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La Poussière Des Corons

La Poussière Des Corons

Titel: La Poussière Des Corons Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie-Paul Armand
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médecin. Et puis je ne
sais plus. Je n’ai plus, ensuite, de souvenir précis. J’étais en proie à la
fièvre, roulée dans des vagues brûlantes qui ne me laissaient pas un instant de
répit. Un poids énorme s’était installé sur ma poitrine. Instinctivement, j’essayais
de le repousser, mais je n’y parvenais pas. J’étais dans un univers où la
souffrance me maintenait prisonnière.
    Je délirai. J’eus des cauchemars. Je voyais un énorme dragon
se poser sur moi, me regardant avec des yeux fulgurants. Avec ses griffes, il
me déchirait furieusement la poitrine, et je ressentais une douleur atroce, insupportable.
    J’avais aussi quelques brefs instants de lucidité, où, à
travers l’écran de ma fièvre, j’entendais la voix de ma mère. Je sentais quelqu’un
me redresser et me faire boire quelque chose, j’avais la sensation d’une main
caressant mon front brûlant. Mais c’étaient des moments très fugitifs. Je
retombais bien vite sous l’emprise de la fièvre.
    Un jour pourtant, au bout d’un temps que j’étais incapable d’évaluer,
je retrouvai une semi-conscience. Je me sentais encore en proie à la maladie, mais
en même temps, je me rendais compte de l’endroit où j’étais. Je me voyais dans
mon lit, et, pour la première fois, la pensée me venait que j’étais très malade,
que j’allais probablement mourir, mais elle ne provoquait en moi aucune
réaction. J’éprouvais un étrange détachement. Je flottais entre deux mondes, n’arrivant
pas à reprendre pied dans le premier ni à entrer dans le second. Il me sembla
qu’une grande faiblesse m’engourdissait, et je perdis de nouveau toute notion
de la réalité.
    Ce fut alors que je rêvai. Était-ce seulement un rêve, ou, au
contraire, ai-je réellement vécu cet instant ? Je fus d’abord plongée dans
les ténèbres, et puis, sans transition, je me trouvai enveloppée d’une lumière
radieuse, éclatante. J’étais dans un monde merveilleux, paradisiaque, enchanteur,
où tout n’était que tendresse, lumière et bonheur. Devant moi s’étendait une
grande, une immense prairie, et j’éprouvai soudain une envie irrésistible d’y
courir. Je m’aperçus alors qu’il existait une frontière, invisible mais réelle,
entre cette prairie et l’endroit où je me trouvais. Et derrière cette frontière,
je vis mon père.
    Il me regardait, et je voulus aller vers lui. Je fis
quelques pas en avant, mais je dus m’arrêter, car des voix m’appelaient :
    — Reviens ! Ne pars pas, reviens !
    Déchirée entre ces voix qui me tiraient en arrière et mon
désir d’aller rejoindre mon père, j’hésitai un instant. Mais l’attrait de ce
monde enchanteur que j’apercevais était si fort que je me remis à avancer. Au
moment où j’allais franchir la barrière au-delà de laquelle, je le savais, il n’y
aurait plus pour moi de retour possible, un cri m’arrêta :
    — Maman, maman ! Reviens, maman !
    Je m’arrêtai, désespérée, incapable d’avancer davantage, et
pourtant le souhaitant avec une telle force qu’elle m’était douloureuse. Dans
un geste d’imploration je tendis les mains vers mon père, qui toujours me
regardait, et je dis :
    — Pourquoi ? Pourquoi ne puis-je pas venir
te rejoindre ? Je le désire tant ! Dis, prends-moi avec toi, je t’en
prie ! Puis-je venir ?
    Il secoua la tête, et toute la tendresse du monde m’enveloppa
tandis qu’il me disait, d’une voix douce :
    — Pas encore, pas maintenant. Ne t’inquiète pas, tu
viendras me rejoindre un jour. Mais plus tard, bien plus tard. Pour le moment, tu
dois retourner auprès de ton mari, de ton enfant. Ils ont besoin de toi. Ta
place est auprès d’eux. Va les rejoindre, va !
    Alors, subitement, tout disparut. Je me retrouvai dans mon
lit, extrêmement faible mais lucide. J’ouvris lentement les yeux, et je les vis.
Ils étaient de chaque côté du lit, et me tenaient chacun une main. Charles
avait la tête penchée, et je ne voyais de lui que ses cheveux, drus et
ébouriffés. Jean, lui, avait les yeux fixés sur moi. Il s’écria aussitôt :
    — Maman, maman, tu es réveillée ? Tu nous
vois, tu nous reconnais ?
    A ces mots, Charles releva la tête, et je pus voir qu’il
pleurait. Il me regarda, et sur son visage hagard, je lus un espoir fou, incrédule.
Et puis, il se jeta tout contre moi, et me serrant, sanglota sans retenue en
répétant :
    — Enfin, enfin ! Tu es sauvée ! Si tu
savais…
    Je

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