Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La nièce de Hitler

La nièce de Hitler

Titel: La nièce de Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
Vom Netzwerk:
ravisa et gravit l’escalier attenant à la droguerie, la porte d’entrée
n’étant pas fermée à clé. Geli ôta ses chaussures pour marcher tout doucement
jusqu’à l’appartement d’Hitler. Elle ne pouvait pas regarder par le trou de la
serrure, mais elle s’accroupit devant une porte fraîchement repeinte et
entendit son oncle raconter de sa voix de baryton sa première déception avec le
parti en 1920 et sa décision fatidique de s’inscrire quand même. Puis il
enchaîna sur ses premiers succès oratoires, sa volonté inébranlable devant l’opposition,
comment il avait rallié ses ennemis grâce à la force de sa personnalité et de
ses idées révolutionnaires. Et il n’arrêtait pas, essayant de la séduire comme
il séduisait les foules, faisant l’historique du mouvement national-socialiste
tandis que la starlette, visiblement lassée, se contentait de ponctuer son
discours par des « oh ! » ou « je vois… ». Puis Hitler
interrompit sa conférence.
    — Voulez-vous vous déshabiller pour moi ?
    Et, fait encore plus extraordinaire, l’actrice
sembla acquiescer, prononçant une quelconque phrase d’acceptation d’une voix
mélodieuse, et se déplaçant d’un pied sur l’autre pour enlever ses chaussures à
hauts talons.
    Continuant son discours d’autosatisfaction, Hitler
ne s’interrompait que de temps en temps pour dire « Vous êtes ravissante »,
et « Oui, ça aussi » ou « Lentement, s’il vous plaît ». À
part un « Dégrafez-moi », la starlette ne parla pas, ou alors si
doucement qu’on ne pouvait l’entendre.
    — Venez vers moi à présent, dit Hitler.
    Il y eut un bruit de voix dehors, et Geli vit
Frau Maria Reichert, la logeuse, devant la porte d’entrée vitrée, un châle de
laine serré autour de son cou, qui aidait sa frêle vieille Mutti à
entrer et à monter l’escalier. De gros flocons voletaient comme des morceaux de
papier. La vieille dame dut demander l’heure, car Frau Reichert dit « Minuit »,
et Geli passa devant les deux femmes en faisant claquer ses talons, les saluant
d’un Grüss Gott.
    Elle accrocha le vison dans le vestibule et
trouva Hugo Bruckmann en pyjama dans le salon, qui présentait une allumette
dans le fourneau d’une pipe de calebasse. Elle fut contente de voir qu’il n’était
pas d’humeur à faire la conversation, et que la princesse Cantacuzène dormait
en faisant la moue, les yeux protégés par un masque, la porte entrouverte, une
veilleuse allumée comme elle l’exigeait depuis l’enfance – pour se protéger des Wichtelmänner, qui volent les enfants dans leur lit et leur en substituent
d’autres.
    Les canaris qu’elle avait oublié de couvrir
étaient bien réveillés, et ils se déplaçaient, tournoyaient sur leurs perchoirs,
et mordillaient les barreaux de leur cage dorée. Elle les appela chacun par
leur nom, Honzi et Hansi, puis couvrit leur cage et leur chanta la Berceuse de Brahms en ôtant ses vêtements. Elle entendit à nouveau son oncle dire « Venez
vers moi », et elle regarda ses seins ronds bouger légèrement comme elle
obéissait. Ses hanches aussi larges qu’une porte. La robustesse de ses cuisses.
Elle fut surprise par sa jalousie, sa solitude, son sentiment de ne pas être à
la hauteur.
    Elle était bien loin du sommeil sous son
édredon de plumes lorsqu’elle entendit claquer la porte d’à côté, et elle se
précipita à sa fenêtre pour voir la starlette marcher dans la neige fraîche, perchée
sur ses hauts talons. Geli voulait voir son visage, et quand elle passa sous la
lumière d’un réverbère, elle le vit.
    Et Geli sourit, car ce visage était tendu, blême
et plein de désarroi, comme si Hitler avait trouvé la force d’avouer qui il
aimait vraiment.

XIII
Études de nus, 1929
    Les leçons de chant chez Vogl étant sa seule
obligation, Geli était généralement disponible pour Hitler, et il recherchait
plus que jamais sa compagnie pour sortir. Ils se promenèrent dans le froid avec
Prinz autour du Kleinhesselohersee dans le jardin anglais, s’abritèrent dans le
temple d’Apollon du parc Nymphenburger avec des biscuits Bahlsen et une Thermos
de thé bouillant, regardèrent de vieux messieurs portant des bonnets de laine
et plusieurs couches de chandails balayer la neige sur les canaux gelés et
faire glisser des palets rouges, jaunes et verts sur des bandes bleu acier. Les
champs et les trottoirs étaient tout blancs, juste ponctués de noir par

Weitere Kostenlose Bücher