La Prophétie des papes
blanc sâagitait sous la pancarte :
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De Stefano prit une grande inspiration et ouvrit le portail en fer forgé. Dans la cour de marbre, une jeune religieuse conversait avec une femme à lâair soucieux, sans doute la mère de la gamine qui courait en rond, pour libérer son trop-plein dâénergie. La religieuse était noire â africaine, à en juger par son accent â et portait le sarrau bleu clair dâune novice. Il préféra ne pas lâinterrompre et poursuivit son chemin dans la cour pour aller jusquâau hall dâentrée frais et sombre. Une sÅur plus âgée, toute petite, portant des lunettes et vêtue de noir, le vit et sâapprocha.
« Bonjour, dit-il. Je suis le professeur De Stefano.
â Oui, vous êtes attendu, dit la religieuse sur un ton professionnel qui contrastait avec le regard amical que portaient sur lui ses yeux ridés. Je suis sÅur Marilena, la principale. Je crois que son cours est terminé. Je vais aller la chercher. »
De Stefano attendit, ajusta sa cravate et regarda les jeunes filles qui sortaient en courant.
Quand elle apparut, une brève expression de confusion se lut sur le visage de De Stefano. Cela faisait combien de temps ? Onze ? Douze ans ?
Elle nâavait rien perdu de sa sculpturale beauté méditerranéenne, mais la voir ainsi portant un scapulaire noir, ses cheveux entièrement cachés sous un voile de nonne, le troubla profondément.
Son teint laiteux nâétait que légèrement plus foncé que le sous-pull blanc à col montant quâelle avait sous son habit à plis plats, la tenue traditionnelle de son ordre, celui des sÅurs Augustines. Alors quâelle ne portait aucun maquillage, son teint était parfait, ses lèvres naturellement humides et roses. Quand elle était étudiante, elle sâhabillait mieux que ses amies et elle utilisait des parfums charmants. Mais, même dans la tenue très simple dâune religieuse, elle ne pouvait sâempêcher dâêtre dâune élégance impeccable. Ses sourcils étaient soigneusement épilés, ses dents brillaient, ses mains étaient manucurées, les ongles naturels. Et malgré son ample habit, on voyait bien quâelle était toujours mince.
« Elisabetta », dit-il.
Elle sourit.
« Professeur.
â Je suis content de vous voir.
â Moi aussi. Vous avez lâair en forme. »
Elle tendit ses deux mains. De Stefano les saisit dans les siennes, puis les lâcha très vite.
« Câest gentil de le dire. Mais je crois que je suis devenu un vieillard. »
Elisabetta secoua la tête vigoureusement en entendant ces mots, puis elle demanda :
« Que diriez-vous de prendre un peu le soleil ? »
La cour était jonchée de jouets pour les enfants les plus petits. Entre deux arbres en pots se trouvaient deux bancs de pierre qui se faisaient face. Elisabetta sâinstalla sur lâun. De Stefano sâassit sur lâautre et plongea sa main dans sa poche dâun geste automatique.
« Je suis désolée, dit-elle. Vous ne pouvez pas fumer ici⦠les enfants.
â Bien sûr, dit De Stefano, confus, en retirant sa main. Il faut que jâarrête. »
Il y eut un silence un peu long, auquel Elisabetta mit fin quand elle dit :
« Vous savez, je nâai presque pas dormi la nuit dernière. Jâétais émue à lâidée de vous voir.
â Moi aussi, admit-il, faisant à peine allusion à la nervosité quâil éprouvait encore.
â La plupart de mes anciens amis se sont éloignés il y a longtemps, dit-elle. Certains dâentre eux étaient gênés. Dâautres ont pensé, je crois, que jâétais cloîtrée.
â Vous pouvez donc voir votre famille ?
â Oh, oui, au moins une fois par semaine. Mon père habite tout près dâici.
â En tout cas, vous avez lâair heureuse.
â Je le suis.
â Ce mode de vie vous convient, donc.
â Je ne peux pas mâimaginer faire autre chose.
â Jâen suis heureux. »
Elisabetta examina lâexpression de son visage.
« On dirait que vous voulez me demander pourquoi. »
De Stefano eut un large sourire.
« Vous êtes très
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