ce bruit mystérieux qui vous inquiète, dit-il à voix basse.
    Marcof lui fit signe de garder le silence et se pencha en avant.
    – Encore une fois, dit-il, je vous affirme que je ne suis pas le jouet d’une illusion.
    – Alors, fit Boishardy avec résolution, tenons-nous sur nos gardes ! Au diable ce brouillard qui vient de s’élever et qui nous dérobe les rayons de la lune ! La nuit est tellement noire que l’on ne peut distinguer à deux pas devant soi…
    Marcof l’interrompit en lui saisissant la main :
    – Entendez-vous ? dit-il.
    – Oui, oui… j’entends, cette fois, répondit Boishardy. Qui diable est cela ? On dirait le roulement d’une voiture, et l’on ne distingue pas le bruit des chevaux.
    – Attention ! il me semble voir quelque chose se remuer dans la brume. N’apercevez-vous rien ?
    – Si fait ! je vois une masse confuse qui s’avance rapidement vers nous !
    Boishardy et Marcof saisirent leurs pistolets qu’ils armèrent, et se tinrent préparés en silence à l’événement qui menaçait. Le gentilhomme et le marin ne s’étaient pas trompés : un bruit sourd devenant de plus en plus distinct retentissait sur le quai dans la direction de la ville, et une ombre arrivait effectivement sur eux avec une rapidité véritablement fantastique, car cette ombre épaisse et noire courait sur la terre sans faire entendre autre chose qu’un roulement indescriptible et presque insaisissable. Enfin elle arriva devant la porte de l’auberge, et s’arrêta brusquement.
    – Les chevaux ! s’écria Marcof.
    C’était en effet Keinec conduisant les trois animaux.
    – Tu leur as donc enveloppé les fers avec du foin ? demanda Boishardy en voyant le jeune homme s’élancer à terre.
    – Oui, répondit Keinec ; c’est cette précaution qui m’a retardé, et il est heureux que j’aie employé mon temps à la prendre, sans elle nous étions perdus.
    – Comment cela ? demandèrent les deux hommes.
    – Je vous l’expliquerai plus tard, messieurs ; mais d’abord à cheval et piquons ! Il y va de notre salut.
    – Que s’est-il donc passé ?
    – Vous le saurez. À cheval ! à cheval !
    L’accent avec lequel Keinec prononça ces paroles était tellement pressant, que toute hésitation devenait impossible. Puis les deux chefs savaient le jeune homme trop brave pour s’effrayer d’un danger vulgaire. Ils sautèrent donc lestement en selle.
    – Regardez ! fit Keinec en se retournant.
    Les rayons de la lune glissant sous un nuage percèrent en ce moment l’opacité du brouillard, et éclairèrent d’une lueur pâle une partie du quai. Marcof et Boishardy, imitant le mouvement de leur compagnon, purent alors distinguer au loin des piques et des baïonnettes qui s’avançaient en silence. Les cavaliers rendirent la main et les chevaux partirent. Grâce au foin qui entourait les sabots de leurs montures, le bruit du galop s’amortissait de telle sorte qu’il était évident qu’il serait absorbé par celui que faisaient les pas des sans-culottes.
    – Nous sommes donc découverts ? demanda Marcof.
    – Oui, répondit Keinec.
    – Tu en es sûr ? ajouta Boishardy.
    – J’ai entendu l’ordre que l’on donnait de nous traquer dans l’auberge.
    – Et qui donnait cet ordre ?
    – Celui qui a découvert notre présence dans la ville.
    – Le connais-tu ?
    – Oui.
    – Quel est-il ?
    – Ian Carfor !
    – Ian Carfor ! répéta Marcof en arrêtant son cheval par une saccade si brusque que l’animal plia sur ses jarrets de l’arrière-train ; Ian Carfor, dis-tu ? Ce misérable est donc à Nantes ?
    – Oui.
    – Tu l’as vu ?
    – Je l’ai vu.
    – Et tu ne l’as pas tué ?
    – Je me serais fait massacrer sans pouvoir vous

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