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La nièce de Hitler

La nièce de Hitler

Titel: La nièce de Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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qu’un complot contre la Constitution du Reich n’est
pas considéré comme un crime grave en Bavière » – et à laquelle le prisonnier
opposait une plaisanterie vulgaire et assez facile sur la constitution de la
reine. Dès qu’ils sont livrés à eux-mêmes, pensa Angela, les hommes
redeviennent des gosses. Elle se retourna en entendant sa fille s’exclamer :
    — Tu parles d’un butin !
    Geli aussi avait retiré son chapeau. Un sucre
d’orge rose dans la bouche, elle s’était emparée d’une mandoline qui se
trouvait là et plaquait un accord avec un plectre.
    — Nous avons été bien trop respectueuses
de la loi, maman.
    — Tu penses que nous devrions échanger
nos places ?
    — Pas toi ?
    — Nous serions dans l’atelier de couture,
ici. Nous ferions la plonge. Adolf a toujours eu le chic pour obtenir un
supplément de considération.
    Un homme grand, farouche et empressé, habillé
de loden vert comme pour une randonnée, passa la tête par la porte de la pièce
où Hitler parlait.
    — Vous êtes les Raubal ?
    — Oui.
    Angela aperçut Adolf qui pérorait avant que l’homme
referme doucement la porte derrière lui. Il lui tendit la main.
    — Herr Rudolf Hess, dit-il. Son secrétaire
particulier.
    Il lui serra la main énergiquement tout en s’inclinant
avec cérémonie. Puis il fit de même pour Geli.
    Elles eurent l’impression d’être des officiers
prussiens de retour du front. Elles donnèrent toutes deux leur prénom.
    — Le Führer confère avec le comte
Rudinski, dit Hess, comme si elles devaient forcément connaître ce nom. Mais
asseyez-vous, je vous en prie.
    Ce qu’elles firent, et lui aussi, croisant les
jambes sur ses cuisses de façon efféminée, mais gardant le buste bien droit d’un
air de suffisance rigide, la tête à la mâchoire carrée bien haute. Ses tempes
commençaient à se dégarnir, mais ses cheveux noirs retombaient de son front en
vagues que les femmes n’obtiennent qu’à l’aide d’un fer à friser. Angela n’avait
jamais vu de tels sourcils, lourds comme des objets, qui voilaient ses orbites
d’une ombre si épaisse que ses iris semblaient deux cailloux marron tombés dans
la neige. Sa bouche n’était qu’une longue ligne mince, les lèvres
hermétiquement serrées pour cacher les dents protubérantes qui le privaient de
cet air intellectuel tant désiré.
    — Vous voulez quelque chose à manger ?
proposa-t-il, mal à l’aise devant le silence des deux femmes.
    — Il nous faudrait un camion ! s’exclama
Angela.
    Geli se mit à rire, la main devant la bouche.
    Hess eut un vague sourire, semblant ne pas
avoir compris la plaisanterie, puis il saisit un cervelas de Thuringe comme
pour le soupeser.
    — On nous envoie ces cadeaux, alors je
sais que tout n’est pas perdu. Le parti est interdit en Allemagne à présent, Hitler
n’a pas le droit de parler, la hiérarchie est en pleine confusion, pourtant
nous trouvons dans l’opinion publique un tel sentiment favorable que nous ne
pouvons que considérer notre séjour en prison comme une légère interruption
dans notre marche héroïque vers la destinée.
    — On croirait entendre Adolf.
    — Vous me flattez, répondit Hess.
    Puis, comme tout nazi qui se respecte, il se
mit à discourir sur lui-même, racontant qu’il était né en Égypte à Alexandrie, cinq
ans après Hitler, qu’il était le fils d’un importateur en gros. Il avait fait
des études de commerce en Suisse, et travaillé à Hambourg pour sa famille. Puis
l’archiduc et sa femme avaient été tués à Sarajevo, et il était devenu
lieutenant et chef de troupe de choc dans le 1 er régiment bavarois avant
de rentrer dans l’aviation. Après l’armistice, comme le commerce ne l’intéressait
plus, il s’était inscrit à l’université de Munich où il avait eu la chance de
rencontrer son mentor Herr Professor Karl Haushofer du département de
géopolitique, l’auteur de la théorie du Lebensraum.
    Elle n’en avait pas entendu parler.
    — Tout simplement que l’avenir d’un pays
comme l’Allemagne, dominant culturellement mais manquant d’espace, nécessite l’annexion
d’États de l’Europe orientale.
    — Je vois.
    Enfin bref, en 1920, un millionnaire allemand
réfugié au Brésil, qui aimait encore beaucoup son pays, avait décidé d’allouer
une grosse somme d’argent au lauréat de la meilleure dissertation sur le thème :
« Comment doit être constitué l’homme qui ramènera

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