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La pierre et le sabre

La pierre et le sabre

Titel: La pierre et le sabre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eiji Yoshikawa
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supplier sans arrêt, dans son
délire, qu’on lui donnât de l’eau. Avant de partir, le commerçant était venu l’exhorter
à la patience. Quelques instants plus tard, elle avait oublié qu’il lui eût
jamais adressé la parole.
    Sa bouche était desséchée, comme
remplie d’épines.
    — De l’eau, s’il vous plaît !
criait-elle faiblement.
    N’entendant aucune réponse, elle
se souleva sur les coudes et tendit le cou vers la bassine d’eau, juste devant
la porte. Lentement, elle parvint à ramper jusque-là, mais comme elle posait la
main sur la louche en bambou, au flanc de la bassine, elle entendit un volet
tomber à terre, quelque part derrière elle. La maison de thé n’était guère
plus, à l’origine, qu’un refuge de montagne, et n’importe qui pouvait soulever
l’un ou l’ensemble des volets mal joints.
    Osugi et l’oncle Gon pénétrèrent
en trébuchant par l’ouverture.
    — Il fait noir comme dans un
four, gémit la vieille en ce qu’elle prenait pour un chuchotement.
    — Attends une minute,
répliqua Gon en se dirigeant vers la grand-salle où il tisonna les braises, sur
lesquelles il jeta du bois pour faire un peu de lumière. Elle n’est pas ici,
grand-mère !
    — Elle y est certainement !
Elle ne peut s’être envolée !
    Presque aussitôt, Osugi s’aperçut
que la porte de l’arrière-salle était entrebâillée.
    — ... Regarde, là-bas !
cria-t-elle.
    Otsū, debout devant la porte,
lança la pleine louche d’eau, par l’étroite ouverture, à la figure de la
vieille, et dévala la colline ainsi qu’un oiseau dans le vent, ses manches et
sa jupe flottant derrière elle.
    Osugi sortit en courant et lança
des imprécations.
    — ... Gon, Gon ! Fais
quelque chose, voyons, fais quelque chose !
    — Elle s’est enfuie ?
    — Bien sûr, qu’elle s’est
enfuie ! Nous lui avons assez donné l’éveil en faisant tout ce bruit !
C’était malin de ta part, de laisser tomber ce volet !
    La vieille avait la face convulsée
de rage.
    — ... N’es-tu vraiment bon à
rien ?
    L’oncle Gon dirigea son attention
sur la silhouette pareille à celle d’une biche qui volait au loin. Il la
désigna :
    — C’est elle, hein ? Ne
t’inquiète pas, elle n’a pas beaucoup d’avance. Elle est malade, et de toute
manière elle n’a que des jambes de fille. Je vais la rattraper en un rien de
temps.
    Il prit une respiration, et s’élança,
Osugi sur ses talons.
    — Oncle Gon, criait-elle, tu
peux te servir de ton sabre, mais ne lui tranche pas la tête avant que j’aie pu
lui dire ses quatre vérités !
    Soudain, l’oncle Gon laissa
échapper un cri de consternation, et tomba à quatre pattes.
    — Que se passe-t-il ?
cria Osugi en le rattrapant.
    — Regarde en bas.
    Osugi obéit. Juste à leurs pieds
se creusait un ravin couvert de bambou.
    — Elle a plongé là-dedans ?
    — Oui. Je ne crois pas que ce
soit très profond mais il fait trop sombre pour en juger. Il va falloir que je
retourne à la maison de thé chercher une torche.
    Tandis qu’à genoux il scrutait le
ravin, Osugi hurla :
    — Qu’est-ce que tu attends,
espèce de cruche ?
    Et elle le secoua violemment. Il y
eut un bruit de pieds qui tentaient de trouver une prise et s’agitaient
désespérément avant de s’immobiliser au fond du ravin.
    — Vieille sorcière !
cria l’oncle Gon, furieux. Et maintenant, donne-toi la peine de descendre ici
toi-même ! Tu verras comme c’est agréable !
     
    Takezō, assis les bras
croisés au sommet d’un gros bloc de pierre, regardait fixement, à travers la
vallée, la palanque de Hinagura. Sous l’un de ces toits, songeait-il, sa sœur
était emprisonnée. Mais il était resté assis là de l’aube au crépuscule, la
veille, et toute la présente journée, incapable d’imaginer un plan pour la
délivrer. Il entendait ne pas bouger avant d’avoir trouvé.
    Il avait mené sa réflexion au
point où il se faisait fort de l’emporter en tactique sur les cinquante à cent
soldats qui gardaient la palanque, mais il continuait de méditer sur la configuration
du terrain. Non seulement il fallait entrer mais ressortir. Cela se présentait
mal : derrière la palanque se creusait une gorge profonde, et devant, une
double porte protégeait bien la route qui menait à l’intérieur de la palanque.
Pis : tous deux seraient contraints de fuir à travers un plateau sans un
seul arbre derrière lequel se cacher ; par une

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