La mythologie : Ses dieux, ses héros, ses légendes
eux comme l’un des leurs. Et c’est ainsi que par ruse et fourberie et
quelques larmes hypocrites furent vaincus ceux dont le grand Diomède n’avait
jamais pu triompher, ni le bouillant Achille, ni dix ans de guerre et un
millier de vaisseaux. Car Sinon n’eut garde d’oublier la seconde partie de son
conte. Le cheval de bois avait été construit en offrande votive à Athéna,
dit-il, et si on lui avait donné une si grande taille, c’était pour décourager
les Troyens de l’introduire dans leur cité. Les Grecs espéraient que les
Troyens le détruiraient et détourneraient ainsi sur eux la colère d’Athéna. Par
contre, placé dans la cité, il attirerait la faveur de la déesse sur les
Troyens. L’histoire en elle-même semblait suffisamment plausible pour obtenir
l’effet souhaité, mais Poséidon, qui de tous les dieux était le plus acharné
contre Troie, y apporta par surcroît de quoi rendre l’issue certaine. Dès la
découverte du cheval, le prêtre Laocoon avait instamment conseillé aux Troyens
de le détruire. « Je crains les Grecs et leurs présents », leur
dit-il. Et Cassandre, la fille de Prima, lui avait fait écho – mais personne ne
l’écoutait jamais et elle s’était retirée dans le palais avant que Sinon ait
commencé son discours, que Laocoon et ses deux fils écoutèrent avec
méfiance ; ils étaient toutefois seuls à douter. Lorsque Sinon s’arrêta de
parler, deux serpents affreux surgirent soudain de la mer et nagèrent jusqu’à
la grève ; ils rampèrent droit sur Laocoon, ils se lovèrent en larges anneaux
autour du prêtre et de ses deux fils et les étouffèrent. Puis ils disparurent
dans le temple d’Athéna.
Il n’y avait plus à hésiter. Pour les spectateurs horrifiés,
Laocoon avait été puni de s’être opposé à l’entrée du cheval dans la cité – ce
que personne, certainement n’osait plus refuser à présent. Tout le peuple cria :
Faites entrer l’image sculptée,
Menez-la devant Athéna
Car c’est un don digne de l’enfant de Zeus.
Parmi les jeunes gens, y en eut-il un seul qui
ne s’élançât ?
Un seul parmi les anciens à rester dans sa
demeure ?
Dans l’allégresse et en chantant, ils firent
entrer la mort,
La trahison et la ruine.
Ils s’attelèrent au cheval, lui firent passer la porte et le
traînèrent jusqu’au temple d’Athéna. Alors, jubilant de leur heureuse fortune, persuadés
que la guerre avait pris fin et que la faveur d’Athéna leur était acquise, pour
la première fois depuis dix ans ils regagnèrent en paix leurs logis.
Au creux de la nuit, par une brèche dans le cheval, l’un
après l’autre les Chefs se laissèrent glisser au sol. Ils se faufilèrent jusqu’aux
portes de la ville qu’ils ouvrirent toutes grandes, et l’Armée Grecque entra
dans la cité endormie. Leurs premières tâches pouvaient être accomplies en
silence. Des incendies furent allumés un peu partout ; et quand enfin les
Troyens s’éveillèrent, avant qu’ils aient eu le temps de comprendre ce qui se
passait et de revêtir leurs armures, Troie était en flammes. Un à un, dans le
plus grand désordre, ils se précipitèrent dans les rues. Des bandes de soldats
les y attendaient, prêts à frapper chacun avant qu’il pût se joindre aux autres.
Ce n’était plus un combat, mais une boucherie. Beaucoup moururent avant même d’avoir
pu échanger un coup. Dans les quartiers les plus lointains, les Troyens
parvinrent à se regrouper ici et là, et c’était alors au tour des Grecs de
souffrir. Ils se voyaient assaillis par des hommes désespérés qui ne pensaient
qu’à tuer avant de mourir eux-mêmes. Tous savaient que pour le vaincu le seul
salut était de n’en espérer aucun et cette disposition transformait souvent les
vainqueurs en vaincus. Parmi les Troyens, ceux qui avaient l’esprit le plus
prompt se hâtèrent d’échanger leurs propres armures contre celles des Grecs
tombés et nombreux furent les Grecs qui crurent rejoindre des amis et
découvrirent trop tard qu’il s’agissait d’ennemis ; ceux-là payèrent leur
erreur de leur vie.
Du haut de leurs maisons, les Troyens arrachaient les toits
pour le jeter sur les Grecs. Une tour entière, qui surplombait la terrasse du
palais de Priam, fut soulevée de ses fondations et culbutée sur les assaillants.
Exultants, les défenseurs la virent tomber et anéantir une troupe nombreuse qui
forçait les portes du palais. Mais ce succès n’amena
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