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La naissance du roi Arthur

La naissance du roi Arthur

Titel: La naissance du roi Arthur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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leur permettraient d’acquérir
des territoires dans cette île de Bretagne qu’ils convoitaient tant.
    Car les temps étaient rudes et chacun devait lutter pour
sauvegarder sa vie et ses biens, chacun devait se méfier de son voisin toujours
prêt à profiter de la moindre faiblesse. Les chefs se retranchaient dans leurs
forteresses et se surveillaient sans cesse, tandis que les paysans, dans leurs
villages, avaient bien du mal à garder leurs troupeaux et à cultiver leurs
champs. Il n’était pas rare qu’on vînt leur dérober leur bétail ou que leurs
champs fussent saccagés par des combattants plus enragés que des loups féroces.
De pillage en pillage, d’incendie en incendie, le royaume devenait la proie des
vautours qui s’abattaient sur lui, et quand les plaintes du peuple parvenaient
jusqu’au roi Uther, celui-ci ne pouvait même pas intervenir tant son rôle de
chef protecteur le contraignait à combattre lui-même contre d’implacables
ennemis.
    Merlin savait tout cela, et Taliesin aussi, qui se trouvait
auprès de lui, dans la forêt de Kelyddon où tous deux dictaient à l’ermite
Blaise les hauts faits du passé et les espérances de l’avenir. Un jour,
Taliesin dit à Merlin : « Depuis que je suis dans cette vie, je n’ai
plus que le pouvoir de connaître ce que les autres ne connaissent pas, je n’ai
plus que le pouvoir de la parole. Je sais endormir ou réveiller une assemblée,
je sais rétablir la justice quand elle est bafouée, je sais parfois apaiser une
querelle, me placer au milieu d’une bataille et supplier les combattants de
renoncer à leur folie. Mais je n’ai plus le pouvoir que j’avais lorsque j’étais
Gwyon le Petit, lorsque je savais transformer mon aspect et celui des autres.
Ainsi en est-il pour moi. Mais toi, Merlin, non seulement tu as connaissance du
passé, du présent et de l’avenir, mais tu as également le pouvoir de
transformer les êtres et les choses. Ne peux-tu donc rien contre le mal, contre
la souffrance et la mort ? »
    « Non, Taliesin, répondit Merlin. Je ne peux rien
contre la souffrance et la mort, et c’est tout juste si je peux parfois
m’opposer au mal quand je sens que celui-ci menace d’envahir le monde.
D’ailleurs, qu’est-ce que le mal et qu’est-ce que le bien ? On agit
parfois pour le bien et la conséquence en est le mal. De même, il est parfois
nécessaire d’accomplir ce qu’on pense être un mal pour parvenir à ce qu’on
appelle un bien. Cela, je le sais mieux que quiconque, puisque j’ai été
engendré par l’esprit du Mal, par l’Ennemi, et si Dieu ne m’avait pas arraché à
mes origines, je sais bien que je répandrais mort et désolation par la terre
entière. N’ai-je point été engendré pour cela ? »
    « Cependant, reprit Taliesin, il me semble que tu
pourrais intervenir au milieu de ces luttes incessantes et réconcilier ceux qui
se heurtent avec tant de violence. » Merlin répondit : « Certes,
je le pourrais, mais à quoi cela servirait-il ? Une querelle apaisée, une
autre se lèverait. Sache, Taliesin, que la destinée des humains est tout
entière fixée dans un plan que seul connaît Dieu. Et si j’ai conscience de ce
qui peut arriver dans l’avenir, c’est toujours une vision incomplète qui vient
à mon esprit. Et, comme tous les humains, je mourrai, et je ne connais ni le
moment ni les circonstances de ma propre mort. Il en est de même pour la
destinée du royaume : je sais qu’il disparaîtra un jour, je sais même que
cette disparition sera causée par une lutte à mort entre le père et le fils,
mais je ne pourrai rien empêcher. On ne peut rien contre la mort, Taliesin,
parce que la mort n’est que le milieu d’une longue vie. »
    Pendant que Merlin parlait ainsi et que Taliesin l’écoutait attentivement,
l’ermite Blaise écrivait sur de grands parchemins qu’il mettait ensuite à
l’abri dans des coffres de pierre. Merlin dit à Blaise : « Voici
encore un récit que tu devras conserver pour les générations futures, et ce
récit, c’est Taliesin qui va le faire, car il le connaît lui aussi, et il faut
que tu saches, Blaise, que je ne serai pas toujours là près de toi et que
Taliesin est aussi capable que moi de raconter les événements des temps
aventureux. » Alors Taliesin prit la parole et l’ermite Blaise transcrivit
fidèlement son récit [76] .
    Il y avait, en des temps lointains, un roi du nom de Brân
Vendigeit, c’est-à-dire le Béni.

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