La naissance du roi Arthur
Et cette émeraude tomba dans le
jardin d’Éden, aux pieds d’Adam qui, étonné d’une si grande merveille, la
ramassa et la garda toujours près de lui, l’emportant même lorsque, avec Ève,
il fut chassé du Paradis, la transmettant à ses fils et aux fils de ses fils.
Et il arriva un jour qu’un des descendants d’Adam, émerveillé par la couleur de
l’émeraude, la fit tailler en forme de coupe. Ce descendant d’Adam avait nom
Simon le Lépreux, et c’est dans sa maison que Jésus prit son dernier repas avec
ses disciples et institua la sainte Eucharistie [35] .
Le jour où Jésus vint dans la maison de Simon le Lépreux,
avec ses douze disciples, afin de manger l’agneau pascal, Judas, qui était le
trésorier des douze, était là, lui aussi, parmi les autres. Et pourtant, dans
sa malignité, il avait déjà trahi Jésus, promettant au grand prêtre des Juifs
de le livrer aux soldats romains quand le moment serait venu. Car Judas avait
droit à une dîme sur tout l’argent dont pouvaient disposer Jésus et les douze.
Et Judas était courroucé parce que, chez Marthe et Lazare, Marie de Magdala
avait usé d’un parfum précieux dont il était le dépositaire et en avait oint
les cheveux et les pieds de Jésus. Judas avait estimé être lésé par cette
femme, et par Jésus lui-même qui l’avait laissé agir.
C’est pourquoi il voulait se venger, récupérant par là même
la somme importante qu’il avait perdue par l’insouciance de Jésus et la
frivolité de cette Marie qu’il méprisait pour sa vie dissolue, mais qu’il
enviait à cause de sa fortune, elle qui possédait la presque totalité de la
ville de Magdala. Donc, le jeudi qui précédait la Pâque, lorsque Jésus vint
dans la maison de Simon le Lépreux pour y partager le repas avec ses disciples,
Judas le fit savoir aux ennemis de Dieu. Ceux-ci se hâtèrent, bien armés, et
ils entrèrent de force dans la maison [36] .
Alors, le traître, comme il en était convenu avec le grand
prêtre et tous ceux qui avaient décidé la mort de Jésus, s’approcha de lui et
lui donna un baiser. Aussitôt, les soldats se saisirent du fils de Marie,
tandis que Judas s’écriait : « Tenez-le bien, et prenez garde qu’il
ne s’échappe, car il est très fort ! » Mais Jésus ne résista pas et
on l’emmena, chargé de chaînes. Or, pendant qu’on l’emmenait ainsi, l’un des
soldats qui avait vu sur la table la magnifique coupe d’émeraude qui avait
servi à Jésus s’en saisit et la dissimula dans les plis de son vêtement dans
l’intention de l’offrir à son maître, le bailli des Romains, qui avait nom
Ponce Pilate.
C’est précisément devant Ponce Pilate que Jésus fut conduit,
car il avait la haute main sur toute la justice de la Judée en ce temps-là. Et
les Juifs, remplis de haine, demandèrent au bailli d’ordonner qu’on mît à mort
l’homme qui lui était présenté. Mais Ponce Pilate leur répondit qu’il ne voyait
aucune raison pour condamner Jésus. « Que pourrais-je dire à Tibère, mon empereur
qui est à Rome, s’il m’oblige à justifier la mort de cet homme ? »
Telles furent les paroles de Pilate. Mais les Juifs insistèrent tant auprès de
lui qu’il demanda un vase rempli d’eau pour se laver les mains. Alors, le
soldat qui avait pris la coupe dans la maison de Simon alla la remplir d’eau et
la tendit à Pilate. Il y trempa les doigts en disant : « Je ne suis
pas responsable du sort de cet homme. Si vous voulez sa mort, qu’il en soit
fait selon votre volonté. »
Cependant, Pilate avait à son service un Juif de bonne
famille qui avait nom Joseph d’Arimathie et qui était le connétable de sa
maison. Pilate le respectait et l’admirait, car Joseph était intègre et faisait
le bien autour de lui. Et Joseph, sans que personne ne le sût, était un
disciple de Jésus, et il croyait que celui-ci était bien le fils de Dieu, venu
sur cette terre pour sauver les hommes du péché commis par Adam et Ève. Et
quand il eut appris la mort de Jésus, Joseph d’Arimathie fut bouleversé par le
chagrin. Il s’en vint trouver Ponce Pilate et lui dit : « Seigneur,
je t’ai servi longuement, moi et les hommes qui sont à mon service, et jamais
tu ne m’as donné quoi que ce soit pour me récompenser. » Pilate fut très
confus, car il se sentait coupable d’ingratitude envers le preux Joseph. Il lui
répondit : « Demande-moi ce que tu veux et je te l’accorderai. »
« Je
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