La Prophétie des papes
sa toge, debout dans le cercle magique avec son livre, invoquant le diable qui traversait le plancher. Le diable était une créature ailée avec des cornes, une barbe pointue et une longue queue en spirale.
Ce nâest pas pour cela quâElisabetta eut des battements de cÅur et la chair de poule. Ce nâest pas pour cela quâelle eut lâimpression de suffoquer sous son voile et ses lourdes robes.
Câest le pourtour du cercle magique qui provoqua sa panique.
Les constellations.
Poissons, Taureau, Gémeaux, Cancer.
Les signes du zodiaque.
La Lune, Mercure, Vénus, le Soleil, Mars, Jupiter et Saturne, présentés dans le même ordre particulier que sur la fresque de Saint-Calixte.
Et, à moitié caché, sur la droite du vêtement de Faust se trouvait lâemblème des Poissons, incliné vers le haut ; il ressemblait terriblement à un homme doté dâune queue.
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R OME, 37
L e crépuscule sâépaississait au moment où les deux garçons fatigués remontèrent à pas lourds la route qui menait au centre-ville. Un quart de lune blafarde était suspendu mollement dans le ciel noir, éclairant très vaguement leur chemin. Progressant en silence, ils restèrent près du caniveau central, puant, pour éviter les tas dâordures bien pires qui jonchaient leur parcours.
« Où allons-nous dormir ? demanda le plus jeune sur un ton craintif tandis quâils passaient devant une ruelle sinistre.
â Je nâen sais rien », répondit sèchement son grand frère. Sentant à quel point son petit frère de sept ans était malheureux, il se radoucit : « Le père de mon ami, Lucius, dit quâil dort dans le marché aux bestiaux chaque fois quâil vient à Rome. Nous trouverons un endroit là -bas. »
Il serra la main de son frère et le sentit frissonner. Sa tunique peu serrée ne le protégeait guère du froid.
« Est-ce quâon arrive bientôt ? Au marché aux bestiaux ? » demanda-t-il dâune voix pleine dâespoir.
Quintus grogna. Depuis le matin, il avait entendu des variantes de la même question au moins cent fois.
« Oui, Sextus, bientôt nous aurons un endroit chaud pour nous reposer, après avoir mangé un peu. »
Ils avaient quitté leur village à lâaube et se rendaient à la fabrique de briques de leur oncle au nord de Rome, sur le Pincio. Bien quâaffamés et épuisés, ils avaient passé les murs et étaient entrés dans la ville. Les deux énormes prétoriens avec les emblèmes en forme de scorpion sur leur plastron à la porte Capène leur avaient causé beaucoup dâennuis et avaient essayé de leur soutirer de lâargent. Mais ils nâavaient pas de pièces, rien du tout, et ils avaient dû le prouver en se défaisant de tous leurs vêtements et en subissant les sarcasmes de ces effrayants soldats.
Quintus, qui avait trois ans de plus que son frère, sâétait demandé si son père avait ressemblé à ces hommes. Il nâen avait quâun souvenir très vague. Il était tout petit lorsque le centurion était parti en service actif en Germanie. Leur mère avait dû se débrouiller seule avec lâaide unique de deux sÅurs plus âgées pour faire tourner leur petite ferme et sâoccuper de Quintus et de son petit frère.
Une quinzaine de jours auparavant, leur mère avait été informée de la mort de son mari au combat contre les Cherusci. En apprenant par la suite que ce salaud avait dilapidé la totalité de ses soldes en agapes et filles de joie, tout ce quâelle avait pu faire, câétait verser des larmes dâimpuissance.
Criblée de dettes, elle sâétait empressée de vendre sa terre pour une somme dérisoire à un riche patricien. Elle et ses filles allaient devoir survivre en travaillant comme journalières et tisseuses, mais elle ne pouvait pas nourrir deux bouches inutiles. Plutôt que de les vendre comme esclaves, elle avait pris la décision un peu plus humaine dâenvoyer ses garçons chez leur oncle pour quâils gagnent leur vie.
à en juger par les odeurs, ils approchaient du marché aux bestiaux dans un quartier populaire où les constructions sâentassaient sur des îlots de terre dans un
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