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La nuit de l'ile d'Aix

La nuit de l'ile d'Aix

Titel: La nuit de l'ile d'Aix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gilbert Prouteau
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trouver le sommeil ?
    Habille-toi, il faut que tu me conduises à l’Empereur.
    —  Tu es seul ?
    —  Non, j’ai amené Boulay de la Meurthe, nous ne serons pas trop de deux.
    Las Cases se risqua jusqu’à la chambre de Napoléon qu’il trouva éveillé, à sa table, toujours affairé à annoter Humboldt.
    —  Sire, Decrès et Boulay sont là.
    —  C’est Fouché qui les envoie   ?
    —  Bien sûr.
    —  Dis-leur que je les rejoins dans la bibliothèque.
    Il n’a pas pris la peine de s’habiller, il entre en robe de chambre, des pantoufles aux pieds, un madras sur la tête.
    —  Vous venez me demander de prendre la tête de l’armée   ?
    —  Non, sire, dit fermement Decrès, ce n’est pas possible, je viens vous informer que rien ne fait plus obstacle à votre départ.
    —  Sauf l’intérêt de la France   !
    —  Sire, je vous prie de bien vouloir excuser ma démarche. Nous savons que l’avant-garde ennemie est à Chatou. Nous savons que Blücher envoie des groupes armés vers Malmaison. Je supplie Votre Majesté de bien vouloir hâter son départ. La présence de Votre Majesté à Paris comporte de grands risques et compromet le succès des négociations engagées par le gouvernement avec les Puissances alliées. Et ces négociations sont menées pour assurer le trône de Napoléon II et les clauses concernant la famille impériale.
    —  Je vous remercie du soin que vous prenez de ma sécurité et de ma dynastie. Je quitterai Malmaison en fin de matinée.
    Le galop sonore des chevaux de Decrès décroît à peine sur le sable des allées. Napoléon s’enferme dans la bibliothèque avec Madame Letizia et le cardinal Fesch.
    —  Il faut se battre, dit Madame Mère.
    Le cardinal renchérit   :
    —  Le peuple n’attend que vous, vous ne pouvez pas l’abandonner.
    —  C’est juste, je n’ai rien à faire de mieux pour vous tous, pour mon fils et pour moi, que de me jeter dans les bras de mes soldats. Mon apparition enflammera l’armée, foudroiera les étrangers. Attendez-moi, je vais m’habiller.
    Il s’éclipse par l’escalier dérobé qui joint la bibliothèque à sa chambre.
    —  Ali, donne-moi mon uniforme vert et va dire au général Beker de me rejoindre.
    Le général était resté assis sur son lit. Il descendit après avoir épousseté sa redingote poussiéreuse. L’Empereur se tenait debout devant le bureau, en colonel de la Garde, l’épée au côté et le chapeau sous le bras entre le cardinal Fesch et Madame Letizia, majestueuse et hiératique. Derrière eux cinq officiers. Beker reconnut Gourgaud et Savary.
    —  Général, je vous ai fait venir parce que j’ai de nouvelles propositions à faire transmettre au gouvernement. Le ministre de la Marine sort d’ici, l’ennemi sera demain aux portes de Paris. Tout est perdu, vous le sentez   ? Qu’on me rende le commandement de l’armée, non comme Empereur, mais comme général. J’écraserai l’étranger devant Paris. Allez porter ma demande à la Commission du gouvernement. Expliquez-lui bien que je ne songe pas à reprendre le pouvoir. Je veux battre l’ennemi, l’émietter, le forcer par la victoire à un cours favorable aux négociations. Je promets, foi de soldat, de citoyen et de Français, de partir pour l’Amérique le jour même où j’aurai battu l’ennemi. Et j’ai pensé que personne mieux que vous ne pouvait assurer cette mission. Vous leur rapporterez mes paroles et mon serment.
    —  Sire, balbutiait Beker, ne croyez-vous pas qu’un officier de la Maison impériale ne serait pas mieux désigné...
    —  J’ai confiance en votre loyauté, remplissez cette mission à l’instant, vous me rendrez un nouveau service.
    Beker était au pied du mur. Madame Mère, le cardinal et Savary ne le quittaient pas des yeux. Il salua   :
    —  Sire, je suis fier de ce témoignage de haute confiance. Puisque mon dévouement peut être utile à Votre Majesté, je ne veux pas hésiter à obéir à vos désirs.
    10 heures
    L’Empereur est arraché à sa lecture par de violentes clameurs qui montent du fond du parc.
    —  Bertrand   ! Le peuple veut arracher les grilles   ?
    —  Non, sire, ce sont deux régiments de la division Brayer qui reviennent de Vendée. Ils veulent absolument vous parler. C’est le neveu du général qui les commande.
    —  Dites aux soldats de rester en dehors du parc. Faites venir Brayer.
    « Vive l’Empereur, Vive l’Empereur... » Le tumulte éclate

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