La Prophétie des papes
sonna à son entrée dans la boulangerie. La femme replète à la caisse parut surprise de voir une religieuse dans son magasin et ignora un autre client dans sa précipitation à servir Elisabetta.
« Puis-je vous aider, ma sÅur ? demanda-t-elle en allemand.
â Ah, parlez-vous italien ou anglais ? demanda Elisabetta en anglais.
â Anglais, un peu. Voulez-vous du pain ? Des pâtisseries, ma sÅur ?
â Juste un peu dâaide. Un homme habitait ici. Je me demandais si vous le connaissiez.
â De qui sâagit-il ?
â De Bruno Ottinger. »
Ce fut comme si Elisabetta avait fait apparaître un fantôme. La dame se précipita contre le comptoir et faillit poser sa main sur une tarte toute fraîche.
« Le professeur ! Mon Dieu ! Câest drôle, Hans et moi, on parlait de lui hier soir, justement. Nous étions ses propriétaires.
â Je vois que vous êtes occupée. Je me suis arrêtée en chemin avant dâaller à lâaéroport et je voulais parler à quelquâun qui lâavait connu.
â Laissez-moi me débarrasser dâelle, dit la boulangère en montrant, dâun mouvement du menton, la femme un peu âgée dont Elisabetta espérait quâelle ne parlait pas un mot dâanglais. Elle achète toujours la même chose, alors, ça va aller vite. »
Une fois la cliente partie, la femme du boulanger, qui se présenta comme Frau Lang, accrocha à la porte en verre un panneau sur lequel on lisait : DE RETOUR DANS DIX MINUTES et tourna la clef dans la serrure. Elle toucha le poignet dâElisabetta et dit dâun ton coupable : « Hans est protestant, mais je suis catholique. Je devrais me consacrer davantage à ma religion, mais on perd lâhabitude, avec nos horaires fous et tous nos engagements familiaux.
â Il y a de nombreuses manières de mener une vie de piété, dit Elisabetta, obligeamment. Je me demande si je peux aller chercher ma sÅur dans la voiture.
â Est-ce aussi une religieuse ? demanda Frau Lang, les yeux écarquillés.
â Non, elle est médecin.
â Dites-lui de venir. Aime-t-elle les gâteaux ?
â Elle adore ça. »
Â
Krek sâassit à son grand bureau, son téléphone portable collé à lâoreille. Les fenêtres à double vitrage réduisaient au minimum les bruits de la rue provenant de la place PreÅ¡eren à Ljubljana, mais il voyait que la circulation de midi dans la rue Äopova était intense.
« Oui, je sais que la communication est toujours un problème. »
Il écouta la réponse et dit :
« Je nâai pas confiance en Internet. Nous travaillerons à lâancienne. Le jour précédant le conclave, nos gens le verront et ils sauront que câest nous. »
Il raccrocha brusquement et leva les yeux. Mulej était là , son imposante masse remplissait complètement le cadre de la porte, et il avait lâair contrarié.
« Quâest-ce quâil y a ? demanda Krek.
â Je viens de prendre un appel. Il y a un nouveau problème, probablement pas dâimportance majeure, mais un problème que nous devons examiner de près.
â Vas-y, crache le morceau, bon sang !
â Vous vous souvenez de cette fille, celle qui fouinait du côté de Saint-Calixte il y a des années ? »
Le froncement de sourcils de Krek sâaccentua. Son visage devint très laid.
« Elisabetta Celestino. Aldo Vani a bâclé le boulot. Elle a survécu. Elle est devenue nonne, voyez-vous ça. Elle est devenue inoffensive. On lâa laissée filer. Oui, Mulej, je me souviens dâelle.
â Quelquâun au Vatican lui a demandé de reprendre du service. Elle a quitté son couvent et elle a commencé à travailler sur lâeffondrement de Saint-Calixte. Je ne peux pas le confirmer, mais il est possible quâelle soit allée à Ulm aujourdâhui.
â à Ulm ? rugit Krek. Mais quâest-ce quâelle fabrique à Ulm ? »
Mulej regarda à travers les vitres teintées des fenêtres plutôt que de braver le regard effrayant de son patron.
« Je ne sais pas, mais je vais le découvrir.
â Trouve-moi Aldo tout de suite. » La voix de Krek était tendue, sa gorge serrée par la
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