La Prophétie des papes
table. »
Le pape était incapable de répondre, mais Aspromonte énonça à voix basse les mots quâil aurait dits :
« Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri.
â Le corps du Christ, psalmodia Diaz.
â Amen  », chuchota Aspromonte.
Diaz détacha un petit morceau de lâhostie et le posa dans la bouche écumeuse du pape. « Que le Seigneur Jésus te protège et te conduise à la vie éternelle. »
Zarilli sâétait remis debout, le visage empreint dâune grande tristesse.
« Avez-vous terminé ? demanda-t-il à Diaz. Câest fini. Le pape est décédé.
â Vous avez tort, docteur, dit le vieux cardinal dâun ton glacial. Il nâest pas décédé tant que le cardinal Camerlengo nâa pas dit quâil lâétait. Cardinal Aspromonte, poursuivez, sâil vous plaît. »
Tout le monde recula tandis quâAspromonte prenait le sac en cuir des mains du père Diep. Il en sortit un petit maillet en argent sur lequel étaient gravées les armoiries du pape.
Il se mit à genoux et tapota doucement le front du pape avec le maillet.
« Lève-toi, Domenico Savarino », dit-il, utilisant le nom que la mère du pontife avait chuchoté dans son oreille quand il était enfant. On disait quâaucun homme ne restait endormi en entendant son nom de baptême.
Le pape resta immobile.
Un autre tapotement.
« Lève-toi, Domenico Savarino », dit Aspromonte à nouveau.
La pièce était plongée dans le silence.
Il tapota le front du pape avec le maillet une troisième et dernière fois.
« Lève-toi, Domenico Savarino. »
Aspromonte se remit debout, se signa et énonça dâune voix forte les mots terribles :
« Le pape est mort. »
Â
« Le pape est mort. »
Cette fois, les mots étaient prononcés par un homme qui parlait dans un téléphone portable. Il y eut un silence et un profond soupir. Lâhomme put presque entendre le soulagement sortir de la poitrine de son interlocuteur. Damjan Krek répondit :
« Sous le signe des Poissons. Comme câétait prédit.
â Voulez-vous que je passe à lâaction ?
â Bien sûr, dit Krek dâun ton brusque. Fais-le ce soir. Ce soir, câest le moment parfait. »
Tout en traversant tranquillement la place Saint-Pierre, lâhomme se dit que K avait raison. Ce soir était bien le moment idéal. à mesure que la nouvelle de la mort du pape se répandait dans le Vatican, les laïcs comme les ecclésiastiques se précipitaient pour prier à la basilique, avant de retourner à leur table de travail et se consacrer à la tâche qui les attendait.
Lâhomme tenait en main un sac en nylon noir, du genre de ceux quâon utilise pour transporter du matériel militaire. Sâil était lourd, personne ne sâen serait aperçu. Comme celles dâun Atlas moderne, ses épaules colossales semblaient pouvoir porternâimporte quelle charge. Il avait sa tenue habituelle, un costume bleu marine avec un petit badge émaillé sur son revers. Il nâétait pas beau, mais les traits anguleux de son visage mince et ses cheveux couleur aile de corbeau faisaient que les gens se retournaient souvent sur son passage, et il avait toujours eu du succès auprès des dames.
Au lieu de monter les marches de la basilique, il bifurqua vers une porte privée conduisant à la chapelle Sixtine. Il accéléra le pas et entendit lâair nocturne siffler entre ses dents serrées. Il sentit le Sig collé contre son cÅur et le couteau Boker contre sa cuisse. à la porte, se tenait un garde suisse en tenue dâapparat, éclairé par un projecteur. Le garde regarda lâhomme droit dans les yeux, puis jeta un coup dâÅil au sac quâil portait à lâépaule.
« Caporal », dit lâhomme rapidement.
Le garde exécuta un salut raide et fit un pas de côté.
« Mon colonel. Quel triste jour.
â Oui. »
Le lieutenant-colonel Matthias Hackel traversa le hall morne et désert, ses chaussures à semelles de cuir résonnaient sur les dalles. Devant lui se trouvait un couloir dont lâaccès était verrouillé, qui menait
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