La naissance du roi Arthur
les Écritures ne disent rien
des paroles prononcées par Jésus dans la prison de Joseph d’Arimathie. Ils en
avaient seulement entendu parler, et ils ne voulaient rien mettre par écrit qui
ne fût dûment établi, rien dont ils n’eussent été les témoins. Mais ces
choses-là ont été cependant recueillies dans le haut livre du Graal.
Joseph demeura longtemps dans sa prison, à l’intérieur de la
tour. Au temps où Titus régnait à Rome, son fils Vespasien fut atteint d’une
étrange maladie, une lèpre si puante que même ceux qui l’aimaient tendrement ne
pouvaient s’en approcher tant l’odeur était épouvantable. On avait dû
l’enfermer dans une chambre de pierre, dans un endroit retiré du palais, et on
lui passait sa nourriture et sa boisson au bout d’une pelle, à travers une
petite fenêtre que l’on refermait aussitôt après. Et l’empereur en menait grand
deuil, car Vespasien était son fils unique. Et il fit savoir à travers tout
l’empire qu’il accorderait honneurs et richesses à celui qui pourrait guérir
Vespasien de sa maladie [37] .
Or il y avait à Rome, au même moment, un homme riche et sage
qui avait passé la plus grande partie de sa vie à voyager à travers tous les
pays. Il s’était trouvé en Judée au moment où Jésus-Christ était encore de ce
monde, et il avait été témoin des grands miracles que celui-ci avait accomplis
en chassant les démons, en guérissant les lépreux et en rendant la vue aux
aveugles. Cet homme était hébergé chez un familier de l’empereur, et un soir
qu’ils parlaient entre eux, le voyageur raconta à son hôte ce qu’il avait vu et
entendu au cours de son séjour en Judée. L’hôte fut très intéressé, et, le
lendemain, il se rendit en hâte auprès de l’empereur pour lui faire savoir tout
ce qu’il venait d’apprendre. L’empereur fit immédiatement venir le voyageur et
lui demanda des précisions sur ce Jésus-Christ qui avait un si grand pouvoir et
de si hautes vertus. Mais quand le voyageur lui raconta que ce prophète avait
été mis à mort sur la croix par ordre du bailli Pilate, l’empereur entra dans
une violente colère. Puis il convoqua ses conseillers, faisant répéter devant
eux son récit au voyageur. Parmi les conseillers, il y avait un ami de Pilate,
qui savait bien ce qui s’était passé : il dit à l’empereur que si Jésus
avait été supplicié, c’était par la volonté du grand prêtre et des Juifs et non
par décision du bailli. Il raconta comment les Juifs avaient dit :
« Que son sang retombe sur nous ! », et comment Ponce Pilate
s’était lavé les mains en assurant qu’il n’était aucunement responsable de la
mort de ce juste. Mais il n’en était pas moins vrai que Jésus était mort, et l’empereur
en concevait un amer chagrin parce qu’ainsi s’évanouissait l’espoir de voir
guérir son fils.
Mais le conseiller qui avait été l’ami de Pilate reprit la
parole : « Ne sois pas irrité ni anxieux, seigneur. Si ce que raconte
ce voyageur est exact, et même si le prophète Jésus est mort, il doit encore se
trouver en Judée des objets ou des vêtements qui lui ont appartenu ou qu’il a
simplement touchés. Il faut savoir que si un homme a des pouvoirs
extraordinaires sur les choses, ces pouvoirs sont parfois répandus sur des
objets. Tous nos sages l’ont affirmé, et il est impossible que ce Jésus n’ait
point laissé quelque chose qui soit encore imprégné de lui-même. Envoie des
messagers en Judée et dis-leur de rechercher, par tout le pays, s’il n’y a pas
un objet, un linge ou quoi que ce soit, qui ait été touché par le prophète. Je
suis persuadé que ton fils serait guéri par le simple contact de cet
objet. »
Le conseil plut grandement à l’empereur Titus. Il alla
parler à son fils, par la fenêtre de la chambre de pierre. Il lui fit le récit
complet de ce qu’il venait d’entendre. Vespasien, qui n’attendait plus que la
mort, fut transporté de joie et ne sentit plus l’âpreté de sa souffrance, et il
pria son père d’envoyer le plus tôt possible des messagers en Judée pour
s’enquérir du prophète Jésus. C’est ce que fit immédiatement l’empereur,
donnant à ses messagers des lettres scellées à l’intention du bailli de Judée.
Quand il reçut les lettres, le bailli fit savoir par tout le pays qu’il voulait
s’entretenir avec quelqu’un qui aurait en sa possession un objet que Jésus
aurait pu toucher. Et peu
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