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La polka des bâtards

La polka des bâtards

Titel: La polka des bâtards Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Stephen Wright
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grave. Liberty, se demandant qui elle était, où elle était, si même
elle était encore vivante, retira la photographie et l’empocha.
    « Tu t’es trouvé une bonne amie ? » demanda
Otis.
    Il ne daigna pas répondre.
    « Sûrement une cousine, plaisanta Vail. T’as bien des
parents dans tout ce putain de Sud rebelle ?
    — Suffisamment pour t’apprendre les bonnes manières
avant que tu repartes la queue basse pour Buffalo.
    — Économisez vos munitions, conseilla Wills. Dieu sait
ce qui nous attend d’ici que le soleil se couche.
    — Pas de problème, dit Vail en exhibant son sourire
édenté. Je l’aime bien, ce p’tit rebelle, on est copains.
    — Moi aussi, je t’aime bien, dit Liberty, espèce de
salopard bigleux et cagneux. »
    Vail exultait. On aurait dit qu’il aimait se faire insulter,
et qu’une bonne blague à ses dépens était pour lui une façon comme une autre de
mettre fin à une dispute.
    Strickling dégringola les marches avec une plume de paon à
son chapeau. « Quelqu’un a versé de la mélasse sur le lit.
    — T’es sûr que c’est de la mélasse ? demanda Otis.
    — Et merde, conclut Vail, y a plus rien à tirer de
cette bicoque.
    — Oui, renchérit Wills. On repart. »
    Lorsqu’ils quittèrent la maison d’un pas traînant,
Strickling se retourna, dégaina son revolver et tira sur une vitre de l’étage.
Il éclata de rire. Les autres le regardèrent, mais personne ne dit mot.
    Au bout d’un ou deux kilomètres, ils croisèrent un vieux
Noir aux cheveux blancs qui portait un manteau et un pantalon en lambeaux, et
des chiffons en guise de chaussures. Il avançait d’un pas vif et chantait d’une
voix tonnante. Dès qu’il repéra les soldats nordistes, il fit un grand sourire
et agita la main.
    « Un de tes amis, Liberty ? demanda Vail.
    — Hé, l’oncle ! cria Wills. Y a des rebelles dans
les parages ?
    — Non, Maître, déclara l’homme d’un ton péremptoire.
Ils ont décampé dès qu’on a su que vous arriviez. » Il ne pouvait s’empêcher
de sourire. « Des Yankees », dit-il, et il laissa échapper un rire,
comme si ce simple mot lui chatouillait la bouche. « J’aurais jamais cru
vivre assez longtemps pour voir ça. Ils avaient faim de vous voir, mes yeux
fatigués.
    — Y a des grandes plantations dans les parages ?
demanda Wills.
    — Oh oui, Maître. Si vous continuez, vous arriverez
directement chez Maîtresse Sarah.
    — Les tuniques bleues sont déjà passées par
là-bas ?
    — Non, Maître, mais la maîtresse, elle et les enfants,
ils vous attendent.
    — Ella a à manger pour nous ?
    — Oh oui, Maître, tout est enterré sous les arbres,
derrière. On dirait une tombe, mais c’est fait exprès : c’est là que toute
la nourriture est cachée.
    — Vous n’avez plus besoin de dire “Maître” à qui que ce
soit, intervint Liberty.
    — Ah, oui, m’sieur, vous avez sacrément raison, mais
j’ai ça planté dans la bouche comme une dent, et ça va être dur à arracher.
    — Qu’est-ce que tu fais ici tout seul ? demanda
Otis.
    — Eh bien, m’sieur, je vous cherchais, vous les
Yankees. Je veux m’engager ; jusqu’à la fin de la guerre, je suis partant.
    — On n’a pas besoin de ton aide, aboya Vail. C’est pas
tes affaires, tout ça.
    — Oh, j’crois bien que si, Maître.
    — On se bat pour défendre l’Union, dit Strickling, pas
pour défendre ton cul.
    — Oui, Maître, mais j’ai médité longuement tout ça, et
moi il me semble que cette guerre a à voir avec l’esclavage.
    — Foutaises, dit Vail. Vous, les noirauds, vous croyez
toujours que tout ce qui se passe dans ce pays a un rapport avec vous.
    — C’est pourtant bien le cas, intervint Liberty.
    — Oh, nom de Dieu ! s’écria Vail en levant son
fusil. Ne recommence pas à me chercher ou je t’éclate la rate, et je vous
envoie tous les deux en enfer dans les bras l’un de l’autre. Ça te plairait,
hein, négrophile ! »
    Liberty se rua sur Vail, le désarma, et parvint à lui
enserrer le cou à deux mains tandis qu’ils basculaient dans la poussière.
Liberty serrait, la tête de Vail rougissait et enflait. « Allez,
lâche-le », dit Otis en tirant Liberty par les épaules. Vail se redressa, suffoquant
et toussant. « Si jamais tu me touches encore, gronda-t-il, je t’ouvre en
deux, petit merdeux, des oreilles jusqu’aux couilles.
    — Si tu surveilles ton langage et tes manières,
répondit

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