La mythologie : Ses dieux, ses héros, ses légendes
leur permettrait d’atteindre au plus vite l’armée Etrusque et de la
rallier à leur cause.
Entre-temps, le camp troyen – fortifié seulement par des
murs de terre et privé de son chef et de ses meilleurs guerriers – subissait
des assauts furieux. Turnus l’attaquait en force. Le premier jour, les Troyens
se défendirent avec succès en suivant les ordres très stricts qu’Enée leur
avait laissés avant son départ et qui leur interdisaient de passer à l’offensive,
sous quelque prétexte que ce fut. Mais l’ennemi les surpassait en nombre et les
perspectives étaient sombres ; il aurait fallu pouvoir prévenir Enée de ce
qui se passait, mais était-ce possible ? Les Rutules encerclaient tout le
camp. Deux hommes cependant se proposèrent, deux hommes qui refusaient de peser
les chances de réussite ou d’échec et pour lesquels l’extrême danger de la
tentative était une raison de plus de l’entreprendre. Ces deux-là résolurent
d’essayer de traverser les lignes ennemies sous le couvert de la nuit et de
rejoindre Enée.
Ils s’appelaient Nisus et Euryale ; le premier était un
guerrier vaillant et réputé, le second seulement un adolescent mais tout aussi
brave que l’autre et plein d’une généreuse ardeur pour les hauts faits
héroïques. Ils avaient pour habitude de combattre côte à côte ; partout où
on voyait l’un, que ce soit de garde ou sur un champ de bataille, on était sûr
de trouver l’autre. Ce fut Nisus qui le premier eut l’idée de la grande
entreprise ; tandis qu’il regardait par-dessus les remparts, il observa
que les feux ennemis étaient bien clairsemés dans le camp où régnait un profond
silence, un silence d’hommes endormis. Il fit part de son plan à son ami mais
sans penser un instant que celui-ci l’accompagnerait, et il ne ressentit
qu’angoisse et chagrin quand le jeune garçon s’écria que jamais il ne
consentirait à rester en amère, que la mort dans une tentative aussi glorieuse
lui paraissait mille fois préférable à la vie. « Laisse-moi y aller
seul », implora Nisus. « Si les choses devaient tourner à notre
désavantage – et dans une telle aventure, il y a beaucoup à parier qu’elles le
feront – tu serais là pour payer ma rançon ou me rendre les honneurs funèbres.
Tu es beaucoup trop jeune ; sou-viens-toi que la vie t’attend. »
« Propos oiseux », répondit Euryale. « Partons sans plus de
délais. » Nisus comprit qu’il était inutile de tenter de le persuader et
tristement, il céda.
Ils trouvèrent les chefs troyens tenant conseil et ils leur
exposèrent leur plan, qui fut accepté d’emblée ; et les princes, avec des
larmes dans la voix, les remercièrent et leur promirent de somptueuses
récompenses. « Je n’en veux qu’une seule », dit Euryale. « Ma
mère se trouve ici dans le camp. Elle n’a que moi au monde et pour me suivre,
elle n’a pas voulu rester en arrière avec les autres femmes. Si je
meurs… » « Elle sera ma mère », interrompit Ascagne. « Elle
remplacera la mère que j’ai perdue pendant la dernière nuit de Troie, je t’en
fais le serment. Et prends ceci, ma propre épée. Elle ne te faillira
pas. »
Tous deux se mirent en route ; ils traversèrent les
fossés puis approchèrent du camp ennemi. Le sol était jonché d’hommes endormis.
Nisus chuchota : « Je vais nous frayer un chemin. Et toi, monte la
garde. » Et il tua un homme après l’autre, avec tant d’art que pas un ne
proféra un son en mourant. Pas un râle ne donna l’alarme. Euryale prit bientôt
part à cette besogne sanglante. Quand ils atteignirent l’extrémité du camp,
celui-ci semblait traversé de part en part par une grande route jalonnée de
cadavres. Mais ils avaient eu tort de s’attarder. L’aube se levait ; une
troupe de cavaliers venant du Latium aperçut l’éclair du casque d’Euryale et
interpella le jeune homme. Comme il continuait à avancer sans répondre parmi
les arbres, ils surent qu’ils avaient affaire à un ennemi et ils encerclèrent
le bois. Dans leur hâte, les deux amis furent séparés et Euryale se trompa de
sentier. Nisus, fou d’inquiétude, retourna sur ses pas pour le retrouver.
Invisible lui-même, il vit son ami aux mains des soldats. Comment le
secourir ? Il était seul, aucun espoir ne lui était permis et cependant il
savait que mieux valait tout tenter et mourir plutôt que l’abandonner. Il
combattit donc, un homme contre toute une
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