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La mort du Roi Arthur

La mort du Roi Arthur

Titel: La mort du Roi Arthur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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n’existe dans le monde entier d’aussi vaillante dame que la reine Guenièvre. Et j’ai, quant à moi, si haute opinion de ses mérites que je suis venu tout armé, bien résolu à défendre sa cause au cas où il se trouverait vraiment quelqu’un pour l’accuser. »
    À ces mots, Mador de la Porte s’avança : « Seigneur chevalier, dit-il, je suis prêt à prouver que la reine a tué mon frère Gahéris de Karaheu par grande traîtrise et déloyauté. – Et moi, riposta Lancelot, je suis prêt à prouver qu’elle n’a jamais eu la moindre intention de commettre ni traîtrise ni déloyauté. » Sans rien répliquer, Mador tendit son gage au roi, Lancelot de même, et Gauvain dit alors à Yvain qui se tenait à ses côtés : « Je croirais volontiers que Mador a cherché là mauvaise querelle car, quoi qu’il en soit de la mort de son frère, je serais prêt à jurer sur les saintes reliques que ce chevalier sait que la reine est innocente. Il ne se serait pas sans cela lancé dans cette aventure ! – Tu as raison, répondit Yvain, et j’ai moi aussi l’impression que Mador de la Porte pourrait regretter de s’être entêté à faire condamner la reine. »
    Les gens commencèrent alors à vider la salle et se rendirent dans la prairie, où se déroulaient habituellement, devant la forteresse, les combats, tandis que Gauvain se chargeait de la lance du chevalier, Bohort de son bouclier, et que Lancelot, remonté à cheval, se dirigeait vers la lice. Pendant ce temps, Arthur fit venir Guenièvre et lui dit : « Reine, voici un chevalier qui va s’exposer à la mort pour te défendre. Mais sache que s’il est vaincu, c’en est fait de toi. – Seigneur, que Dieu me fasse droit, car je n’ai commis ni déloyauté ni traîtrise. »
    Dès qu’ils furent au milieu du pré, les deux adversaires s’élancèrent l’un contre l’autre de toute la vitesse de leurs montures. Ils s’affrontèrent et se frappèrent si violemment que ni bouclier ni haubert ne purent les préserver de nombreuses blessures, et Mador finit par tomber à terre, aussi meurtri que peu rassuré, car il avait manifestement affaire à un jouteur hors du commun. Cependant, quand Lancelot le vit démonté, il se dit que l’attaquer à cheval risquerait de le faire blâmer. Aussi descendit-il de son destrier et, aussitôt qu’il eut dégainé, tout en se protégeant la tête de son bouclier, il attaqua Mador avec tant de fermeté que celui-ci, quitte à se défendre du mieux possible, et à s’efforcer de multiplier les coups offensifs, en vint à sérieusement s’alarmer.
    Or, toute sa valeur ne lui profita guère car, dès avant l’heure de midi, Lancelot l’avait tellement malmené qu’il lui avait fait jaillir le sang du corps en plus de dix endroits et si bien épuisé que tous les assistants ne doutèrent plus que Mador n’eût le dessous et ne dût périr si son adversaire voulait se battre jusque-là. Et tous applaudirent avec d’autant plus d’enthousiasme le chevalier inconnu qu’ils n’avaient jamais vu de combattant plus vaillant. Or, Lancelot connaissait bien Mador et n’avait nulle intention de le tuer. Se souvenant qu’ils avaient été bien des fois compagnons d’armes, il lui dit : « Mador, tu es vaincu, tu es honni si je le veux, et force t’est d’admettre que tu es mort si nous prolongeons le combat. Aussi te conseillé-je de renoncer à ton accusation avant qu’il ne soit trop tard. Je ferai en sorte que la reine te pardonne, et le roi te rendra ton gage. »
    En s’entendant proposer de la sorte et la liberté et la vie, Mador de la Porte ne fut pas sans reconnaître en son adversaire Lancelot du Lac en personne. Il se mit à genoux devant lui et, lui tendant son épée : « Seigneur, dit-il, prends mon épée. Je me mets entièrement à ta merci, et sache bien que je n’en éprouve nulle honte, car je n’oserais me mesurer à un homme aussi vaillant que toi. » Puis il dit au roi qui s’était approché : « Roi Arthur, tu m’as bien abusé en me donnant à affronter Lancelot du Lac ! »
    Lorsque le roi comprit que le chevalier inconnu était Lancelot, il en ressentit une grande joie et, s’avançant vers lui, lui donna l’accolade. Gauvain, qui survint sur ce, lui délaça son heaume. Et tous les assistants manifestèrent à nouveau leur enthousiasme. La reine fut déclarée quitte de l’accusation portée contre elle par Mador. Et si elle avait été courroucée

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