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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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état de santé restait incertain. Le moindre excès de
gourmandise pouvait provoquer une autre attaque de goutte.
    — Jean
Anglicus !
    Jeanne se
retourna pour voir Arighis, le vice-dominus, c’est-à-dire le majordome du
palais s’avancer vers elle.
    — Je viens d’apprendre
qu’une dame du Transtévère est gravement souffrante. Tu es prié de te rendre à
son chevet.
    Jeanne retint un
soupir. Cette semaine-là, elle avait été par trois fois appelée au chevet de
malades. La nouvelle de la guérison du pape s’était répandue dans toute la
cité. Au grand dam des membres de la société de médecine, ses services étaient
à présent très recherchés.
    — Pourquoi
ne lui envoie-t-on pas un médecin de la société ? demanda-t-elle.
    Agacé, Arighis
fronça les sourcils. Il n’était pas dans ses habitudes de voir ses ordres
contestés ; en sa qualité de vice- dominus, il était de son droit et de
son devoir d’exercer un contrôle rigoureux sur tout ce qui concernait la maison
du pape et son personnel, mais ce jeune étranger insolent semblait ne pas l’avoir
compris.
    — J’ai déjà
assuré cette personne de ta venue, dit-il.
    Jeanne se raidit,
irritée par cette démonstration d’autorité malvenue. En tant que médecin
personnel du pape, elle n’avait aucun compte à rendre à Arighis. Mais ce n’était
ni le lieu ni l’heure de se lancer dans un tel débat. Aussi inopportun fût-il,
l’appel au secours d’une personne souffrante passait avant tout le reste.
    — Soit,
admit Jeanne. Je vais chercher ma besace.
     
     
    À l’adresse
indiquée, Jeanne découvrit une vaste résidence, construite à la mode antique.
Un serviteur la mena à travers une enfilade de cours, de jardins et de galeries
jusqu’à une chambre outrancièrement décorée de mosaïques aux vives couleurs, de
stuc incrusté de coquillages et de peintures en trompe l’œil conçues pour
donner l’illusion de lointaines perspectives. Il flottait dans cette pièce
singulière une odeur sucrée de pommes mûres. Tout au fond, elle aperçut un
grand lit, cerné de cierges comme un autel. Une femme d’aspect langoureux était
couchée sur le matelas de plumes.
    Jamais Jeanne n’avait
vu aussi belle personne. Elle était plus rayonnante que Richild, plus même que
Gudrun, sa mère, dont elle croyait encore, un instant auparavant, qu’elle était
la plus belle femme de la Création.
    — Je m’appelle
Marioza, susurra l’inconnue d’une voix qui avait la douceur du miel fondu.
    Face à une telle
perfection, Jeanne resta un moment la gorge nouée.
    — Ma dame...
je... Mon nom est Jean Anglicus, et je suis venu en réponse à votre appel.
    Marioza sourit,
visiblement satisfaite de l’effet produit.
    — Approche
donc, cher Jean Anglicus. À moins que tu n’aies l’intention de m’examiner à
distance ?
    Le parfum de
pommes était encore plus intense près du lit. Je connais cette senteur, se dit Jeanne. Mais elle ne parvenait pas à l’identifier.
    Marioza lui
tendit une coupe de vin.
    — Boiras-tu
à ma santé ?
    Jeanne but,
conformément à la coutume. Vue de près, Marioza était encore plus
étourdissante. Sa peau évoquait un ivoire sans défaut. Ses yeux mauves, ourlés
de longs cils, étaient immenses et teintés d’ébène par le puits de ténèbres de
ses pupilles.
    Elles sont
trop dilatées, se dit Jeanne. Cette observation froidement
clinique rompit tout à coup le charme instauré par la beauté de Marioza.
    — Dites-moi,
ma dame, fit Jeanne en reposant sa coupe, quel est le mal dont vous souffrez.
    — Si joli,
soupira l’inconnue, et pourtant si pressé de se mettre au travail !
    — Je ne
désire que vous aider, ma dame. Quelle détresse vous a poussée à m’appeler de
toute urgence ?
    — Puisque tu
insistes... Il s’agit de mon cœur.
    C’était là un mal
fort rare pour une femme de son âge, car Marioza ne devait guère avoir plus de
vingt-deux ans. Bien sûr, il pouvait arriver qu’un enfant né sous une mauvaise
étoile eût le cœur défectueux, au point que chaque respiration de sa brève
existence était une souffrance et un combat. Mais ces êtres-là n’avaient pas l’aspect
de Marioza, dont tout le corps, hormis ses pupilles étrangement agrandies,
suggérait une santé éclatante.
    Jeanne saisit son
poignet et lui prit le pouls, qu’elle trouva vigoureux et régulier. Puis elle
examina ses mains. Leur coloration était excellente, notamment sous les

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