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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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nobis...
    Courbant la tête,
les autres se joignirent à sa prière.
    Arsène récita
mécaniquement les mots de l’oraison, mais  son esprit était ailleurs. Si, comme
cela semblait certain, le pape Jean avait bien péri au cours de l’inondation,
Anastase jouirait bientôt d’une seconde chance. Cette fois, il ne faudra pas
que l’élection soit troublée par le moindre imprévu, se dit-il, en se
promettant d’user de tout son pouvoir pour assurer le succès de son fils.
    — ... et
metuant eum omnes fines terrae. Amen.
    — Amen,
répéta Arsène, songeant déjà aux bonnes nouvelles que promettait d’apporter le
lendemain.
     
     
    En se réveillant
vers l’aube, Jeanne sourit en découvrant Gerold toujours endormi près d’elle.
Son regard s’attarda sur son visage long et anguleux  – aussi saisissant
de mâle beauté que le jour où elle l’avait contemplé pour la première fois, de
l’autre côté d’une table de banquet, vingt-huit ans plus tôt.
    Ai-je su tout
de suite ? se demanda-t-elle. Dès le
premier instant ? Ai-je su tout de suite que je l’aimais ? Je le
crois.
    Elle acceptait
enfin une vérité qu’elle avait longtemps combattue : Gerold était une part
d’elle-même, Gerold était elle-même, d’une façon mystérieuse, qu’elle ne
pouvait ni expliquer ni nier. Ils étaient deux âmes sœurs, liées inextricablement
et pour l’éternité, deux moitiés d’un tout parfait et incapable d’atteindre à
la plénitude l’une sans l’autre.
    Elle ne s’attarda
pas à réfléchir aux implications de cette découverte enchanteresse. C’était
déjà bien assez que de vivre l’instant présent, le bonheur suprême d’être ici,
et maintenant, près de lui. L’avenir n’existait plus.
    Il dormait sur le
côté, la tête proche de la sienne, les lèvres imperceptiblement entrouvertes,
ses longs cheveux roux ébouriffés. Animée d’une irrépressible tendresse, Jeanne
tendit la main et écarta délicatement une mèche de sa joue.
    Les paupières de
Gerold se soulevèrent, dévoilant un regard tellement empreint d’amour et de
désir qu’elle en eut le souffle coupé. Sans un mot, il ouvrit les bras, et elle
vint à lui.
     
     
    Ils somnolaient
encore, voluptueusement enlacés, lorsque Jeanne sursauta tout à coup, persuadée
d’avoir entendu un bruit singulier. Elle retint son souffle et tendit l’oreille.
Tout était calme. Elle comprit alors que ce n’était pas un son qui venait de la
réveiller, mais au contraire le silence  – et plus précisément l’absence
du grondement de la pluie sur le toit.
    Il ne pleuvait
plus.
    Elle se leva,
alla à la fenêtre. Le ciel était sombre et lourd, mais pour la première fois
depuis plus de dix jours, quelques trouées d’azur s’étiraient à l’horizon,
teintées d’or par de puissants rayons de soleil.
    Dieu soit
loué. L’eau va bientôt redescendre.
    Gerold la
rejoignit et lui prit la taille. Elle se laissa aller contre lui, avide de sa
chaleur.
    — Crois-tu
qu’on viendra bientôt nous chercher ? demanda-t-elle à mi-voix.
    — Très
bientôt. Il ne pleut plus.
    Elle enfouit le
visage au creux de son épaule.
    — Jamais je
ne me suis sentie aussi heureuse, Gerold... Ni aussi malheureuse !
    — Je
comprends, ma perle.
    — Plus
jamais nous ne connaîtrons de tels moments.
    Il caressa ses
cheveux d’or pâle.
    — Rien ne
nous oblige à retourner là-bas.
    Elle le dévisagea
avec surprise.
    — Que
veux-tu dire ?
    — Personne
ne sait que nous sommes ici. Si nous restons cachés à l’arrivée des secours,
ceux-ci finiront par repartir. D’ici un jour ou deux, dès les premiers signes
de décrue, nous pourrons nous glisser de nuit hors de la ville. Personne ne
nous  remarquera, car tout le monde nous croira morts. Nous pourrons enfin
vivre ensemble, librement.
    Sans répondre,
elle se détourna vers la fenêtre.
    Gerold attendit
sa décision. Sa vie, son bonheur étaient dans la balance.
    Au bout d’un long
moment, elle se retourna pour lui faire face. Aux nuées de chagrin qui
obscurcissaient son regard gris-vert, Gerold comprit qu’il l’avait perdue.
    — Je ne puis
me dégager de l’immense responsabilité qui m’a été confiée, dit-elle, pesant
chacun de ses mots. Le peuple de Rome croit en moi. Je n’ai pas le droit de l’abandonner.
En me dérobant, je deviendrais quelqu’un d’autre, quelqu’un de très différent
de la personne que tu aimes.
    Gerold savait que
son

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